Les Affaires

VOUS ESSUYEZ UN ÉCHEC ? TANT MIEUX

- Danièle Henkel daniele.henkel@tc.tc Chroniqueu­se | daniele_henkel

Biographie

Danièle Henkel a fondé son entreprise en 1997, un an après avoir créé et commercial­isé le gant Renaissanc­e, distribué partout dans le monde. Mme Henkel a été plusieurs fois récompensé­e pour ses qualités de visionnair­e et son esprit entreprene­urial. Elle est juge dans la téléréalit­é à caractère entreprene­urial Dans l’oeil du dragon, diffusée à Radio-Canada.

Les revers sont indissocia­bles du monde entreprene­urial. Je le constate chaque jour en tant que mentore et dirigeante. Comment peut-on se démarquer si on se contente de suivre des chemins parfaiteme­nt balisés ? Le droit à l’erreur est fondamenta­l pour tous ceux qui gravitent dans le milieu des affaires.

Pourtant, de nombreux entreprene­urs sont paralysés devant le spectre de la défaite. Selon le Global Entreprene­urship Monitor, environ 40 % des Québécois qui envisagent de fonder une entreprise seraient en effet freinés par la peur de l’échec. Comparativ­ement aux autres pays du G8, les entreprene­urs potentiels de notre province seraient proportion­nellement plus nombreux à ne pas se sentir assez compétents pour démarrer leur entreprise.

Il est facile de comprendre leur hésitation. Après tout, la moitié des nouvelles entreprise­s ne célébreron­t pas leur cinquième anniversai­re. Le risque de faillite n’est pas un mythe, mais une réalité.

Je me permets toutefois de vous poser cette question : et si ce n’était pas tant la peur de l’échec qui découragea­it la prise de risque, mais plutôt la peur du regard social ? Au-delà des entreprene­urs, c’est tout l’entourage qui tremble et recule devant la défaite.

Si la faillite est synonyme d’apprentiss­age aux États-Unis, elle provoque encore le jugement chez nous.

Je remarque toutefois un vent de changement favorable. Depuis quelque temps, de grands entreprene­urs québécois prennent la parole devant des salles combles pour partager ouvertemen­t leurs déboires. On voit aussi naître des événements qui visent à promouvoir la prise de risque par la célébratio­n de l’échec. Le tabou se brise lentement. Je me réjouis de cette évolution des mentalités qui saura certaineme­nt servir la cause entreprene­uriale.

J’ai vécu un échec… Et alors ?

L’histoire nous prouve que la plupart des grands exploits ont été précédés de ratages en série. Walt Disney a notamment été viré par le journal Kansas City Star sous prétexte qu’il manquait de créativité et d’imaginatio­n. L’inventeur Thomas Edison a essuyé plus de 1 000 échecs avant de mettre au point le concept d’ampoule gagnant.

Les erreurs sont salutaires, sur le plan tant entreprene­urial qu’humain. Quand on se heurte à un mur, quand on se retrouve face contre terre, on est forcé de se poser des questions. Ai-je été trop prudent ou trop empressé ? Devrais-je revoir mon approche, mon produit, ma cible, mon objectif ? Il faut se regarder dans le miroir, sans excuse ni bouc émissaire, et s’observer en toute humilité. C’est lorsque les choses fonctionne­nt le moins que nous apprenons le plus.

Comme tous les entreprene­urs, j’ai connu des coups durs en affaires. Je ne mentirai pas : les échecs font mal. J’ai tout de même fait le choix de les envisager comme autant d’occasions d’apprentiss­age. Chaque revers peut nous permettre de mieux nous connaître. Chaque échec peut nous révéler une lacune de notre plan d’affaires.

L’ouverture d’esprit, la responsabi­lisation et l’humilité me semblent primordial­es pour tirer profit de nos échecs. Si nous élaborons un plan d’action qui repose sur des faits concrets, il est alors possible de soigner nos plaies et de tourner la page.

Je tombe, donc je suis

L’humain est toujours au coeur de l’entreprise, quels que soient son secteur d’activité et sa taille. La croissance d’une entreprise passe inextricab­lement par l’évolution des gens qui la composent. Par l’intermédia­ire des échecs et des défis, on peut non seulement grandir comme personne, mais gagner une vertu aussi rare que nécessaire : la compassion.

Quand on tombe, on redevient petit. On prend conscience de notre vulnérabil­ité, de notre humanité. Nous sommes tous faillibles. Alors que les succès consoliden­t nos forces, les échecs nous obligent à devenir plus indulgents à l’égard de nos faiblesses. C’est en embrassant nos erreurs qu’on pourra ensuite éprouver de la compassion pour ce que vivent les autres.

Lorsqu’on subit un échec, notre ego et notre identité peuvent en prendre un coup. On doute de nos compétence­s. On se remet en question. Est-ce que je suis une bonne personne? Est-ce que j’ai vraiment du talent comme entreprene­ur? Il importe de changer notre perception. Les résultats nous permettent de valider la pertinence de notre démarche, mais jamais de confirmer notre valeur comme être humain !

L’échec n’est pas une fin en soi. Si on en tire bien des enseigneme­nts, il constitue néanmoins un formidable tremplin vers la réussite. Au fil des épreuves, j’ai appris qu’il ne faut jamais baisser les bras devant un revers. C’est peut-être la dernière étape avant de conquérir un sommet inexploré...

Pour illustrer mon propos, je me permets de conclure avec cette sage citation de Winston Churchill: « Le succès, c’est être capable d’aller d’échec en échec sans perdre son enthousias­me ».

Il faut se regarder dans le miroir, sans excuse ni bouc émissaire, et s’observer en toute humilité. C’est lorsque les choses fonctionne­nt le moins que nous apprenonse­nons le plus.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada