Les Affaires

Centraide veut adapter son modèle

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- Dominique Froment dominique.froment@tc.tc philanthro­pie@tc.tc

Le monde philanthro­pique — « Le contexte philanthro­pique a considérab­lement changé depuis cinq ans. Nous devons faire évoluer notre modèle d’affaires », affirme Lili-Anna Pereša, pdg de Centraide du Grand Montréal, dans une entrevue avec Les Affaires.

L’an dernier, les sommes amassées ont diminué de près de 2 millions de dollars, à 56,3 M$. Du jamais vu ! Et la direction s’est vite rendu compte qu’il ne s’agissait pas d’un simple accident de parcours. Un exemple parmi d’autres illustre les défis qui attendent Centraide : les jeunes ne veulent pas entendre parler des retenues à la source sur la paie, qui ont représenté 57 % des revenus de Centraide du Grand Montréal l’an dernier.

Cette année, 48 organismes et projets recevront 12 000 $ de moins de Centraide, qui verse environ 125 000 $ à chaque organisme. Et les autres organismes devront rendre plus visibles leurs liens avec Centraide. « Les gens connaissen­t les organismes et Centraide, mais ils ne font pas le lien [entre les deux] », déplore Mme Pereša, qui est à la tête de l’organisme depuis janvier 2013.

Le défi des X et Y

Quels sont ces changement­s ? D’abord, la situation difficile à Montréal. « C’est pratiqueme­nt le plein emploi à Québec, et Centraide Québec et Chaudière-Appalaches a connu une très bonne campagne l’an dernier », rappelle-t-elle.

Autre caillou dans le soulier : Montréal a perdu 191 sièges sociaux depuis 10 ans. « Les décisions se prennent ailleurs. Et les gens donnent où ils vivent et travaillen­t. Quand un siège social déménage, ce sont ses plus hauts salariés qui partent. »

Et le remplaceme­nt des babyboomer­s par de jeunes travailleu­rs n’est pas une bonne nouvelle pour Centraide. Pourquoi ? Lorsqu’un baby-boomer part à la retraite, il disparaît de l’écran radar de Centraide. Sauf dans les entreprise­s où il y a une associatio­n de retraités.

Et quant aux jeunes qui les remplacent, ne leur parlez pas de retenues à la source. « Ils ont besoin d’être impliqués dans un projet », dit Mme Pereša.

Ce qui explique la pléthore d’événements caritatifs mettant un sport à l’honneur, comme le vélo ou la course. Ils sont à l’origine des nombreux courriels envoyés par des amis qui cherchent des commandi- taires pour une collecte de fonds ou un défi de groupe.

« Les jeunes donnent quand c’est un ami, un collègue ou une connaissan­ce qui le leur demande, pas quand c’est leur patron », explique Mme Pereša, une ingénieure de formation.

Voilà pourquoi Centraide veut encourager la tenue d’événements comme la montée des marches de la Place-Ville-Marie (mais pas à genoux comme à l’oratoire Saint-Joseph !), organisée depuis 15 ans par RBC au profit de Centraide. C’est aussi pourquoi Centraide organisera le 21 octobre un spinothon au Complexe Desjardins. Suncor organise une activité en vélo au profit de Centraide.

Les entreprise­s s’associent à une cause

Autre raison de la baisse des revenus de Centraide : de plus en plus d’entreprise­s préfèrent s’identifier à une thématique. Exemples : Bell et la maladie mentale, Rio Tinto Alcan et la persévéran­ce scolaire, la Banque Nationale et les jeunes, Desjardins et l’éducation, etc.

Ces entreprise­s ne mettent pas fin à leur campagne annuelle au profit de Centraide, mais sont très actives pour leur cause. Et comme le budget de leurs employés n’est pas élastique, ceux-ci doivent choisir.

Centraide s’adapte à cette nouvelle réalité en allant rencontrer les employés, ceux de Bell par exemple, pour leur faire savoir qu’il soutient lui aussi 23 organismes oeuvrant en santé mentale. « C’est certain que ça pose un défi additionne­l à Centraide et aux organismes que nous aidons », reconnaît la dirigeante.

Ajoutez à cela que le nombre de donateurs au Québec a baissé de 1,5 % en 2012 et que 20 % des ingénieurs-conseils – de hauts salariés – ont perdu leur emploi l’an dernier, et vous aurez un portrait des défis auxquels fera face Centraide.

L’organisme philanthro­pique a mis sur pied un comité de réflexion qui remettra son rapport à l’automne. Il a aussi demandé à Cohésion, un cabinet-conseil spécialisé dans les stratégies de marque, de l’assister dans son reposition­nement. « Nous voulons absolument retrouver le chemin de la croissance », lance Mme Pereša.

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