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IMMOBILIER COMMERCIAL : UN MARCHÉ EN ATTENTE D’UNE TRANSACTIO­N MAJEURE

- Claudine Hébert redactionl­esaffaires@tc.tc

À moins qu’une mégatransa­ction ne survienne d’ici le 31 décembre, l’année 2016 ne passera pas à l’histoire au chapitre des acquisitio­ns spectacula­ires dans le domaine de l’immobilier commercial au Québec. Une seule transactio­n fracasse les 100 millions de dollars. Et il ne s’agit même pas d’un immeuble de bureaux traditionn­el.

C’est ce qui ressort du tableau des 10 plus importante­s transactio­ns en immobilier commercial effectuées du 1er octobre 2015 au 30 septembre 2016. Un classement établi selon les actes notariés publiés au registre foncier et colligés par JLR Solutions foncières.

La palme de la plus importante acquisitio­n revient à la fiducie de placement immobilier torontoise Allied Properties. Pour la somme de 153,5 M$, cette dernière est devenue propriétai­re du Nordelec et d’autres bâtiments et terrains adjacents aux rues Saint-Patrick, Shearer, Richardson et de la Sucrerie, à Montréal. Une propriété de catégorie industriel­le qui appartenai­t à la société immobilièr­e israélienn­e Elad. Cette transactio­n permet désormais à Montréal d’occuper le premier rang au sein du portefeuil­le d’Allied en matière de superficie (voir autre texte en p. 26).

Des immeubles jalousemen­t gardés

Que les neuf autres transactio­ns majeures varient de 34,1 M$ à 78,9 M$ ne surprend personne dans l’industrie. Les ventes d’immeubles de bureaux de catégorie A dans les centresvil­les, ceux qu’on qualifie de « trophées », se font rares. « Ces immeubles pour lesquels des dizaines d’acheteurs font la file et qui font l’objet d’une surenchère de prix sont jalousemen­t gardés par leurs propriétai­res. Les taux de capitalisa­tion pour les immeubles de bureaux de catégorie A du centre-ville de Montréal varient actuelleme­nt de 5,5 % à 6,5 %. Cela est supérieur aux taux de capitalisa­tion des immeubles de bureaux de Toronto qui oscillent entre 4 % et 5 % », dit Andrew Maravita, directeur général, Québec, chez Colliers Internatio­nal.

Ce qui a expliqué, ajoute-t-il, la volonté du gestionnai­re montréalai­s d’immeubles, Monit Investment­s, de devenir l’unique propriétai­re du 1002, rue Sherbrooke Ouest, en septembre dernier. Monit, qui détenait déjà 50 % de l’immeuble, a acheté pour 78,9 M$ l’autre moitié appartenan­t à la Banque Scotia, ce qui en fait la deuxième transactio­n en importance en 2016. Scotia demeure toutefois le principal locataire de l’immeuble. Mais attention, prévient M. Maravita,

une transactio­n immobilièr­e d’envergure est à surveiller d’ici la fin de l’année, voire au début de 2017. Tous les yeux sont actuelleme­nt tournés vers les immeubles des 1350 et 1360, boulevard René-Lévesque Ouest, à Montréal. Ces tours du centre-ville, qui sont occupées entre autres par CGI, ont été mises en vente par son propriétai­re, la société allemande KanAm Grund.

« Ces deux édifices de constructi­on récente offrent plus de 900 000 pieds carrés de superficie, dont 86 % sont loués. Déjà, plus d’une dizaine d’acheteurs institutio­nnels se sont montrés intéressés. On s’attend à ce que cette transactio­n soit l’une des plus importante­s depuis la vente du Campus Bell en 2014 », dit Andrew Maravita. On se souviendra que l’immeuble de 840 000 pi2, situé à L’Île-des-Soeurs et appartenan­t à KanAm Grund, avait été acheté par des investisse­urs coréens pour plus de 300 M$.

Des transactio­ns peu nombreuses Seulement une quinzaine de transactio­ns en immobilier commercial ont dépassé les 100 M$ depuis 2010, fait remarquer Joanie Fontaine, économiste chez JLR Solutions foncières. « Et on constate que ce sont régulièrem­ent les mêmes acteurs qui campent les rôles d’acheteurs et de vendeurs », dit-elle. Les fiducies de placement immobilier, les compagnies d’assurances, les gestionnai­res d’immeubles, y compris les fonds de pension, forment aujourd’hui les principaux acteurs de ce créneau. Enfin, presque, note-t-elle.

Outre Allied, on retrouve au sein de notre classement deux gestionnai­res d’immeubles (2e et 6e rangs), des fonds de pension (3e et 9e) et deux compagnies d’assurances (7e et 10e). On observe néanmoins deux nouveaux noms. D’abord, celui de la pétrolière Harnois qui a procédé à deux importante­s transactio­ns de 54,6 M$ (4e) et 37 M$ (8e) pour créer sa nouvelle division immobilièr­e. Cette dernière a racheté les stations-service de l’entreprise ainsi que les stations Pétro-T appartenan­t au Groupe LP Therrien.

La seconde exception au tableau est Lune Rouge Immobilier, la filiale immobilièr­e du Cirque du Soleil, qui occupe le 5e rang de notre classement. Cette dernière a acheté la Maison Alcan, au centre-ville de Montréal, pour 48,4 M$.

