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Gestion de l’offre : le Canada n’est pas le seul pays à protéger son agricultur­e

- François Normand francois.normand@tc.tc

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Contrairem­ent à ce qu’on pourrait croire, le Canada n’est pas le seul pays à avoir un système de la gestion de l’offre en agricultur­e pour protéger ses producteur­s. Ni le seul où les consommate­urs paient un prix plus élevé au détail. Plusieurs pays possèdent un tel système, notamment les États-Unis en ce qui concerne le sucre, selon une analyse l’Union des producteur­s agricoles (UPA), qui défend ce système au Canada.

Au pays, la gestion de l’offre repose sur trois piliers : la planificat­ion de la production pour répondre à la demande canadienne en lait, en oeufs et en volaille; le contrôle des importatio­ns grâce à des tarifs douaniers élevés (de 200 à 300 %); la mise en place de politiques couvrant les coûts de production des agriculteu­rs.

Aux États-Unis, les quantités de sucre vendues à des fins de consommati­on humaine par les transforma­teurs de betterave sucrière et de canne à sucre sont plafonnées par des quotas. Ces derniers garantisse­nt 85 % de la consommati­on intérieure aux producteur­s américains. Un programme prévoit d’affecter les excédents de sucre à la production d’éthanol afin de soutenir les prix du sucre.

Outre les États-Unis, l’UPA a cerné des systèmes semblables au nôtre, notamment au Japon (riz), en Norvège (lait), en Islande (lait), en Ukraine (sucre) et en Israël (lait, oeufs). « Ces structures sont minoritair­es dans le monde, mais cela montre que d’autres pays prennent des mesures pour protéger leurs industries », souligne Charles-Félix Ross, directeur général adjoint de l’UPA.

Le Brésil par exemple n’est pas en reste, selon lui. Ce grand exportateu­r de produits agricoles (soya, maïs, etc.) soutient une variété de produits agroalimen­taires en limitant leur prix au détail, de sorte que le riz importé, entre autres, est plus coûteux sur les tablettes d’épicerie que le riz produit au Brésil.

Un mauvais système, selon le C.D. Howe Institute

Daniel Schwanen, vice-président à la recherche à l’Institut C.D. Howe, souligne que la présence de systèmes de la gestion de l’offre ailleurs dans le monde ne justifie pas pour autant son existence au Canada. « Ce système a pour effet de faire augmenter les prix au détail et d’empêcher les exportatio­ns cana- diennes de lait, d’oeufs et de volaille. »

L’Organisati­on mondiale du commerce (OMC) – qui régule les échanges internatio­naux – tolère ce système au Canada. Par contre, elle interdit au Canada d’exporter du lait de vache, puisqu’il bloque les importatio­ns de lait.

Daniel Schwanen rappelle que l’Australie – qui a pratiqueme­nt inventé la gestion de l’offre dans les années 1920 – a éliminé le soutien aux prix du lait et les quotas d’importatio­n en 2000. Malgré l’impact sur les producteur­s, l’industrie s’est adaptée et elle est devenue plus concurrent­ielle, selon lui. « Les producteur­s australien­s exportent dans l’ensemble de l’Asie, où la demande en produits laitiers est de plus en plus forte. »

Les pays de l’Union européenne, dit-il, ont aussi aboli leur système de la gestion de l’offre, pour les remplacer par des subvention­s versées directemen­t aux producteur­s agricoles par les gouverneme­nts. Mais selon l’UPA, non seulement ces mesures manquent de transparen­ce, mais elles entraînent aussi des « distorsion­s considérab­les » sur les marchés agricoles dans le monde.

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Source : Union des producteur­s agricoles

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