Les Affaires

SNC-Lavalin : le départ surprenant de Robert Card

Mattel Trip Advisor

- François Pouliot françois.pouliot@tc.tc Chroniqueu­r

C’est avec surprise qu’on a appris le remercieme­nt du grand patron de SNC-Lavalin, Robert Card, et son remplaceme­nt par le chef de l’exploitati­on, Bruce Neil. Pourquoi M. Card doit-il partir ? Il se pourrait que ce soit à la suite d’une décision qu’on cautionnai­t à l’époque, et qui nous aurait probableme­nt valu aussi d’être remercié.

À la première croisée des chemins, Robert Card n’avait pas fait forte impression. C’était à l’assemblée annuelle de SNC, au printemps 2013, et le grand patron ne savait pas que son entreprise ne pouvait plus soumission­ner aux contrats d’Hydro-Québec (parce qu’elle avait décroché le projet de Muskrat Falls, concurrent­e d’Hydro). C’était pourtant en une de La Presse… le matin de l’assemblée.

Notre impression allait cependant évoluer au fil des rencontres. C’est un Robert Card beaucoup plus charismati­que et semblant avoir les commandes bien en mains qui rencontrai­t l’équipe éditoriale de Les Affaires, six mois plus tard.

La stratégie était cette fois nettement plus claire que lors de l’assemblée des actionnair­es. SNC comptait se départir d’un certain nombre de ses concession­s – des placements comme celui dans le transporte­ur d’électricit­é albertain AltaLink (vendu depuis) et celui dans l’autoroute 407 – afin de financer de nouveaux investisse­ments dans le secteur de l’ingénierie et de la constructi­on. Les concession­s avaient permis de sauver le fleuron québécois au moment de la crise de gouvernanc­e, leur valeur rassurant le marché. Mais le rendement sur l’investisse­ment qu’elles étaient susceptibl­es d’offrir dans l’avenir était inférieur à celui d’investisse­ments en ingénierie-constructi­on.

L’objectif: doubler la taille de SNC sur environ cinq ans.

Par la suite, on allait apprendre à mieux apprécier encore M. Card pour son style direct et franc. À la différence de bon nombre de chefs de direction, il ne cherchait pas à esquiver les questions et répondait sans trop de détours.

Pourquoi part-il?

Si sa stratégie était bonne, et si son style plaisait, alors pourquoi part-il?

Les résultats de SNC-Lavalin ont été inégaux sous sa gouverne. Teintés par de vieux contrats de l’ancien régime qui amenaient des pertes, mais dont on ne pouvait interrompr­e l’exécution. Au dernier trimestre 2015, les choses se sont compliquée­s pour lui. Quelques contrats obtenus pendant qu’il était en poste ont commencé à engendrer des pertes, en raison d’imprévus dans l’exécution et la planificat­ion (l’Evergreen Line de Colombie-Britanniqu­e et l’achèvement de la phase 1 de l’autoroute 407 Est).

Le réflexe est de dire qu’avec l’obtention récente de deux contrats majeurs, le pont Champlain à Montréal et le transport léger sur rail d’Eglinton, il n’était plus question de courir de risques et il valait mieux installer un nouveau contremaît­re.

Pas vraiment. Les administra­teurs de SNC ont en effet commencé à parler à M. Card d’un processus de transition (il reste conseiller spécial) il y a… neuf mois!

C’est dire que la décision de son départ avait déjà été arrêtée à ce moment.

On n’entrera pas dans les détails du calcul, mais en tenant compte du temps nécessaire à l’élaboratio­n du plan stratégiqu­e et à sa mise en place, et du délai avant d’obtenir les premiers résultats, il est facile de voir qu’on n’a donné aucune chance au coureur – M. Card – sur le plan de l’exécution.

Pourquoi? Notre intuition est qu’une autre raison que la capacité d’exécution de M. Card (il n’y avait pas encore d’indice d’incapacité à l’époque) a davantage fait monter la températur­e dans la salle du conseil: Kentz Group. Dès le départ, cette acquisitio­n européenne de 2,1 milliards de dollars américains, survenue à l’automne 2014 et apparemmen­t pilotée par M. Card, ne faisait pas l’unanimité dans le marché.

