Le conseiller n’est pas déclassé par Internet
À l’approche de la première date butoir fixée par la Loi sur les régimes volontaires d’épargneretraite (RVER), plusieurs entreprises n’ont toujours pas mis en place de régime. Et celles qui l’ont fait renoncent pour la plupart à contribuer à la cagnotte de retraite de leurs employés. Quant aux travailleurs, un grand nombre a décidé de ne pas participer au régime.
Les PME de 20 employés et plus doivent implanter un régime avant le 31 décembre prochain, tandis que celles de 10 à 19 employés ont jusqu’à la fin de 2017. L’échéance pour les entreprises de 5 à 9 employés reste à déterminer.
Or, au 30 juin dernier, un total de 2226 entreprises avaient souscrit à un RVER. L’actif total atteignait 9,3 millions de dollars, selon les données de Retraite Québec. « On s’attendait à une progression plus rapide, reconnaît David Charbonneau, premier vice-président, épargneretraite collective, de Desjardins, l’un des neuf fournisseurs de RVER. De 10000 à 15 000 entreprises de 20 employés et plus devront s’y conformer d’ici la fin de l’année. L’automne sera très occupé! »
Même son de cloche de la part de ses concurrents. « On observe une recrudescence de la demande depuis juin, mais il n’y a pas encore de mouvement de masse, indique Philippe Toupin, vice-président, solutions aux petites entreprises, de Manuvie. La préoccupation des petites entreprises, c’est de gérer leurs activités. Certaines ignorent peut-être encore qu’elles doivent offrir un régime de retraite. »
Le verre à moitié plein
Retraite Québec lancera à la fin du mois une campagne d’information à la radio et sur le Web à l’intention des employeurs. Mais pour le moment, l’organisme préfère voir le verre à moitié plein. « Avec les nouveaux RVER mis en place, on compte environ 16000 travailleurs de L’avènement du régime volontaire d’épargne-retraite (RVER) a donné lieu à une première: la possibilité de souscrire à un régime de retraite collectif en ligne. Mais les conseillers peuvent continuer de dormir sur leurs deux oreilles, car ils ont toujours la faveur des entreprises, selon les fournisseurs de RVER et d’autres régimes de retraite.
Seul le RVER, ce nouveau régime d’épargne-retraite collectif créé dans la foulée de la Loi sur les RVER, peut être vendu en ligne sans intermédiaire si aucun conseil n’est donné. Les autres régimes, comme le régime de retraite simplifié ou le régime de participation différée aux bénéfices, sont nécessairement vendus par l’entremise d’un conseiller ayant le titre requis.
« Très peu d’entreprises adhèrent à notre RVER en ligne, dit Philippe Toupin, vice-président, solutions aux petites entreprises, de Manuvie. Elles préfèrent être accompagnées dans cette démarche. »
L’assureur distribue son produit principalement par l’intermédiaire de conseillers indépendants.
Chez Desjardins, beaucoup d’entreprises remplissent une demande d’adhésion en ligne, d’après David Charbonneau, premier vice-président, épargne-retraite collective. « Nous communiquons ensuite avec elles pour mieux comprendre leurs besoins, et si elles ont de l’intérêt pour une autre de nos solutions d’épargne-retraite, un conseiller les prend en charge. »
De son côté, la Financière Sun Life dirige vers un conseiller tous les clients qui communiquent avec elle par son site Web. « Nous croyons au bien-fondé du conseil, car nous voulons aiguiller les PME vers le régime collectif qui correspond à leurs besoins, souligne Jean-François Pelletier, vice-président régional, régimes collectifs de retraite. C’est pourquoi nous ne faisons aucune vente en ligne. » L’assureur dispose d’un réseau de 800 conseillers consacrés à ses produits en plus de travailler avec des courtiers indépendants.
Des règles particulières
Les régimes d’épargne-retraite collectifs sont habituellement distribués par les conseillers en assurance et rentes collectives ou en régimes de rentes collectives. Avec le RVER cependant, l’Autorité des marchés financiers a prévu une exception temporaire.
Ainsi, jusqu’au 31 décembre 2017, les conseillers en sécurité financière et les conseillers en régimes d’assurance collective pourront offrir aux employeurs le RVER d’un assureur vie, ce qu’ils ne peuvent pas faire normalement. Cette mesure a été adoptée pour satisfaire la forte demande qui surviendra probablement à l’approche des deux premières dates butoirs.
Le hic, c’est que les conseillers visés par l’exception n’ont pas d’expérience en régimes d’épargne-retraite collectifs. De plus, ils sont autorisés à distribuer uniquement le RVER. Leurs entreprises clientes se verront donc proposer un RVER alors qu’un autre type de régime pourrait peut-être mieux convenir à leur réalité, en particulier si elles cotisent pour leurs employés.
« Les entreprises sont mieux servies avec un conseiller qui a un permis en rentes collectives et qui peut offrir tous les types de régimes », juge Philippe Toupin, de Manuvie.
Cependant, il est bon de savoir que plusieurs conseillers en rentes collectives sont critiques à l’égard du RVER et donc peu enclins à le suggérer. « C’est un produit déjà formaté auquel on ne peut rien changer, signale Gaétan Veillette, du Groupe Investors. D’autres régimes sont plus flexibles, car certains de leurs paramètres peuvent être adaptés à l’entreprise. »
Ajoutons que nombre de conseillers reprochent au RVER de mettre de côté le conseil, parce que la commission qu’ils en tirent est moins élevée qu’avec les autres produits d’épargne-retraite. Certains jugent que le RVER n’est pas rentable pour eux et renoncent à le vendre. D’autres, toutefois, considèrent qu’il s’agit d’une occasion de développement des affaires. – NATHALIE VALLERAND
2Est-il lourd à gérer pour l’employeur ? Il comporte plus de tâches administratives que d’autres types de régime. Les plus exigeantes sont sans contredit l’inscription automatique des employés admissibles, le retrait de ceux qui renoncent à participer ainsi que l’obligation de relancer ces derniers tous les deux ans. Pour les entreprises qui ont un taux élevé de roulement de personnel, cela peut représenter un surplus important de travail.
Afin de simplifier le processus, les administrateurs de RVER proposent des lettres types. Plusieurs ont aussi conclu des ententes avec des fournisseurs de gestion de la paie, ce qui facilite l’inscription des employés et la remise de leurs cotisations. C’est le cas notamment de Morneau Shepell avec Ceridian, Desjardins et Nethris, de même que de iA avec CGI et ADP.
Faux. Cette exigence s’applique seulement aux PME de cinq employés visés (travailleurs adultes avec au moins un an de service) et plus. Cela comprend les entreprises étrangères ou d’ailleurs au Canada qui sont installées au Québec et emploient des résidents de la province. Toutefois, les entreprises de compétence fédérale, comme les banques ou les entreprises de télécommunications, ne sont pas assujetties à la loi.
Les entreprises qui ont déjà un régime de retraite ne sont pas automatiquement exemptées.
Vrai. Si le régime est accessible à tous les employés visés, l’entreprise est conforme. Par contre, si des catégories d’employés sont ex-