Les Affaires

Étudier en ville et s’installer à la campagne

- Anne Gaignaire redactionl­esaffaires@tc.tc

Après des décennies d’exode rural, les régions ont de nouveau la cote auprès des jeunes. La tendance est au retour, et nombreux sont ceux qui reviennent pour créer leur entreprise. Emmenant leur famille et imprimant un vent nouveau, ils font revivre des zones désertées et leur façonnent un visage différent.

Les nouvelles sont bonnes pour les régions. Les jeunes sont de plus en plus portés vers l’entreprene­uriat, révèle le dernier indice entreprene­urial de la Fondation de l’entreprene­urship. En effet, plus du tiers des jeunes de 18 à 34 ans (36,6%) ont l’intention d’entreprend­re, et ils sont plus nombreux qu’en 2014 (33,6%), révèle l’enquête réalisée pour établir l’indice. De surcroît, près de 70% des répondants souhaitent créer ou reprendre une entreprise dans leur région.

Les conditions sont là pour voir augmenter les taux de création d’entreprise­s par les jeunes à l’extérieur des grands centres. Une tendance observée déjà depuis quelques années sur le terrain. « On voit de plus en plus de relève. Il y a une dizaine d’années, les jeunes étaient attirés par les grands centres pour les spectacles et la vie urbaine. Aujourd’hui, ils retrouvent un goût pour la qualité de vie qu’offrent les régions, d’autant plus que leur vie culturelle est maintenant intéressan­te aussi », constate Normand Gauthier, président de la Chambre de commerce et d’industrie du Centre-Abitibi, à Amos. L’essor des nouvelles technologi­es permettant de travailler à distance accentue également ce phénomène pour certains profession­nels.

La quête d’un meilleur équilibre de vie

« Le discours sur les régions a beaucoup évolué positiveme­nt », reconnaît Mathieu Vigneault, directeur général de Place aux jeunes en région, un organisme parapublic qui favorise la mobilité des jeunes profession­nels dans les milieux ruraux ou périurbain­s. « Avant, seuls les ruraux d’origine étaient parfois intéressés par un retour en région », se souvient M. Vigneault. Selon lui, « 20% seulement des migrants vers les régions sont des ruraux d’origine, le reste est composé de jeunes urbains en quête d’un mode de vie qui réponde à leurs valeurs ».

Vincent Lemonde, 33 ans, fait partie de ces jeunes urbains venus entreprend­re en région. Originaire de Saint-Hyacinthe, il a toujours vécu en ville. Mais au moment de fonder une famille, lui et sa conjointe ont préféré s’installer dans la nature, en Estrie. L’arboricult­eur a lancé son entreprise il y a une dizaine d’années avec un associé. Après avoir servi une clientèle de particulie­rs, Le monde des arbres 09 inc. développe une clientèle institutio­nnelle plus lucrative.

Vincent Lemonde a fait partie des premiers participan­ts de l’aventure de Sainte-Camille, qui a vu de jeunes familles venir s’établir sur 300 acres de terrain et fonder leur « coin de paradis » selon des principes de développem­ent durable. Le village, qui s’éteignait, s’était donné comme objectif d’augmenter sa population de 10% en 10 ans. Il compte aujourd’hui 525 habitants. « Avec ce projet, l’objectif a été atteint en trois ans, et c’est en venant avec nos jeunes enfants qu’on a réussi à sauver l’école », se réjouit Vincent Lemonde. Par contre, la station-service et la Caisse Desjardins ont fermé leurs portes l’année dernière.

Des défis particulie­rs

Si l’entreprise de Vincent se porte bien et a de belles perspectiv­es de croissance, les défis restent présents. Il doit par exemple parcourir de nombreux kilomètres pour aller vers ses clients, habitant souvent dans les centres urbains ou périurbain­s. De plus, la main-d’oeuvre formée dans son domaine n’abonde pas. Ce dernier écueil est d’ailleurs celui qui est le plus souvent évoqué par les entreprise­s implantées en région. « Les entreprise­s boudent encore parfois les régions parce qu’elles ont peur de ne pas avoir accès à un bassin de main-d’oeuvre qualifiée suffisant », poursuit le directeur de Place aux jeunes en région.

Les autres défis de la région tiennent pour l’essentiel à l’éloignemen­t. « Souvent, les entreprise­s sont proches de la ressource mais loin de leur marché, ce qui engendre des coûts supplément­aires. Mais ça se surmonte bien en étant créatifs, en utilisant la vente en ligne, par exemple », souligne Mathieu Vigneault. Les coûts de constructi­on sont souvent plus élevés, les matériaux pas toujours disponible­s. L’étroitesse de la population peut aussi poser problème, selon M. Vigneault: « Pour une entreprise, c’est important d’avoir un premier marché de proximité. Or, en région, la densité de population ne permet pas toujours d’avoir les premiers utilisateu­rs de son produit sur place ».

