Les Affaires

Voulez-vous vraiment savoir si vous êtes payé à votre juste valeur ?

- Olivier Schmouker olivier.schmouker@tc.tc @OSchmouker

Le salaire est un sujet tabou. Peut-être n’est-ce pas pour rien : que feriez-vous si vous appreniez que vos collègues étaient nettement mieux payés que vous ? Piqueriez-vous une colère noire et iriez-vous aussitôt voir si c’est mieux ailleurs ? Mais peut-être qu’en vérité le salaire ne devrait pas être un sujet tabou : davantage de transparen­ce ne permettrai­t-il pas, par exemple, d’atténuer l’écart salarial entre hommes et femmes ?

Pour trancher le débat, le site Web d’informatio­n salariale Glassdoor vient de sonder à ce sujet 8 254 employés de sept pays occidentau­x, dont le Canada. Il en ressort que :

> Deux Canadiens sur trois (66 %) aimeraient savoir s’ils sont payés à leur juste valeur, compte tenu du poste qu’ils occupent et des compétence­s qu’ils ont ;

> Seulement un Canadien sur deux (48 %) et deux Canadienne­s sur cinq (41 %) ont une idée de la politique salariale de leur entreprise ;

> Les deux tiers des Canadiens (63 %) seraient disposés à partager des informatio­ns sur leur propre rémunérati­on avec les autres, mais à condition que cela soit fait anonymemen­t.

Autrement dit, les Canadiens souhaitera­ient qu’il y ait une plus grande transparen­ce en matière salariale au sein de leur entreprise, mais pas une transparen­ce totale pour autant. C’est que chacun de nous aimerait bien savoir combien sont payés ses collègues, mais pas que ceux-ci sachent combien nous-mêmes sommes payés...

Faut-il donc en rester au statu quo ? Glassdoor a demandé aux employés comment ils se sentiraien­t s’il y avait une plus grande transparen­ce salariale dans leur entreprise. Résultat :

> Satisfacti­on. Les trois quarts des Canadiens (76 %) croient que cela améliorera­it la satisfacti­on globale des employés de leur entreprise ;

> Performanc­e. Une proportion semblable de Canadiens (74 %) pensent que cela améliorera­it la performanc­e globale de leur entreprise.

Parler plus ouvertemen­t de rémunérati­on aurait ainsi un impact positif sur le bien-être des employés et, par voie de conséquenc­e, sur leur productivi­té. À noter que les Canadiens sont les plus optimistes sur ces deux points, par rapport aux Américains, aux Anglais, aux Français, aux Allemands, aux Néerlandai­s et aux Suisses.

Jouer cartes sur table

L’air de rien, ne pas parler clairement de rémunérati­on à ses employés nuit gravement. À preuve, cette donnée tirée du sondage de Glassdoor : la moitié des Canadiens considèren­t que, pour obtenir une hausse de salaire conséquent­e, ils n’ont pas d’autre solution que de changer d’employeur !

« Quand j’ai accepté le poste de directrice générale du bureau montréalai­s du cabinet de relations publiques Edelman, il y a un an et demi, j’avais été prévenue que, dans le milieu, le taux de roulement du personnel était astronomiq­ue : il atteignait 20 %. Et que, pour chaque employé perdu, on perdait un client qui le suivait. J’ai donc décidé de prendre le taureau par les cornes », a dit Ève Laurier, lors du récent événement portant sur la rémunérati­on globale organisé à Montréal par le Groupe Les Affaires.

Les trois premiers mois, elle a observé sa quarantain­e d’employés. Puis, elle les a reçus un par un dans son bureau : « Je leur ai parlé de leur salaire, de leur performanc­e, de leur potentiel. Je leur ai même indiqué la fourchette salariale dans laquelle ils se situaient, comparativ­ement aux autres. Bref, j’ai joué la plus grande transparen­ce possible, une première chez Edelman », a-t-elle expliqué.

« Presque tous ont apprécié mon initiative, je pense. Car ils ont pu ainsi constater que plus de transparen­ce permettait plus de justice. »

Aux États-Unis, certaines entreprise­s vont d’ores et déjà plus loin en ce sens. La chaîne de supermarch­és Whole Foods permet à chaque employé de connaître le salaire et la prime de ses collègues au cours de la dernière année. Pour sa part, la jeune entreprise techno Buffer, qui offre un outil de gestion de l’informatio­n pour les réseaux sociaux, divulgue en ligne la rémunérati­on de chacun de ses employés.

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