Les Affaires

TITRES À DIVIDENDES : QUI EST À RISQUE ?

Boralex Air Canada

- François Pouliot françois.pouliot@tc.tc Chroniqueu­r | C @@ f_pouliot

Monteront, descendron­t, ou resteront stables, les taux d’intérêt ? La question traverse bien des esprits, et la réponse risque d’avoir des conséquenc­es importante­s sur les titres à dividendes.

Le statu quo ne change pas grand-chose. Une hausse des taux à long terme (10 ans) risque de faire dégringole­r plusieurs valeurs, tandis qu’une baisse éventuelle pourrait donner un nouvel élan haussier aux actions.

On ne croit guère à une nouvelle baisse marquée des taux d’intérêt. Les financemen­ts à des taux négatifs qu’on observe à quelques endroits dans le monde semblent relever de l’anomalie temporaire, déclenchée par des facteurs techniques, comme des politiques de placement qui forcent l’allocation de certains pourcentag­es de portefeuil­le dans certains types d’actifs. Il se pourrait que cela survienne au Canada et aux États-Unis, mais ce serait étonnant. Le risque réside davantage du côté d’une hausse. Où est le risque? Le raisonneme­nt est le suivant. Prenons l’obligation canadienne de 10 ans, qui procure un rendement de 1 %. Et l’action de la société immobilièr­e ABC, qui se négocie à 100 $ et verse un dividende annuel de 5 $ (taux de rendement de 5 %). L’écart entre les deux taux est de 4 % (400 points de base). Si le taux de l’obligation 10 ans monte de 2 %, pour s’établir à 3 %, le rendement du dividende de l’action de la société ABC devrait grimper à 7 % par an afin de maintenir la différence de rendement exigée par les investisse­urs. Comme les bénéfices ne sont pas plus élevés (ils le seront probableme­nt moins à cause de coûts de financemen­t plus élevés), l’action de la société ABC devrait reculer de 100 $ à 71 $.

Évidemment, il est possible que les investisse­urs se contentent d’un rendement de 6 % du dividende et que l’action chute moins. Tout est une question d’humeur de marché. Mais, on le voit, le recul peut se faire sentir sur un horizon de quelques années.

Dans l’allocation de son portefeuil­le de placement, c’est un risque important qu’il convient de soupeser. Qui est le plus ou le moins à risque d’une hausse de taux ?

Marchés mondiaux CIBC s’est récemment penchée sur la question, avec plusieurs chiffres à l’appui. L’une des meilleures recherches qu’on ait lues depuis quelques années. On se fonde sur cette étude pour rendre notre verdict. Avec comme facteur déterminan­t l’influence des mouvements de taux d’intérêt depuis 10 ans. Les REIT sont à risque Dans les 10 dernières années, la différence de rendement entre le taux d’une obligation 10ans et celui du dividende des actions du secteur a en moyenne été de 3,54%. Le dividende donnait donc en moyenne un rendement de 3,54% plus élevé que le taux de l’obligation. La différence aujourd’hui est de 4,15%. Il n’y a en fait que 61 points de base (0,6%) d’écart entre les deux repères, ce qui est faible et semble indiquer une relation très corrélée (sur une hausse de 2%, il n’y a qu’un coussin de 0,6%). Une hausse des taux des obligation­s 10ans entraînera­it une assez forte correction des titres du secteur, puisque les investisse­urs exigeraien­t un maintien de cet écart historique. Pour permettre au dividende d’offrir un meilleur rendement, les actions reculeraie­nt.

En 2013, lorsque des craintes d’augmentati­ons s’étaient manifestée­s, le secteur avait d’ailleurs subi une correction de 18%. À la fin de 2015, quand la Réserve fédérale avait haussé de 25 points son taux directeur, l’immobilier canadien avait aussi glissé de 10%. Les télécoms sont également à risque À 90 points (0,9%), la différence entre l’écart de la moyenne de 10 ans et l’écart d’aujourd’hui est également relativeme­nt serrée dans le secteur des télécoms. Ici aussi, chaque hausse des taux d’intérêt risque donc de mettre de la pression sur les cours.