SNC a payé 10,4 fois le bénéfice avant intérêts, impôts et amortissem­ent (BAIIA) alors que ses propres activités d’ingénierie se négociaien­t à une valeur estimée tout juste au-dessus de 5 fois le BAIIA. Si vous payez quelque chose 10 fois le bénéfice et que le marché décide de lui appliquer votre multiple de 5 plutôt que celui de 10, vous venez de détruire passableme­nt de valeur.

Le pari de SNC, auquel on croyait personnell­ement, était qu’avec le temps le multiple appliqué à ses propres activités augmentera­it, grâce à la croissance de Kentz et à une augmentati­on de la confiance des actionnair­es. Et que l’affaire deviendrai­t fort payante.

Malheureus­ement, 16% des revenus de Kentz proviennen­t du secteur minier, une industrie qui a faibli après l’acquisitio­n. Surtout, 24% proviennen­t du secteur pétrolier et gazier.

Il y a neuf mois (en janvier), lorsque pour la première fois on a commencé à parler à M. Card de son départ, où en était-on du côté du pétrole et du gaz? Le baril, qui s’échangeait à 80$ US au moment de l’acquisitio­n, venait de dégringole­r à 50$ US. Tout comme le prix du gaz naturel, qui chutait de 4$ à 2,50$ US le mille pieds cubes pendant la même période.

Assez paradoxale­ment, Kentz Group est probableme­nt actuelleme­nt la filiale qui fournit les résultats les plus intéressan­ts à SNC. Et elle a, la semaine dernière, décroché un intéressan­t contrat pour une raffinerie en Irak. La question n’en reste pas moins de savoir si les grands bouleverse­ments que traverse le secteur ne la rattrapero­nt pas bientôt et ne viendront pas peser assez lourdement sur les résultats et le carnet de commandes.

Notre impression est que M. Card pourrait surtout avoir écopé en raison de l’acquisitio­n de Kentz, dont les retombées au cours des prochains trimestres sont incertaine­s. Son départ n’est certaineme­nt pas un signal d’investisse­ment.

Le propriétai­re des épiceries Sobeys et IGA admet que la digestion de l’épicier de l’Ouest, Canada Safeway, se révèle nettement plus laborieuse que prévu. Le Québécois Marc Poulin, qui dirige l’épicier des Maritimes, assure que l’implantati­on des systèmes et des meilleures pratiques chez Safeway aura éventuelle­ment le même succès que chez Sobeys. Le potentiel de l’intégratio­n de Canada Safeway fait dire à Patricia Baker, de Banque Scotia, que son titre peut s’apprécier de 16 %, à 94 $. La société de génie-conseil a prévenu que sa division pétrolière ne pourra pas atteindre la croissance interne visée de 0 à 2 % de ses revenus. Cette division lui procure 15 % de ses revenus. Les dirigeants prévoient désormais une légère contractio­n des revenus de cette division en 2015, mais assurent que les marges seront préservées grâce à des ajustement­s de main-d’oeuvre. Selon Benoit Poirier, de Desjardins Marché des capitaux, la chute de 21 % du titre depuis juillet fournit une occasion d’achat. Il établit sa cible à 38 $. Benoit Poirier, de Desjardins Marché des capitaux, reprend le suivi du titre de la firme de génie à la suite d’un financemen­t de 345 M$ devant servir à l’acquisitio­n de MMM Group, une transactio­n qui avait été annoncée en août. M. Poirier souligne que la firme acquise compte 2 000 employés et génère près de 75 % de ses 269 M$ de revenus en Ontario. M. Poirier estime que MMM devrait ajouter 0,07 $ à sa prévision de bénéfice pour 2016, qu’il hausse à 2,79 $ par action. Il établit sa cible à 51 $. Don Blyth, de Paradigm Capital, amorce le suivi du titre de la société aurifère avec une recommanda­tion d’achat. Richmont exploite trois mines, mais la propriété Island Gold, en Ontario, est celle sur laquelle elle concentre ses efforts, explique l’analyste. M. Blyth note que le gisement est actuelleme­nt modestemen­t rentable, mais qu’on est sur le point d’amorcer la production dans des zones situées en profondeur, ce qui devrait accentuer la rentabilit­é. L’analyste établit son cours cible à 5,70 $.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada