David’s Tea doit aussi conquérir les investisseurs
David’s Tea a conquis les passionnés de thé avec son concept stylisé, son expérience client et sa mise en marché dynamique. Il lui faut maintenant gagner la confiance des investisseurs qui ont été échaudés par une entrée sur le marché public un peu trop flamboyante.
Après un bond de 43% à sa première séance, les premiers pas du détaillant en Bourse ont vite fait déchanter les investisseurs qui ne s’attendaient pas à des pertes, à l’impact du taux de change sur ses marges et à la décélération de ses ventes comparables.
Cet automne, de nouveaux soucis concernant l’humeur dépensière des consommateurs pour le trimestre crucial des fêtes, tant au Canada qu’aux États-Unis, ont aussi refroidi l’enthousiasme. David’s Tea réalise en effet de 40 à 45% de ses revenus, et tous ses bénéfices, au quatrième trimestre.
Le danger de déception était énorme, puisqu’en juin les amateurs de détaillants à croissance rapide qui servent la générationY avaient fait grimper son multiple d’évaluation à rien de moins que 100 fois les bénéfices prévus pour 2016.
Le détaillant contrôlé par le fondateur des magasins Le Château, Herschel Segal, faisait aussi rêver avec l’objectif de tripler, à 550, le nombre de ses succursales, de même que son bénéfice d’exploitation, d’ici cinq ans.
Des ventes moyennes de 1 121 $ au pied carré et un rendement de l’investissement de seulement deux à trois ans pour chaque nouvelle boutique avaient aussi de quoi faire saliver bien des habitués du commerce de détail.
« Le climat d’effervescence nous a tenus à l’écart de l’émission. Le détaillant a une stratégie claire, un bilan sans dette et des dirigeants financièrement engagés, mais il doit tout de même faire ses preuves », explique Pierre Lussier, vice-président de Sipar-Eterna.
Maintenant que l’action a perdu plus de la moitié de sa valeur et que les attentes se sont un peu dégonflées, le détaillant a de meil- leures chances de regagner le coeur des investisseurs, croit pour sa part Sharon Zackfia, analyste chez William Blair& Company.
Déjà, son cours se rétablit un peu après avoir touché un plancher de 11,75$ US, le 30 novembre.
« À court terme, le détaillant atténue l’effet du taux de change en modulant son offre de produits, en haussant certains prix et en mettant à profit sa chaîne d’approvisionnement. À plus long terme, sa taille croissante devrait lui permettre de dégager des économies d’échelle et de meilleures marges, parce que ses dépenses générales s’étaleront graduellement sur un plus grand chiffre d’affaires », explique Mme Zackfia en entrevue.
À chaque nouvelle boutique et à chaque trimestre de résultats fiables, la confiance envers la capacité de la société montréalaise de répéter sa réussite canadienne au sud de la frontière s’améliorera petit à petit, estime l’analyste.
Son site Web transactionnel permet depuis juillet au million de membres de son programme de loyauté « grand buveur » d’échanger des points accumulés. David’s Tea commence aussi à analyser leurs habitudes afin de personnaliser ses offres.
Pour donner la mesure du potentiel, Mme Zackfia calcule qu’une marge d’exploitation de 17 à 20% par rapport à des revenus de 600 millions de dollars représente un bénéfice par action de 3$ d’ici 2019. Cela se compare à ses prévisions de 0,37$ par action pour l’exercice qui prendra fin en janvier 2016.
Et c’est sans compter l’offre éventuelle de ses mélanges de thé aux hôtels, restaurants, bureaux et épiciers.
Kelly Bania, de BMO Marchés des capitaux, prévoit elle aussi une progression annuelle de 25% des bénéfices à long terme, mais l’analyste a réduit son cours cible de 21 à 15$ US en septembre, parce que la courbe de croissance des bénéfices sera plus graduelle qu’elle ne l’avait prévu. — D. BEAUCHAMP