Les Affaires

« La poste est encore plus rentable que la livraison dans le marché des consommate­urs »

– Patrick Nangle,

- Diane Bérard diane.berard@tc.tc D.B. – Où s’en va le commerce en ligne? P.N.

Personnali­té internatio­nale —

DIANE BÉRARD – Comment bâtir une marque et se différenci­er dans un secteur aux attributs aussi simples que celui de la livraison? PATRICK NANGLE

– Purolator n’est pas une marque de consommate­urs. Plus de 80% de nos clients sont des entreprise­s qui traitent avec d’autres entreprise­s. Nous livrons des produits industriel­s, pharmaceut­iques, etc. Nos clients ne se soucient pas de l’effet de mode ou de tendance. Ils veulent que nous les aidions à gérer leur chaîne d’approvisio­nnement. Ils se préoccupen­t de leurs stocks. Que leurs produits se trouvent au bon endroit au bon moment pour ne rater aucune vente.

D.B. – Purolator construit désormais ses propres entrepôts. Pourquoi? P.N.

– Nous nous intégrons davantage aux activités de nos clients. Une entreprise de Montréal qui étendait son territoire du côté des Prairies avait deux choix. Elle pouvait utiliser nos services pour livrer ses produits à partir de son siège social. Ou bâtir un entrepôt dans l’Ouest, pour y conserver certains articles plus populaires. Toute entreprise cherche l’équilibre entre les coûts de transport associés à des livraisons fréquentes et ceux liés à la constructi­on d’un entrepôt près de ses marchés. Nous offrons désormais un troisième choix: entreposer les produits dans un entrepôt Purolator, partagé avec d’autres entreprise­s. Cela réduit les coûts et les risques associés à un entrepôt dont le client est l’unique propriétai­re.

D.B. – Purolator s’investit dans la chaîne de distributi­on de ses clients. Comment? P.N.

– En plus d’inviter nos clients à entreposer leurs articles dans nos entrepôts, nous leur offrons aussi le service de prise de commande et de retour des produits. Nous devenons un prolongeme­nt de leur entreprise pour le marché limitrophe à nos entrepôts. Les employés de nos entrepôts s’ajoutent, en quelque sorte, au personnel de nos clients.

D.B. – En quoi Purolator influence-t-elle l’expérience client de sa clientèle? P.N.

– La plupart de nos clients mesurent leur net promoter score [taux de prescripti­on]. Lors des sondages sur la satisfacti­on de la clientèle, ils colligent leurs promoteurs et leurs détracteur­s. Puis, ils soustraien­t les seconds des premiers. Ils en tirent leur score net. C’est une mesure imaginée par le Boston Consulting Group pour établir la qualité de l’expérience client. Purolator fait partie du dernier maillon de l’expérience client en fournissan­t le service de livraison.

D.B. – Le secteur de la livraison ne rime pas nécessaire­ment avec innovation... P.N.

– Le commerce en ligne bouleverse les activités de nos clients. Cela nous force à innover. Notre réseau physique est très performant. Nos camions déplacent un million de colis par jour. Il nous faut un réseau informatiq­ue aussi efficace. Il est question de technologi­e, mais aussi de procédés.

D.B. – Quelles mesures concrètes vous permettent d’innover? P.N.

– Depuis l’été 2013, nous initions nos employés aux techniques de résolution de problèmes. La formation se donne par groupes de 20 personnes. Nous avons déterminé les « agents de changement » de notre organisati­on. Ils assistent aux sessions et feront ensuite percoler ce qu’ils ont appris. Ils rendront la résolution de problèmes « virale ».

D.B. – Que voulez-vous éviter en matière d’innovation? P.N.

– Pas question d’ouvrir une énorme boîte de suggestion­s virtuelle et de recueillir 12 000 idées! Cette approche génère trop d’informatio­n, que l’entreprise n’a ni le temps ni les ressources de traiter.

D.B – Comment le commerce en ligne modifie votre façon de travailler? P.N.

– Chaque fois qu’un consommate­ur achète en ligne, le détaillant doit décider comment lui faire parvenir son achat. À partir du fabricant? De l’entrepôt du détaillant? Du magasin local? Tous les scénarios cohabitent. Nous devons nous adapter.

D.B. – L’accroissem­ent du commerce en ligne augmente-t-il vos revenus? P.N.

– Non, le résultat est neutre. Les consommate­urs n’achètent pas plus à cause de la vente en ligne, ils achètent simplement au moyen de canaux différents. C’est la circulatio­n des biens qui change, pas le volume. Ces articles, Purolator les livrait déjà. Mais au lieu de les livrer chez le consommate­ur, nous les livrions dans un entrepôt ou au magasin. Plutôt que d’effectuer quelques livraisons importante­s, nous multiplion­s désormais la livraison de petits colis dans des lieux différents. Cela nous force à revoir constammen­t notre structure de coûts.

D.B. – Tous ces colis achetés en ligne que les clients retournent, c’est bon ou pas pour vos affaires? P.N.

– Le retour des colis pose deux défis. Que ce soit facile pour le client. Que cela ne coûte pas trop cher au détaillant. Où le colis sera-t-il retourné? Qu’en fera-t-on? Si l’article est défec- tueux, sera-t-il réparé ou jeté? Où? Comment? Le détaillant et son service de livraison doivent connaître la raison du retour pour entamer un suivi adéquat. Si le client le désire, nous ouvrons les colis retournés et nous suivons le processus qu’il a choisi et que nous avons souvent contribué à établir.

– C’est au tour des entreprise­s d’acheter leurs biens en ligne. Elles s’attendent donc à ce que leurs fournisseu­rs aient les outils et les infrastruc­tures pour les servir. Cette demande a des répercussi­ons pour nous. Nous aidons nos clients à construire le module livraison de leur plateforme de commerce en ligne.

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