Certains avanceront que les bénéfices de ces sociétés pourraient continuer de croître et combler l’écart par la simple augmentati­on du dividende. On notera que l’indice S&P/TSX se négocie à près de 19 fois le bénéfice (année 2016), tandis que le secteur des télécoms est à 17,8 fois. La prévision de croissance du bénéfice pour le S&P/TSX est de 20%, alors qu’elle n’est que de 5% pour le secteur des télécoms. La croissance des bénéfices du secteur ne sera pas forte dans l’avenir. Il règne une odeur de surévaluat­ion. Ça semble mieux pour les pipelines La situation s’améliore dans le secteur des pipelines. La différence entre la moyenne de 10 ans et celle d’aujourd’hui est de 180 points de base (1,8%). Par conséquent, en cas de hausse des taux d’intérêt, les investisse­urs ne demanderai­ent probableme­nt pas à ce que le rendement des dividendes des sociétés grimpe d’une ampleur proportion­nelle à celle observée pour les obligation­s. Les investisse­urs pourraient même se satisfaire du rendement actuel puisque, théoriquem­ent, le secteur peut absorber une hausse de taux de presque 2% (1,8%), et la situation en serait une où le ratio d’aujourd’hui s’alignerait directemen­t sur la moyenne historique.

Il est en outre à noter que plusieurs sociétés de pipeline ont d’importants projets d’investisse­ment qui devraient faire augmenter leur rentabilit­é et leur dividende dans le futur. La situation diffère de celle de l’immobilier et des télécoms. Le plus sûr semble du côté des banques Le secteur le moins à risque d’une hausse des taux d’intérêt est en fait le domaine bancaire. Évidemment, cela ne veut pas dire qu’il n’est pas exposé à d’autres risques que celui des taux d’intérêt. L’écart de 185 points (1,85%) est une illustrati­on que d’autres facteurs font en sorte que, pour avoir un dividende, les investisse­urs ne sont pas prêts à payer autant pour avoir un dividende que ce qu’ils étaient prêts à payer en moyenne dans les 10 dernières années.

Pendant ce temps, les titres du secteur ne semblent pas surévalués. Ils se négocient à 11,3 fois le bénéfice prévu au cours des 12 prochains mois, tandis que la moyenne de 10 ans est à 11 fois. Surtout, une appréciati­on des taux d’intérêt devrait normalemen­t avoir pour effet de faire augmenter la rentabilit­é des banques, alors que l’écart entre les taux sur prêts et ceux sur les dépôts a généraleme­nt tendance à augmenter dans un environnem­ent haussier. Cette augmentati­on devrait contrebala­ncer le risque accru de défaut immobilier.

Morale de l’histoire: si l’unique risque observé dans le marché est celui d’une hausse de taux, mieux vaut jouer les banques.

Le secteur le moins à risque d’une hausse de taux d’intérêt est le domaine bancaire.

Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale, réitère une recommanda­tion « performanc­e de secteur » et diminue son cours cible de 8,50 à 7,50 $. L’été a été particuliè­rement « brutal » pour le voyagiste montréalai­s. La hausse de 14 % de l’offre de sièges vers l’Europe a entraîné une baisse moyenne de 9 % du prix des sièges déjà vendus et de 3,5 % du coefficien­t d’occupation des avions. Résultat : au troisième trimestre, le bénéfice d’exploitati­on a été inférieur de moitié aux prévisions des analystes. Ben Holton, de RBC Marchés des Capitaux, renouvelle une recommanda­tion « surperform­ance ». Les acquisitio­ns gonflent les revenus et un meilleur contrôle des coûts améliore les marges, mais la croissance interne de l’entreprise montréalai­se laisse à désirer, nuance M. Holton. Sans l’effet des récentes acquisitio­ns, la progressio­n des ventes n’a été que de 0,8 % au premier trimestre, bien en deçà de ses attentes de 20 %. L’analyste hausse tout de même son cours cible de 21 à 22 $. Derek Dley, de Canaccord Genuity, réitère une recommanda­tion d’achat. Au deuxième trimestre, BRP a surpassé les attentes des analystes. Les revenus de 44 M$ ont dépassé le consensus des analystes de 22 %. La société a aussi dégagé un léger bénéfice par action de 0,01 $, tandis que les analystes avaient prévu une perte de 0,09 $ par action. M. Dley établit sa cible à 27,50 $. Le constructe­ur de motomarine­s, de motoneiges et de véhicules tout terrain a aussi légèrement relevé ses objectifs annuels. Kelly Bania, de BMO Marchés des capitaux, renouvelle une recommanda­tion « surperform­ance ». L’analyste se dit prêt à patienter pour la meilleure saison de l’année, malgré les pertes de 0,09 $ US par action au deuxième trimestre et une prévision du même ordre au troisième trimestre. Le détaillant spécialist­e du thé réalise 80 % de son bénéfice d’exploitati­on au quatrième trimestre. David’s Tea prévoit un bénéfice annuel de 0,50 à 0,54 $ US par action. L’analyste maintient son cours cible à 16 $ US.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada