Les Affaires

Un rendez-vous décisif avec le banquier

- Anne Gaignaire redactionl­esaffaires@tc.tc Prochaine parution dans cette série: le 15 octobre

Comment la jeune entreprise Marché Goodfood a réussi à obtenir le financemen­t nécessaire à sa croissance.

Série 7 de 9

Le chemin de la croissance est ponctué d’étapes incontourn­ables. Cette série présente des cas d’entreprise­s qui les ont traversées avec succès. Cette semaine : l’obtention d’un premier prêt.

Marché Goodfood, spécialisé­e dans les paniers d’ingrédient­s frais prêts à cuisiner, n’a qu’un an et demi d’existence, mais elle compte déjà trois demandes de prêt à son actif tant la croissance est soutenue. Les jeunes fondateurs ont appris en accéléré à nouer une relation de confiance avec leur banquier. Ils avaient quand même un atout: ils ont tous les deux étudié en finance.

Jonathan Ferrari et son associé, Neil Cuggy, avaient 27 ans et leur entreprise existait depuis six mois quand ils ont présenté leur première demande de prêt. Ils avaient créé, en 2015, Marché Goodfood.

Faisant rapidement face à une forte croissance, les fondateurs ont eu besoin de financemen­t pour embaucher du personnel et acheter du matériel, dont un frigo industriel. « Les murs de notre bureau de 2 500 pieds carrés près du marché Atwater étaient tapissés d’une vingtaine de frigos classiques. Ça n’avait pas d’allure! » dit Jonathan Ferrari, pdg de Marché Goodfood.

L’entreprise a multiplié par 12 son chiffre d’affaires en un an et demi et est passée de 5 à presque 60 employés au cours de cette période. Elle a obtenu un prêt de la Banque de développem­ent du Canada (BDC) et du programme Futurprene­ur, pour une somme totale de 45 millions de dollars, remboursab­le en cinq ans (la première année, seuls les intérêts pouvaient être versés), à un taux d’intérêt de 10%.

La rencontre d’un banquier pour une première demande de prêt représente un gros enjeu. Afin de compenser leur inexpérien­ce, ils s’étaient bien préparés à leur première rencontre avec leur directeur de compte de la BDC, qui s’est déroulée dans leurs locaux. « On avait prévu une courte présentati­on de l’entreprise, et on lui a fait visiter nos installati­ons. Ses questions étaient très pointues sur le service, les coûts de livraison, d’emballage, etc. La discussion a aussi beaucoup tourné autour du marché de l’alimentati­on et de son potentiel, de notre modèle d’entreprise, des marges et de nos revenus prévisible­s », se souvient Jonathan Ferrari.

Investir son argent personnel

C’est là que les connaissan­ces en finance des deux fondateurs a été un atout. « La banque a aimé qu’on soit axés sur les chiffres. Comme on a tous les deux travaillé dans une institutio­n financière, on connaissai­t les attentes des banques et les réponses dont elles ont besoin pour analyser le risque », dit Jonathan Ferrari.

Le fait d’avoir conçu leur plan d’affaires avec l’aide de la BDC avant même la demande de prêt a aussi joué en leur faveur.

« Il y avait déjà une relation de confiance », souligne Jean-Philippe Pépin, directeur régional du groupe technologi­e à la BDC. « C’est important de choisir un directeur de compte intéressé par le projet et qui connaît le marché. C’est lui qui se battra pour que le dossier de prêt soit accepté par l’institutio­n. Il faut qu’il y croie », conseille M. Ferrari.

Autre argument non négligeabl­e présenté par les deux fondateurs: en plus d’avoir investi leur argent personnel à hauteur de 50000$, ils avaient déjà convaincu des investisse­urs privés de s’engager dans l’entreprise. « L’investisse­ment personnel des entreprene­urs est important, car on veut qu’ils prennent sur eux une partie du risque. Autrement, ce serait facile de lancer des projets et de les abandonner au premier obstacle », affirme Jean-Philippe Pépin.

Quant à la diversité des partenaire­s, c’est « rassurant pour nous », poursuit le directeur. Non seulement ça prouve que le projet semble viable aux yeux d’autres investisse­urs, mais « quand ça va mal, tout le monde partage le problème et peut trouver des solutions communes . »

Les fondateurs de Goodfood avaient également mis toutes les chances de leur côté en réalisant des ventes avant même d’aller solliciter leur banque. « C’est un atout de pouvoir démontrer que la production a commencé avec succès », souligne Édouard Bonaldo, directeur général du Centre d’aide aux entreprise­s Haute-Montérégie. Un argument décisif auprès des institutio­ns financière­s, puisque cela montre qu’il y a une demande et que le produit attire une clientèle.

Soutien de mentors

Conscients que leur jeune âge pourrait compliquer leur aventure entreprene­uriale, les deux fondateurs avaient pris soin, avant de rencontrer leur banque, de nouer des relations avec des mentors dans les domaines de la logistique, de l’achat de nourriture, du marketing et de la finance, explique Jonathan Ferrari.

En s’appuyant sur des connaissan­ces dans leur réseau, ils ont réuni autour d’eux des experts qui ont accepté de les rencontrer régulièrem­ent pour leur donner des conseils sur les problèmes qu’ils allaient affronter. Un point qui a sans conteste rassuré la banque. « Il faut toujours avoir une personne en point d’appui quand tout va mal », recommande Édouard Bonaldo.

L’entreprise, qui livre ses paniers dans tout le Québec et en Ontario, a dû ensuite présenter deux autres demandes de prêt pour financer sa croissance. Le fait d’avoir noué une relation de confiance avec leur directeur de compte a facilité les autres demandes.

Par ailleurs, « on essaie toujours de prévoir nos besoins pour ne pas se retrouver en difficulté », explique M. Ferrari. Une stratégie validée par Jean-Philippe Pépin: « Risquer de manquer de fonds créerait des situations qui mettraient à mal la crédibilit­é de l’entreprise, comme celle ne pas pouvoir payer ses employés ».

Grâce au financemen­t reçu, Marché Goodfood a pu déménager dans des locaux plus grands (16 000 pi2) dans l’arrondisse­ment Saint-Laurent en mars dernier, ce qui a permis de « mettre en place une chaîne de montage plus efficace », précise le cofondateu­r de l’entreprise.

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« La banque a aimé qu’on soit axés sur les chiffres », souligne Jonathan Ferrari, cofondateu­r de Marché Goodfood.

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