Lectures estivales sur l’économie, même pour les (pseudo) nuls...
ême en vacances, on peut se détendre en lisant des livres portant sur l’économie, sans que ce soit trop formel. Je vous en suggère ici quelques-uns, en raison de l’originalité de leurs propos ou de l’intérêt des idées qu’ils exposent.
Glen Hodgson et Mario Lefebvre, le Conference Board du Canada, 2014
La saison de hockey vient à peine de finir, la Coupe du Monde de soccer bat son plein, et on se replongerait dans la lecture d’un ouvrage qui traite de sport professionnel? Tout à fait. Parce que le livre en question ne traite pas des projections quant au classement des équipes de la LNH l’an prochain: il analyse de long en large le potentiel des villes canadiennes qui ont ou qui voudraient des clubs dans les grandes ligues, tout en nous rappelant que ce n’est pas tant une affaire de sport que de gros sous. Et les auteurs sont deux économistes qui s’y connaissent.
Glen Hodgson travaille au Conference Board du Canada, comme le faisait son collègue Mario Lefebvre avant de devenir pdg de l’Institut de développement urbain du Québec. Tous deux ont abondamment écrit par le passé sur l’économie du sport professionnel.
Pour eux, il existe trois facteurs critiques liés au succès d’un grand club, quel que soit le sport: la qualité du management, celle des infrastructures disponibles et le soutien des amateurs. S’ajoutent quatre assises incontournables: la taille du marché, le niveau des revenus locaux, la présence d’un nombre suffisant d’entreprises et l’état de la concurrence.
Dans ces conditions, ils indiquent que les Nordiques pourraient effectivement survivre une fois de retour à Québec, tout comme le baseball professionnel pourrait renaître de ses cendres à Montréal. Play ball!
Bernard Motulsky, Éditions Transcontinental, 2014
Il n’est plus vraiment nécessaire de démontrer l’importance de la communication pour toute entreprise qui se respecte. Mais communiquer pour communiquer ne mène à rien si on ne s’est pas d’abord demandé pourquoi on le fait et dans quelle mesure il est possible d’adapter ses moyens à ses besoins.
Expert reconnu en communications, Bernard Motulsky est titulaire de la chaire de relations publiques et communication marketing à l’UQAM. Il sait illustrer son exposé d’exemples convaincants.
Par exemple, la société Aliments Ultima, filiale d’Agropur, avait un grand défi à relever quand elle a décidé de concevoir et de mettre en marché un nouveau yogourt après avoir perdu la licence de Yoplait. Innover, c’est bien, percer le marché, c’est encore mieux. Le lancement de la marque ïogo a été couronné de succès, parce qu’on a su rejoindre le public. C’était une grosse campagne, mais elles n’ont pas à être toutes aussi imposantes. Il suffit de se donner un plan de match rigoureux. Il date de quelques années, mais ce livre est à lire et à relire.
Guerre nucléaire, pluies acides, populations exsangues... le 21e siècle allait être celui de la misère globale. Un instant! dit l’auteur, ancien journaliste au magazine The Economist. Sans nier les risques, nombreux, il soutient que nos conditions de vie n’ont cessé de s’améliorer. Nous produisons 33% plus de nourriture qu’au milieu du dernier siècle, l’espérance de vie a grimpé de 30%, tandis que la mortalité infantile a quant à elle diminué des deux tiers. De plus, le PIB par habitant n’a baissé que dans six pays: partout ailleurs, il est en hausse, et parfois de façon spectaculaire.
Comment expliquer ces avancées? Essentiellement par la progression de la communication, des échanges et du commerce, dit Matt Ridley. Le « cerveau collectif » est un formidable outil, auquel participent les forces de chaque groupe.
Même s’il ne faut pas pour autant être aveugle face aux périls, sa devise demeure: « Ne désespérez pas, soyez ambitieux ».
Adam Grant, Éditions Transcontinental (traduit de l’anglais), 2014
Préfacé par L. Jacques Ménard, ce rafraîchissant ouvrage rappelle le principe suivant: « Au-delà du talent, de l’effort et de la chance, la générosité est un puissant moteur de succès ».
Adam Grant répertorie trois personnalités fondamentales dans une société: les preneurs, les donneurs et les échangeurs. Malgré leur nom, les donneurs ne sont pas tant des philanthropes que des gens qui aident les autres à retirer autant sinon plus d’avantages qu’eux-mêmes dans une relation. Au besoin, des échangeurs arrivent en renfort, mais pas nécessairement par calcul. À la longue, ce comportement procure des retombées durables et la générosité finit par triompher...
Bonne lecture et bon été!
Une nouvelle taxe sur le carbone?
En entrevue, l’élu semble avoir laissé ses nouveaux habits de politicien chez le tailleur. Le député de Robert-Baldwin, un château fort libéral de l’ouest de l’île de Montréal, conserve le ton professoral qu’il avait lorsqu’il commentait l’actualité économique dans les médias en tant qu’économiste de la Banque Laurentienne.
