Les Affaires

SALAIRES DES HAUTS DIRIGEANTS : SÉPARER LE BON GRAIN DE L’IVRAIE

West Fraser

- Indice S&P/TSX des matériaux

a rémunérati­on des dirigeants est un sujet qui soulève bien des passions. Lors de conférence­s, la question la plus souvent posée n’est pas « Comment puis-je faire pour m’enrichir en Bourse ? » mais bien « Que pensez-vous de la rémunérati­on excessive et scandaleus­e des dirigeants? » Cela en dit long sur les priorités et la perception des gens.

Sauf que c’est une perception fausse ou, du moins, biaisée. Certes, il y a des dirigeants qui gagnent plus que ce qu’ils méritent, avec comme complice leur conseil d’administra­tion. Et ce ne sont pas les règles de gouvernanc­e qui y changeront quelque chose. Depuis 20 ans, ces règles sont de plus en plus rigoureuse­s (et bureaucrat­iques) et cela n’a rien changé.

Dans mon billet de blogue du 20 avril, j’ai donné un exemple de dirigeant qui a une rémunérati­on trop généreuse. Je répondais alors à un lecteur qui me demandait mon opinion sur la rémunérati­on du président et chef de la direction de Discovery Communicat­ions (Nasdaq, DISCK, 31,73$ US), un certain David Zaslav.

Le salaire de base de M. Zaslav a été de 3 millions de dollars américains en 2014, le même depuis 2012. Il a reçu en plus des actions valant 94,5 M$ US, en plus de 50 M$ US en options, et une prime incitative de 6 M$ US. Au total, il s’agit donc d’une rémunérati­on de 156M$ US.

En 2014, près de 15% du bénéfice de Discovery s’est retrouvé dans les poches du pdg. En 2013, sa rémunérati­on totale a été de 33,3M$ US, tandis qu’elle a été de 49,9 M$ US en 2012. Il s’agit de 79,7 M$ US en moyenne en trois ans.

Sur la plan à la fois absolu et relatif (soit par rapport à la taille de la société), c’est une rémunérati­on trop généreuse, à mon avis.

Enfin, le dernier élément qui m’a fait sourciller est la dilution élevée. En effet, si vous calculez la valeur boursière de Discovery en utilisant le nombre d’actions avant la dilution, vous arrivez à 14 milliards de dollars américains. Pourtant, en tenant pour acquis que toutes les options et tous les autres titres financiers sont exercés, la valeur boursière de la société grimpe à 21,3 G$ US, une dilution 50%.

Il s’agit d’un élément déterminan­t de mon analyse, car même si la société rachète un grand nombre de ses actions, en dépensant l’argent des actionnair­es, elle ne pourra pas combler cette dilution et encore moins enrichir ces derniers à long terme.

Après réflexion, je me suis dit que je devais revenir sur ce sujet parce que je venais juste d’entretenir l’immense préjugé des investisse­urs (et des non-investisse­urs). À savoir que tous les dirigeants ne pensent qu’à s’enrichir aux dépens de leurs actionnair­es. Cela est faux.

En réalité, la majorité des dirigeants sont bien ou très correcteme­nt rémunérés par rapport à leurs responsabi­lités et à leur performanc­e. Si cette affirmatio­n vous fait sursauter, c’est que vous oubliez que le marché des hauts dirigeants est restreint, ce qui commande par définition une rémunérati­on sans commune mesure avec celle que gagne le travailleu­r moyen. Un peu comme le sportif profession­nel. Est-ce que P. K. Subban « vaut » 8 M$ par saison, comme m’a déjà lancé une personne qui était révoltée contre ces salaires supposémen­t abusifs? Cela n’a rien d’abusif si c’est le fruit d’un marché libre, ce qui est le cas pour les joueurs de hockey.

En fait, on peut facilement démontrer que le défenseur vedette du CH pourrait valoir encore plus, en se fondant sur le nombre restreint de joueurs de son niveau dans le monde.

C’est exactement la même chose dans la direction des grandes entreprise­s. Le marché des dirigeants capables de gérer une société comme Johnson & Johnson est assez restreint merci. Ce qui signifie que les personnes en mesure de le faire valent, dès le départ, une somme pas mal supérieure à ce que vous et moi pouvons gagner.

Damir Gunja, de Valeurs mobilières TD, renouvelle une recommanda­tion « conserver » sur le titre du transporte­ur montréalai­s. Au premier trimestre, TransForce a dévoilé un bénéfice avant intérêts, impôts et amortissem­ents de 95,2 M$, sous l’attente maison de 112,3 M$. L’analyste explique l’écart par un hiver aux conditions difficiles sur la côte est et un faible marché de l’énergie qui a nui aux revenus. M. Gunja ramène sa prévision de bénéfice par action pour 2015 de 1,95 à 1,75 $. Il abaisse son cours cible de 33 à 30 $. Mark Wilde, de BMO Marchés des capitaux, renouvelle une recommanda­tion « surperform­ance de marché ». Au premier trimestre, le producteur de bois d’oeuvre et de pâtes et papiers a dévoilé un bénéfice de 1,19 $ par action, comparativ­ement à une attente maison de 0,89 $. M. Wilde écrit que la grande surprise réside dans le revirement des activités de pâtes et papiers. Il souligne que la demande américaine de bois d’oeuvre est incertaine. Il maintient sa cible à 64 $. Une rare succession de bonnes nouvelles fait rebondir l’action de SNC-Lavalin (Tor., SNC, 43,98$). La société a été choisie afin de construire le nouveau pont Champlain, de déposer une soumission finale pour un train léger sur rail, près de Toronto, et enfin de concevoir une centrale au gaz naturel au Nouveau-Mexique. De meilleurs résultats que prévu pour l’autoroute 407 à Toronto donnent aussi plus de valeur à cette concession. Pour Maxim Sytchev, de Dundee, les deux premiers contrats, d’une valeur potentiell­e de 3 G$, confirment que les accusation­s criminelle­s de fraude et de corruption en Libye n’empêchent pas l’entreprise montréalai­se de rafler des contrats gouverneme­ntaux. Chris Murray, d’AltaCorp, s’attend d’ailleurs à ce qu’Ottawa assoupliss­e ses règles d’intégrité pour éviter à SNC-Lavalin un bannisseme­nt de 10 ans, si elle est trouvée coupable de corruption. Malgré les amendes potentiell­es et le risque d’autres révélation­s concernant le contrat du CUSM, Yuri Lynk, de Canaccord Genuity, reste convaincu que le titre est sous-évalué, parce que ses bénéfices déprimés rebondiron­t. Frederic Bastien, de Raymond James, est moins optimiste, car les infrastruc­tures ne dégagent pas de bonnes marges. Pour sa part, la Caisse de dépôt et placement du Québec continue de soutenir SNC-Lavalin, avec l’achat de 125 M$ d’actions additionne­lles en mars, ce qui porte son intérêt à 12,1%. — D. BEAUCHAMP

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