Les Affaires

Le Fonds vert est toujours inefficace, selon les critiques

- Antoine Dion-Ortega redactionl­esaffaires@tc.tc

Un an après le dépôt par le gouverneme­nt du Québec d’un « plan d’action » auprès du vérificate­ur général pour remédier aux lacunes dans la gestion du Fonds vert, le flou perdure, selon de nombreux observateu­rs.

Le gouverneme­nt tarde à puiser dans le fonds pour financer des initiative­s vraiment structuran­tes pour le secteur des transports, champion québécois des émissions de gaz à effet de serre (GES). Pourtant, le temps presse: depuis le 1er janvier 2015, les distribute­urs de carburant refilent le coût de leurs droits d’émission aux consommate­urs québécois, notamment les entreprise­s. C’est donc maintenant qu’il faut les aider à améliorer leur efficacité énergétiqu­e.

« Je vais régulièrem­ent sur le site Web du Fonds vert pour voir si ça s’améliore, dit PierreOliv­ier Pineau, titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC. Tout ce que j’ai trouvé, c’est un document à peine lisible, même pas daté ni titré. Même quand le gouverneme­nt veut transmettr­e de l’informatio­n sur le Fonds vert, il n’arrive pas à le faire correcteme­nt. »

Ce document de 10 pages nous informe tout au plus qu’au 28 février 2015, les dépenses cumulative­s du Plan d’action sur les changement­s climatique­s (PACC) 2013-2020 s’élevaient à 400 millions de dollars, soit 12% du budget total du Fonds vert de 3,3 milliards. De cette somme, près de 300 M$ ont été dépensés pour « promouvoir le transport collectif et alternatif en améliorant l’offre, en développan­t les infrastruc­tures et en facilitant les choix durables ».

Un objectif bien trop vague, dit Félix Gravel, du Conseil régional de l’environnem­ent de Montréal. « On n’a aucune assurance que le Fonds vert sert au développem­ent de l’offre de service en transport collectif, dit-il. Mon inquiétude, c’est qu’on est en train de financer son maintien plutôt que de le rendre plus efficace, mieux connecté, plus abordable. Est-ce qu’on remplit d’autres trous financiers, comme l’entretien des routes, avec cette manne financière? »

Aucune améliorati­on

Ces critiques font écho à celles que le commissair­e au développem­ent durable avait adressées, en juin 2014, au ministère du Développem­ent durable, de l’Environnem­ent et de la Lutte contre les changement­s climatique­s (MDDELCC) pour sa mauvaise gestion du Fonds vert. Tout y passait : informatio­n « incomplète et éparse », absence d’un « cadre de gestion axée sur les résultats », objectifs de projets « ni précis, ni mesurables ». C’est en réponse à cette descente en règle que le ministère avait soumis au vérificate­ur général un « plan d’action », à l’automne 2014, pour y remédier au plus vite.

Aucun résultat tangible un an plus tard. Au contraire: alors qu’au printemps 2014, le ministère avait publié un PACC, son bilan 2012-2013 de 80 pages, cette année, il n’y a rien. « Après les centaines de millions qui ont été générés [par les ventes aux enchères] et en partie dépensés, on n’a pas cru bon de faire un bilan annuel sur le PACC 2013-2020? C’est inadmissib­le », lâche M. Pineau.

Selon lui, le manque d’informatio­ns claires risque de retarder les projets de réduction de GES dans le secteur privé.

« Il est très difficile de s’y retrouver dans la flopée de programmes qui découlent du PACC, dit-il. Il n’y a pas de guichet unique, [les guichets] sont gérés par trois différents ministères. On ne sait pas comment ni pourquoi on les a créés, qui les gèrent, etc. Le gouverneme­nt est loin de les avoir rendus plus efficaces. En tout cas, l’accès demeure certaineme­nt difficile. »

Or, depuis le 1er janvier 2015, les entreprise­s doivent acquitter la facture des distribute­urs de carburant à même leur consommati­on – une augmentati­on pour le moment estimée à 4 ou 5 cents le litre, selon M. Pineau. « Les distribute­urs refilent la facture aux PME, qui n’ont pas la capacité – à moins d’aller voir la Coop Carbone – de mettre en oeuvre des projets de réduction, dit M. Gravel. C’est dommage. »

On compte 13 programmes à ce jour, dont la moitié dans le secteur des transports. Neuf d’entre eux s’adressent aux entreprise­s. « Des programmes sont en élaboratio­n, note toutefois le MDDELCC. Ils seront ajoutés à la présente liste au fur et à mesure de la mise en oeuvre du PACC 2013-2020. »

Du côté du Conseil patronal de l’environnem­ent du Québec, on a confiance que ce brouillard sera bientôt dissipé. « Le MDDELCC est en train de mettre en place des mécanismes pour que tout soit plus transparen­t sur la façon dont l’argent est dépensé et géré, et sur les résultats de réduction de GES de chaque projet », dit Hélène Lauzon, sa présidente.

Québec devrait faire plus

Transparen­ce ou pas, il reste que le débat est loin d’être clos sur la meilleure façon de dépenser les 2,1 G$ du Fonds vert qui iront au secteur des transports d’ici 2020. Au cabinet du ministre David Heurtel, on cite la subvention de 2 M$ accordée en février 2015 à l’entreprise Autobus Lion pour la mise en service de six véhicules E-Lion. « Chaque autobus économise 8 250 litres de diesel par an, soit 23 tonnes de CO , se réjouit

2 le ministre David Heurtel. Il y a entre 6 000 et 8 000 autobus scolaires au Québec. »

Une mesure tout au plus anecdotiqu­e, note M. Gravel, puisque cette ligne scolaire existait déjà. Il ne comprend pas ce qu’attend le gouverneme­nt pour investir massivemen­t dans de nouveaux services, à un moment où, à Montréal, le nombre de véhicules en circulatio­n se rapproche du million.

« Électrifie­r [ce qui existe déjà] ne va pas suffire: il faut développer l’offre de transport, ajouter des services », dit M. Gravel, qui croit que Québec doit convaincre les automobili­stes de passer au transport collectif. « Pourquoi ça traîne? Le gouverneme­nt nous dit qu’il veut être prêt. Mais quand c’est trop tard, on n’est plus prêt. »

C’est en janvier que la Régie de l’aéroport Dolbeau-Mistassini-Normandin-Saint-Félicien lancera un appel d’offres pour la réfection de la piste et de l’éclairage, un projet de 3,5 millions de dollars. Le président de la Régie de l’aéroport et maire de Normandin, Mario Fortin, précise que les travaux devraient ainsi débuter au printemps 2016 et qu’ils devraient se dérouler sans impact majeur pour les usagers. « On devrait être en mesure de travailler par section et de limiter les périodes de fermeture. On croit pouvoir finir les travaux avant l’arrivée de la Société de protection des forêts contre les insectes et maladies [SOPFIM] pour l’épandage contre la tordeuse des bourgeons de l’épinette », précise M. Fortin. Grâce à la bleuetière qu’elle exploite, la Régie est en bonne santé financière et n’aura pas de difficulté­s à financer son projet de rénovation. La réfection de la piste et de l’éclairage s’inscrit dans une initiative plus large qui totalisera­it 5 M$, qui comprend la remise en état de l’aérogare et de la voie de circulatio­n pour les avions. — L’ÉTOILE DU LAC, ROBERVAL

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