Le ministre devra mettre à profit ses qualités de pédagogue lorsque viendra le moment de défendre la nécessité de « moderniser » la fiscalité. En décembre, la commission spéciale sur la fiscalité dirigée par le professeur Luc Godbout proposera au gouvernement des pistes pour entreprendre sa réforme.
M. Leitao donne en exemple la possibilité d’adopter une taxe sur le carbone. « Une avenue dans laquelle je n’aurais peut-être pas dû me lancer en entrevue », dit-il sur un ton moqueur en regardant son attaché de presse du coin de l’oeil. « Au point de vue écologique, si on veut vraiment changer les comportements, une taxe sur le carbone est un moyen qui est très efficace et très équitable. »
Protection des sièges sociaux
Les libéraux ont renoncé à utiliser le Fonds des générations pour protéger les sièges sociaux québécois contre une offre d’achat non sollicitée, confirme Carlos Leitao en entrevue, en réponse à une question portant sur l’absence de cet engagement électoral dans le premier budget du gouvernement Couillard. Après réflexion, M. Leitao s’est rendu compte qu’il n’était pas « approprié de changer » la mission du Fonds des générations, qui constitue un contrepoids à la dette publique.
Les ressources du Fonds du développement économique et d’Investissement Québec pourraient être mises à profit pour contrer une offre d’achat non sollicitée sur un fleuron du Québec inc. Quelle est la capacité financière de ce bouclier? M. Leitao garde son jeu fermé afin de ne pas créer de remous sur les marchés financiers. « C’est délibéré, admet-il. Plus c’est ambigu, mieux c’est. »
Sur le même sujet, il faudra patienter avant de connaître le sort des recommandations du rapport d’expert sur la protection des sièges sociaux, commandé par le précédent gouvernement. Avant le déclenchement des élections, le ministre Nicolas Marceau avait dit souhaiter modifier « rapidement » la Loi sur les sociétés par actions (LSAQ) afin de donner au conseil d’administration des moyens de se protéger d’une offre d’achat non sollicitée.
Même s’il estime que le rapport est « assez complet », M. Leitao se donne plus de temps pour digérer son contenu. D’abord, il veut s’assurer que les changements législatifs proposés ne donneront pas d’arguments à Ottawa pour revenir à la charge avec son projet de commission unique des valeurs mobilières. Puis, le ministre s’inquiète de la réputation du Québec auprès des marchés financiers. « On ne veut pas que toutes les actions des sociétés québécoises fassent l’objet d’un escompte en Bourse en raison d’une loi perçue comme trop protectionniste par les investisseurs », prévient le ministre des Finances. Si le gouvernement fédéral était une fée, quel serait votre premier voeu, ce que vous souhaiteriez le voir accomplir pour le Québec?
Le collègue Stéphane Rolland et moi avons soumis la question à l’avance à Carlos Leitao, histoire de nous assurer qu’il réfléchisse bien à sa priorité.
J’étais personnellement assez convaincu que le ministre des Finances parlerait du maintien des paiements de transferts en santé. Ottawa les indexe actuellement à 6%, mais, à compter de 2017-2018, l’indexation sera ramenée à la croissance du PIB (avec une garantie minimale de 3%). Rien pour améliorer le cadre financier du Québec.
Surprise, ce n’est pas le premier souhait de M. Leitao. Il aimerait plutôt que le fédéral tente de stimuler l’économie canadienne lorsqu’il affichera un surplus (probablement dès cette année). Et ce, de deux façons: en abaissant le fardeau fiscal des Canadiens et en investissant davantage dans les infrastructures.
« S’il y a des baisses d’impôt, est-ce que vous aimeriez occuper l’espace libéré? » lui a-t-on demandé. Autre surprise: « Non, je ne crois pas que ce serait approprié, le but est plutôt d’alléger le fardeau fiscal ».
Que penser du souhait?
Il est fort intéressant.
Le gouvernement fédéral a l’une des plus faibles dettes des pays industrialisés. En période de surplus, il vaut effectivement probablement mieux stimuler l’économie en redonnant de l’argent à dépenser et en rénovant ses infrastructures qu’en remboursant aux banques, dans lesquelles l’argent risque d’être moins actif.
Il est aussi possible de stimuler l’économie en investissant les surplus dans de nouveaux programmes sociaux. Une nouvelle dépense pour l’économie reste une nouvelle dépense.
Une différence majeure réside cependant entre les deux approches.
Dans le cas du souhait de M. Leitao, l’espace fiscal libéré demeure éventuellement récupérable par une province si les choses se corsent. La récupération fiscale devient pratiquement impossible si le fédéral a déjà engagé les sommes dans de nouveaux programmes. Les nouveaux programmes fédéraux coupent les fonds aux vieux programmes provinciaux.
Quel sera le programme socioéconomique du NPD, des conservateurs et des libéraux fédéraux pour la prochaine élection?
Le NPD réfléchit sans doute à bonifier le filet social, les conservateurs semblent réfléchir à un remboursement accéléré de la dette, et on ne sait pas trop encore à quoi réfléchit le Parti libéral.
Sans s’en douter, M. Leitao vient de déterminer les critères d’évaluation économique qu’utilisera l’électeur québécois.