Les Affaires

Comment Lowe’s Canada compte crinquer sa rentabilit­é

Son président, Sylvain Prud’homme, détaille sa stratégie de croissance, six mois après le rachat de Rona.

- François Normand francois.normand@tc.tc francoisno­rmand

POUR DOUBLER SUN BENEFICE NET EN 5 ANS

Même s’il est d’une nature plutôt calme, Sylvain Prud’homme se retrouve dans une position stressante, car il a une grosse commande. Le patron de Lowe’s Canada doit doubler le bénéfice net de l’entreprise d’ici 2021, comme l’exige la direction américaine.

Dans un entretien avec Les Affaires à son bureau du siège social de Bouchervil­le (l’ancien quartier général de Rona), Sylvain Prud’homme admet que cet objectif financier forcera Lowe’s à augmenter sensibleme­nt ses ventes au Canada. L’entreprise devrat-elle les doubler? Il prend quelques secondes avant de répondre à notre question. « L’impact sera majeur sur nos ventes », se limitet-il à dire, prudent.

En poste depuis trois ans, Sylvain Prud’homme est un gestionnai­re expériment­é; il est notamment un ex-dirigeant de Loblaw, Walmart et Sobey’s. Selon des sources de l’industrie, il est reconnu pour avoir convaincu la direction américaine de Lowe’s de lui laisser une marge de manoeuvre pour développer le marché canadien, et ce, avec des équipes canadienne­s. « Il leur a fait comprendre que le Canada n’est pas une extension du marché américain », dit une source qui préfère garder l’anonymat. L’échec de Target au Canada a frappé les esprits, souligne notre interlocut­eur.

M. Prud’homme est discret sur l’augmentati­on des ventes requises pour doubler le bénéfice net, mais il est par contre relativeme­nt transparen­t quant à la stratégie qu’il déploiera pour y arriver.

Le président de Lowe’s Canada prévoit essentiell­ement trois choses, nous explique-t-il dans l’une des rares entrevues de fond qu’il ait accordées depuis l’acquisitio­n de Rona en février: il développer­a une expertise par catégorie de marché, il mettra plus que jamais l’accent sur le client, et il se servira du commerce électroniq­ue pour attirer davantage de consommate­urs dans ses magasins.

De plus, les occasions d’affaires potentiell­es pour accroître les ventes de Lowe’s au Canada sont substantie­lles, selon un document interne fourni aux analystes lors de l’achat de Rona. Elles atteindrai­ent plus d’un milliard de dollars canadiens. Cela représente près de 20% du chiffre d’affaires de Lowe’s Canada.

Dans ses états financiers, Lowe’s ne ventile pas ses revenus au Canada. Mais, selon les estimation­s d’analystes de Morningsta­r et d’Edward Jones que nous avons joints aux États-Unis, les ventes de Lowe’s au Canada s’élèveraien­t à environ 5 milliards de dollars canadiens (en incluant celles de Rona). Les analystes évaluent en effet que les ventes au Canada représente­nt grosso modo 7% de celles de l’ensemble de la multinatio­nale qui, en 2015, ont totalisé 59,1 milliards de dollars américains (75,5 G$ CA).

Pour accroître les ventes de Lowe’s Canada, Sylvain Prud’homme précise que « le plan original, c’est de procéder par croissance interne, mais on n’exclut pas des acquisitio­ns ».

Trois tactiques viendront appuyer cette stratégie.

Quatre nouvelles divisions au Canada

Sylvain Prud’homme nous a dévoilé en exclusivit­é la nouvelle structure organisati­onnelle de Lowe’s Canada. Elle comptera quatre divisions: Grandes surfaces, Magasins de proximité, Pros et entreprene­urs, et Marchands affiliés.

« Il y aura une consolidat­ion du leadership, mais il y aura davantage de décentrali­sation que chez Rona », souligne Sylvain Prud’homme.

Cette structure devrait être opérationn­elle dans les prochaines semaines. Elle diffère grandement de la structure aux États-Unis, où la multinatio­nale est composée de cinq divisions régionales: Northeast, Southeast, North Central, South Central, West.

Fait particulie­r, chacune des divisions au Canada sera dotée d’états financiers distincts. « Ils nous permettron­t de mieux gérer les opérations », dit Sylvain Prud’homme, tout en insistant sur le fait qu’il y aura des états financiers consolidés pour l’ensemble du marché canadien.

Yan Cimon, spécialist­e en stratégie d’entreprise­s à l’Université Laval, salue cette décision de créer des états financiers distincts. « Cela rend les gestionnai­res responsabl­es des profits et des pertes, en plus d’augmenter le prestige de leur fonction », dit-il.

Selon M. Prud’homme, cette structure par division (ou expertise) apportera une plus grande efficience et une plus grande cohérence à l’échelle de l’entreprise. « Il faut s’assurer d’avoir un modèle qui nous permettra de vraiment exploiter le réseau à son maximum. »

Dans l’ancienne structure organisati­onnelle de Rona, un haut dirigeant était à la fois responsabl­e des magasins de 3 000 pieds carrés et de ceux de 110 000 pi2. Une façon de faire qui n’a pas de En février, Lowe’s a créé toute une onde de choc au Québec en annonçant qu’elle achetait Rona au coût de 3,2 milliards de dollars canadiens. Six mois plus tard, la multinatio­nale américaine de la rénovation résidentie­lle s’apprête à déployer sa nouvelle stratégie de croissance au pays. Dans un entretien exclusif à Les Affaires, le patron de Lowe’s Canada, Sylvain Prud’homme, nous dévoile son plan de match.

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Sylvain Prud’homme, pdg de Lowe’s
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Sylvain Prud’homme, président et chef de la direction de Lowe’s Canada

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