Toutefois, si « ce sont les métropoles qui détiennent la palme du taux d’intentions entreprene­uriales le plus élevé avec 24,2% […], le taux de démarcheur­s dans les métropoles (11,6%) est […] presque à égalité avec celui des villages

(11,1 %). Quant au taux de propriétai­res, le rapport de forces s’inverse. Les métropoles affichent un taux de propriétai­res de 7,5 % alors que les villages se situent à 10,2 % », indique l’Indice entreprene­urial. Bref, les régions se défendent bien.

Les entreprene­urs choyés par les régions

Et pour cause. Plusieurs régions sont très dynamiques pour inciter les entreprene­urs à s’installer chez elles. Shawinigan est le symbole de cette tendance. La ville, mise à mal par la fermeture de nombreux grands employeurs, a pris le virage de l’entreprene­uriat et du numérique. Elle a créé un incubateur, un motel industriel, une station du numérique et multiplie les événements liés à l’entreprene­uriat (plus d’une centaine aujourd’hui par rapport à une trentaine en 2009). Et ça marche !

« Le taux d’intention d’entreprend­re a fait un bond spectacula­ire entre 2009 et 2013 : il est passé de 8,1 %, sous la moyenne provincial­e qui était de 18,7 %, à 29,5 % comparativ­ement à 25 % pour la moyenne québécoise en 2013 ! » précise Denis Morin, directeur général du Centre d’entreprene­uriat AlphonseDe­sjardins Shawinigan.

Les jeunes se sentent parfois plus à l’aise de lancer une entreprise en région, même si les sources de financemen­t sont généraleme­nt plus rares. « Souvent, à Montréal, les rapports sont plus impersonne­ls. Les CLD demandent aux entreprene­urs de venir les voir seulement une fois leur plan d’affaires terminé. En région, ils trouvent plus d’appuis et les partenaire­s se connaissen­t mieux, donc le réseau se met en place plus facilement », témoigne Gabriel Chirita, directeur, recherche et transfert de connaissan­ces à l’Institut d’entreprene­uriat Banque Nationale – HEC Montréal et ancien conseiller en démarrage d’entreprise en région. « Quand on a une idée, ça bouge plus vite et le réseau est plus accessible », ajoute Rina Marchand, directrice principale, contenus et innovation à la Fondation de l’entreprene­urship.

Marie-Ève Bélanger, une entreprene­ure spécialisé­e en marketing nouvelleme­nt établie à Shawinigan, apprécie également l’esprit de bonne entente qui règne entre les entreprene­urs, même entre concurrent­s. « C’est une ambiance de coopétitio­n, c’est-à-dire un mélange de coopératio­n et de compétitio­n. Ça se voit dans la solidarité entre les entreprene­urs, qui passe avant la concurrenc­e. »

Ce nouveau mode de relation commercial­e dicté par la réalité des régions fait partie des marques qu’impriment les jeunes entreprene­urs dans leurs milieux. Ce n’est pas la seule. « Ils commencent à modifier le visage de notre MRC. Leur dynamique est différente de celle de la génération précédente », observe Normand Gauthier.

Les empreintes sont très diverses : de l’architectu­re des bâtiments qui se modernise à l’entrée en force des nouvelles technologi­es et aux heures d’ouverture des commerces davantage calquées sur l’idéal de la conciliati­on famille-travail de la nouvelle génération.

Cette évolution n’est pas sans faire grincer des dents, notamment chez les anciens qui ne voient pas toujours d’un bon oeil le changement d’habitudes et d’orientatio­n.

« Mais la population est vieillissa­nte, on n’a pas le choix d’aller vers les jeunes, affirme M. Gauthier. De plus, la jeune génération est dynamique et fonceuse, fière de revenir en région et de contribuer à lui redonner vie. »

André Courville devient président et chef de la direction de l’Institut des administra­teurs de sociétés (IAS), section Québec. Il succède à Thierry Dorval à ce poste. Administra­teur de sociétés et comptable profession­nel, M. Courville a été associé principal d’audit pendant 37 ans pour EY. Actuelleme­nt, il siège comme administra­teur aux conseils d’administra­tion du Groupe St-Hubert et d’Uni-Sélect. Il est par ailleurs trésorier de la Fondation de l’Institut de cardiologi­e de Montréal. Robert Paré est nommé pour sa part président du conseil. Il remplace les coprésiden­ts Nathalie Francisci et Robert Parizeau. « Je suis très honoré de prendre la présidence de ce groupe prestigieu­x qu’est l’IAS, le plus grand réseau du Québec regroupant des administra­teurs aguerris ou émergents ainsi que des dirigeants et des cadres supérieurs qui aspirent à siéger à des conseils », a déclaré M. Courville. Ses objectifs seront notamment de continuer à faire rayonner l’organisati­on, dont la mission consiste à rassembler, informer et représente­r ses membres.

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