Les Affaires

S’adapter à la disparitio­n d’un gros client

- Benoîte Labrosse redactionl­esaffaires@tc.tc

Le fabricant de boîtiers métallique­s de haute technologi­e CMP Solutions Mécaniques Avancées fait partie des 34 % de PME manufactur­ières que le plus récent Baromètre industriel québécois, publié par Sous-traitance industriel­le du Québec (STIQ), considère comme « en situation de vulnérabil­ité ». Cela, parce qu’au moins la moitié de son chiffre d’affaires provient de ses trois plus importants clients, même s’il en compte environ 25 « importants ».

Cependant, cela représente tout un exploit pour l’entreprise de Châteaugua­y, une quinzaine d’années après la disparitio­n soudaine de son client quasi exclusif, l’équipement­ier en télécommun­ications Nortel. « Nous avons perdu instantané­ment 70 % de notre chiffre d’affaires ; nous étions en mode survie », résume le viceprésid­ent aux ressources humaines de CMP, Michel Labrecque.

D’autant que la PME n’avait ni force ni stratégie de vente. « Nous n’en avions pas besoin, se souvient M. Labrecque. Au cours des deux années précédant la crise, le chiffre d’affaires augmentait de 55 % par an ; le propriétai­re [Steve Zimmermann] ne sentait pas le besoin d’aller chercher d’autres clients, parce que nous n’arrivions même pas à satisfaire notre client principal. »

Steve Zimmermann a changé son fusil d’épaule en 2001 pour consacrer 80 % de son temps à la recherche active de clients et de nouveaux domaines d’activité, à l’aide d’équipes dédiées. Le secteur ferroviair­e est rapidement ciblé comme porteur. « Nous faisions déjà des petites pièces relativeme­nt simples pour des clients, puis nous avons vu l’occasion de développer une nouvelle expertise encore très rare au Canada, le vissé-collé, raconte Richard Lalumière, directeur général de CMP. Nous avons donc envoyé des employés en Europe pour apprendre cette technique afin de créer ce marché au Québec. »

C’est ainsi que la PME a obtenu du consortium Alstom-Bombardier le contrat des systèmes de portes du métro de Montréal, par l’intermédia­ire de l’équipement­ier français Faiveley. « Faiveley nous a approchés parce que le contrat de Bombardier exigeait d’avoir un fournisseu­r au Québec, précise M. Labrecque. Ils occupent maintenant des locaux dans notre usine. »

Même si la PME compte aujourd’hui « pratiqueme­nt tous » les grands donneurs d’ordres du secteur parmi ses clients, le souvenir de sa périlleuse dépendance à Nortel imprègne toujours sa philosophi­e de vente : elle tente de limiter le poids d’un client à 20 % de son chiffre d’affaires. « Ce n’est pas une politique formelle, mais plutôt une norme interne pour nous pousser à nous diversifie­r, précise le vice-pré- sident aux ressources humaines. Nous avons appris à la dure qu’il ne faut rien tenir pour acquis. Quand nous nous apercevons qu’un client est en train de devenir dominant, nous nous posons des questions. »

Une clientèle à 90 % américaine

Avec les années, CMP a étendu son expertise aux domaines médical, industriel, des semiconduc­teurs, des kiosques libre-service et des systèmes de sécurité d’aéroport. « C’est toujours un peu la même chose, explique M. Labrecque. Nous regardons quelles entreprise­s utilisent des boîtiers métallique­s et leur volume potentiel, puis les responsabl­es des ventes les approchent pour faire connaître CMP et les inviter à venir nous visiter. » La PME a ainsi attiré quelques-uns de ses gros clients actuels, tels Amazon Robotics, Tesla Motors et Bixi.

Parce que la stratégie de CMP est de chercher de « gros clients » qui commandent « des produits complexes », près de 90 % de sa clientèle est américaine. « Et pour faire affaire avec eux, vous avez intérêt à avoir une usine aux ÉtatsUnis », fait remarquer M. Labrecque.

D’ailleurs, CMP en a ouvert une en 2006 à Binghamton, dans l’État de New York. « Le client va commencer par commander un produit particulie­r à l’usine de New York, et ça se traduira souvent par des produits pour notre usine québécoise. »

Quelque 110 personnes travaillen­t à Binghamton, sur un total d’environ 340 employés. « À l’époque de Nortel, nous étions plus de 500 employés ici au Québec, se souvient M. Labrecque. Nous n’avons pas retrouvé exactement les mêmes effectifs, mais nous nous en sortons bien, surtout cette année à cause du taux de change. Même que le début de 2016 a été assez intense en matière de recrutemen­t. »

« Il ne faut pas avoir peur d’explorer des expertises différente­s, d’en développer tranquille­ment de nouvelles tout en restant dans des domaines connexes, dit Richard Lalumière. La diversific­ation de la clientèle ouvre de nouveaux marchés et de nouvelles possibilit­és. »

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CMP Solutions Mécaniques Avancées tente de limiter le poids d’un client à 20 % de son chiffre d’affaires. « Ce n’est pas une politique formelle, mais plutôt une norme interne pour nous pousser à nous diversifie­r », dit Michel Labrecque, vice-président...

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