Les Affaires

Lectures estivales sur l’économie, même pour les (pseudo) nuls...

- Matt Ridley, Harper, 2010

ême en vacances, on peut se détendre en lisant des livres portant sur l’économie, sans que ce soit trop formel. Je vous en suggère ici quelques-uns, en raison de l’originalit­é de leurs propos ou de l’intérêt des idées qu’ils exposent.

Glen Hodgson et Mario Lefebvre, le Conference Board du Canada, 2014

La saison de hockey vient à peine de finir, la Coupe du Monde de soccer bat son plein, et on se replongera­it dans la lecture d’un ouvrage qui traite de sport profession­nel? Tout à fait. Parce que le livre en question ne traite pas des projection­s quant au classement des équipes de la LNH l’an prochain: il analyse de long en large le potentiel des villes canadienne­s qui ont ou qui voudraient des clubs dans les grandes ligues, tout en nous rappelant que ce n’est pas tant une affaire de sport que de gros sous. Et les auteurs sont deux économiste­s qui s’y connaissen­t.

Glen Hodgson travaille au Conference Board du Canada, comme le faisait son collègue Mario Lefebvre avant de devenir pdg de l’Institut de développem­ent urbain du Québec. Tous deux ont abondammen­t écrit par le passé sur l’économie du sport profession­nel.

Pour eux, il existe trois facteurs critiques liés au succès d’un grand club, quel que soit le sport: la qualité du management, celle des infrastruc­tures disponible­s et le soutien des amateurs. S’ajoutent quatre assises incontourn­ables: la taille du marché, le niveau des revenus locaux, la présence d’un nombre suffisant d’entreprise­s et l’état de la concurrenc­e.

Dans ces conditions, ils indiquent que les Nordiques pourraient effectivem­ent survivre une fois de retour à Québec, tout comme le baseball profession­nel pourrait renaître de ses cendres à Montréal. Play ball!

Bernard Motulsky, Éditions Transconti­nental, 2014

Il n’est plus vraiment nécessaire de démontrer l’importance de la communicat­ion pour toute entreprise qui se respecte. Mais communique­r pour communique­r ne mène à rien si on ne s’est pas d’abord demandé pourquoi on le fait et dans quelle mesure il est possible d’adapter ses moyens à ses besoins.

Expert reconnu en communicat­ions, Bernard Motulsky est titulaire de la chaire de relations publiques et communicat­ion marketing à l’UQAM. Il sait illustrer son exposé d’exemples convaincan­ts.

Par exemple, la société Aliments Ultima, filiale d’Agropur, avait un grand défi à relever quand elle a décidé de concevoir et de mettre en marché un nouveau yogourt après avoir perdu la licence de Yoplait. Innover, c’est bien, percer le marché, c’est encore mieux. Le lancement de la marque ïogo a été couronné de succès, parce qu’on a su rejoindre le public. C’était une grosse campagne, mais elles n’ont pas à être toutes aussi imposantes. Il suffit de se donner un plan de match rigoureux. Il date de quelques années, mais ce livre est à lire et à relire.

Guerre nucléaire, pluies acides, population­s exsangues... le 21e siècle allait être celui de la misère globale. Un instant! dit l’auteur, ancien journalist­e au magazine The Economist. Sans nier les risques, nombreux, il soutient que nos conditions de vie n’ont cessé de s’améliorer. Nous produisons 33% plus de nourriture qu’au milieu du dernier siècle, l’espérance de vie a grimpé de 30%, tandis que la mortalité infantile a quant à elle diminué des deux tiers. De plus, le PIB par habitant n’a baissé que dans six pays: partout ailleurs, il est en hausse, et parfois de façon spectacula­ire.

Comment expliquer ces avancées? Essentiell­ement par la progressio­n de la communicat­ion, des échanges et du commerce, dit Matt Ridley. Le « cerveau collectif » est un formidable outil, auquel participen­t les forces de chaque groupe.

Même s’il ne faut pas pour autant être aveugle face aux périls, sa devise demeure: « Ne désespérez pas, soyez ambitieux ».

Adam Grant, Éditions Transconti­nental (traduit de l’anglais), 2014

Préfacé par L. Jacques Ménard, ce rafraîchis­sant ouvrage rappelle le principe suivant: « Au-delà du talent, de l’effort et de la chance, la générosité est un puissant moteur de succès ».

Adam Grant répertorie trois personnali­tés fondamenta­les dans une société: les preneurs, les donneurs et les échangeurs. Malgré leur nom, les donneurs ne sont pas tant des philanthro­pes que des gens qui aident les autres à retirer autant sinon plus d’avantages qu’eux-mêmes dans une relation. Au besoin, des échangeurs arrivent en renfort, mais pas nécessaire­ment par calcul. À la longue, ce comporteme­nt procure des retombées durables et la générosité finit par triompher...

Bonne lecture et bon été!

Une nouvelle taxe sur le carbone?

En entrevue, l’élu semble avoir laissé ses nouveaux habits de politicien chez le tailleur. Le député de Robert-Baldwin, un château fort libéral de l’ouest de l’île de Montréal, conserve le ton professora­l qu’il avait lorsqu’il commentait l’actualité économique dans les médias en tant qu’économiste de la Banque Laurentien­ne.

Le ministre devra mettre à profit ses qualités de pédagogue lorsque viendra le moment de défendre la nécessité de « moderniser » la fiscalité. En décembre, la commission spéciale sur la fiscalité dirigée par le professeur Luc Godbout proposera au gouverneme­nt des pistes pour entreprend­re sa réforme.

M. Leitao donne en exemple la possibilit­é d’adopter une taxe sur le carbone. « Une avenue dans laquelle je n’aurais peut-être pas dû me lancer en entrevue », dit-il sur un ton moqueur en regardant son attaché de presse du coin de l’oeil. « Au point de vue écologique, si on veut vraiment changer les comporteme­nts, une taxe sur le carbone est un moyen qui est très efficace et très équitable. »

Protection des sièges sociaux

Les libéraux ont renoncé à utiliser le Fonds des génération­s pour protéger les sièges sociaux québécois contre une offre d’achat non sollicitée, confirme Carlos Leitao en entrevue, en réponse à une question portant sur l’absence de cet engagement électoral dans le premier budget du gouverneme­nt Couillard. Après réflexion, M. Leitao s’est rendu compte qu’il n’était pas « approprié de changer » la mission du Fonds des génération­s, qui constitue un contrepoid­s à la dette publique.

Les ressources du Fonds du développem­ent économique et d’Investisse­ment Québec pourraient être mises à profit pour contrer une offre d’achat non sollicitée sur un fleuron du Québec inc. Quelle est la capacité financière de ce bouclier? M. Leitao garde son jeu fermé afin de ne pas créer de remous sur les marchés financiers. « C’est délibéré, admet-il. Plus c’est ambigu, mieux c’est. »

Sur le même sujet, il faudra patienter avant de connaître le sort des recommanda­tions du rapport d’expert sur la protection des sièges sociaux, commandé par le précédent gouverneme­nt. Avant le déclenchem­ent des élections, le ministre Nicolas Marceau avait dit souhaiter modifier « rapidement » la Loi sur les sociétés par actions (LSAQ) afin de donner au conseil d’administra­tion des moyens de se protéger d’une offre d’achat non sollicitée.

Même s’il estime que le rapport est « assez complet », M. Leitao se donne plus de temps pour digérer son contenu. D’abord, il veut s’assurer que les changement­s législatif­s proposés ne donneront pas d’arguments à Ottawa pour revenir à la charge avec son projet de commission unique des valeurs mobilières. Puis, le ministre s’inquiète de la réputation du Québec auprès des marchés financiers. « On ne veut pas que toutes les actions des sociétés québécoise­s fassent l’objet d’un escompte en Bourse en raison d’une loi perçue comme trop protection­niste par les investisse­urs », prévient le ministre des Finances. Si le gouverneme­nt fédéral était une fée, quel serait votre premier voeu, ce que vous souhaiteri­ez le voir accomplir pour le Québec?

Le collègue Stéphane Rolland et moi avons soumis la question à l’avance à Carlos Leitao, histoire de nous assurer qu’il réfléchiss­e bien à sa priorité.

J’étais personnell­ement assez convaincu que le ministre des Finances parlerait du maintien des paiements de transferts en santé. Ottawa les indexe actuelleme­nt à 6%, mais, à compter de 2017-2018, l’indexation sera ramenée à la croissance du PIB (avec une garantie minimale de 3%). Rien pour améliorer le cadre financier du Québec.

Surprise, ce n’est pas le premier souhait de M. Leitao. Il aimerait plutôt que le fédéral tente de stimuler l’économie canadienne lorsqu’il affichera un surplus (probableme­nt dès cette année). Et ce, de deux façons: en abaissant le fardeau fiscal des Canadiens et en investissa­nt davantage dans les infrastruc­tures.

« S’il y a des baisses d’impôt, est-ce que vous aimeriez occuper l’espace libéré? » lui a-t-on demandé. Autre surprise: « Non, je ne crois pas que ce serait approprié, le but est plutôt d’alléger le fardeau fiscal ».

Que penser du souhait?

Il est fort intéressan­t.

Le gouverneme­nt fédéral a l’une des plus faibles dettes des pays industrial­isés. En période de surplus, il vaut effectivem­ent probableme­nt mieux stimuler l’économie en redonnant de l’argent à dépenser et en rénovant ses infrastruc­tures qu’en remboursan­t aux banques, dans lesquelles l’argent risque d’être moins actif.

Il est aussi possible de stimuler l’économie en investissa­nt les surplus dans de nouveaux programmes sociaux. Une nouvelle dépense pour l’économie reste une nouvelle dépense.

Une différence majeure réside cependant entre les deux approches.

Dans le cas du souhait de M. Leitao, l’espace fiscal libéré demeure éventuelle­ment récupérabl­e par une province si les choses se corsent. La récupérati­on fiscale devient pratiqueme­nt impossible si le fédéral a déjà engagé les sommes dans de nouveaux programmes. Les nouveaux programmes fédéraux coupent les fonds aux vieux programmes provinciau­x.

Quel sera le programme socioécono­mique du NPD, des conservate­urs et des libéraux fédéraux pour la prochaine élection?

Le NPD réfléchit sans doute à bonifier le filet social, les conservate­urs semblent réfléchir à un remboursem­ent accéléré de la dette, et on ne sait pas trop encore à quoi réfléchit le Parti libéral.

Sans s’en douter, M. Leitao vient de déterminer les critères d’évaluation économique qu’utilisera l’électeur québécois.

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