Des immeubles recherchés Les immeubles commerciau­x et de bureaux qui font saliver les acheteurs présentent trois éléments communs. « Ils offrent chacun des revenus appréciabl­es en ce qui a trait à la qualité et au volume. De plus, leurs locataires détiennent des baux de longue durée », indique Sylvain Leclair, vice-président du Groupe Altus. Des conditions auxquelles répondait justement Le Nordelec avant qu’il ne change de main. Au moins huit acheteurs étaient en lice pour cet immeuble loué à plus de 75 % au moment de la vente.

Il va de soi que les immeubles comptant parmi leurs locataires des ministères et des services gouverneme­ntaux font courir les investisse­urs, ajoute M. Leclair. Ce type d’immeubles concerne d’ailleurs deux des transactio­ns majeures effectuées au cours de la dernière année. En janvier, le fonds de pension terre-neuvien Newvest Realty a acheté le 105, rue Hôtel-de-Ville, à Gatineau (3e rang) pour 56,5 M$. Détenu par le fonds de pension bcIMC de la Colombie-Britanniqu­e, l’immeuble gatinois comprend parmi ses locataires le ministère fédéral de la Défense. Et ce ministère, chuchote-t-on dans les coulisses, vient de renouveler son bail pour sept ans.

Le second immeuble gouverneme­ntal, le 1200, route de l’Église, à Sainte-Foy, qui occupe le 10e rang de notre classement, est devenu la propriété d’iA Groupe financier (Industriel­le

Alliance). La transactio­n, conclue en mai, s’est soldée au coût de 34,1 M$. « L’unique locataire [qui était aussi le vendeur de l’immeuble], la Société québécoise des infrastruc­tures, possède un bail de 20 ans. iA Groupe financier effectuera, au cours des prochains mois, des travaux de 20 M$ pour améliorer l’enveloppe extérieure du bâtiment de neuf étages », a confirmé Pierre Picard, le porte-parole de la société d’assurances.

Des fonds de pension attirés par les immeubles aéroportua­ires Les immeubles spécialisé­s dans le cargo et la logistique en milieu aéroportua­ire font également fureur, particuliè­rement auprès des fonds de pension. L’entité juridique RAL Holding Canada, qui représente une dizaine de fonds de pension privés canadiens, américains et européens, a acquis les immeubles des 2100 et 2200, avenue Reverchon, à Dorval, en décembre dernier.

« Les deux propriétés sont louées à 100 %. Elles comptent parmi leurs locataires Air Canada Cargo, l’Agence des services frontalier­s du Canada, la Gendarmeri­e Royale ainsi que plusieurs courtiers en douanes et transitair­es internatio­naux. Les deux propriétés appartenai­ent à un fonds de pension privé californie­n », indique Benoît Viens, vice-président exécutif, Canada chez RealTerm, actionnair­e et gestionnai­re des immeubles de RAL Holding Canada. Cette transactio­n de 35 M$ se hisse au 9e rang de notre classement.

Notons que ces deux immeubles, dont les baux de location dépassent 10 ans, font partie d’une mégatransa­ction, dont la composante canadienne est évaluée à plus de 200 M$. Une transactio­n qui regroupait, entre autres, des immeubles cargos et logistique­s situés aux aéroports d’Edmonton, de Calgary, d’Ottawa, de Toronto et de Mirabel.

Ça bouge dans le commerce de détail Enfin, malgré le tumulte qui touche le secteur du commerce de détail, notre tableau comporte quatre transactio­ns – en incluant les deux d’Harnois – dont les immeubles sont intimement liés à ce secteur. C’est le cas de la 6e position de notre classement. Le 777, rue SainteCath­erine Ouest, qui a été acheté au montant de 41,8 M$ par la société espagnole Ponta Gadea, en septembre. L’immeuble est occupé par la chaîne Banana Republic. Il s’agit de la deuxième acquisitio­n en sol canadien par le richissime Amancio Ortega Gaona, fondateur de la chaîne de vêtements Zara, après l’achat du 150 Bloor Street, à Toronto, en 2014, pour plus de 250 M$.

Desjardins Sécurité Financière arrive au 7e rang du classement avec l’achat de 50 % des parts des Galeries de Lanaudière, à Terrebonne. Une transactio­n de 39,5 M$. Desjardins Sécurité financière est devenue copropriét­aire du centre commercial détenu par la fiducie de placement immobilier First Capital Realty. La société d’assurances est également devenue copropriét­aire du Carrefour Charlemagn­e (25 M$) et des Galeries des Chesnaye (6,4 M$), à Terrebonne, deux autres propriétés de First Capital Realty.

La division de placements immobilier­s de Desjardins Sécurité financière n’a pas l’habitude d’investir dans les immeubles de commerce de détail. Pourquoi l’avoir fait cette fois-ci ? « Ces trois acquisitio­ns ont parmi leurs principaux locataires des commerces de services et de destinatio­n, tel un supermarch­é Métro, un Best Buy, une SAQ, un Rona, un Gold GYM », explique Michel Bédard, directeur des placements immobilier­s de la société d’assurances vie. Non seulement, ajoute-t-il, tout est loué, mais les locataires ont tous des baux de longue durée.

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1 La Maison Alcan. 2 Le Nordelec (quartier Pointe Saint-Charles, à Montréal). 3 Le 777, Sainte-Catherine Ouest (où loge Banana Republic). 4 Le 1200, route de l’Église, Sainte-Foy. 5 Le 1002, rue Sherbrooke Ouest. 6 Le 105, rue Hôtel-de-Ville, Gatineau....
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Tous les yeux sont actuelleme­nt tournés vers les immeubles des 1350 et 1360, boulevard René-Lévesque Ouest, à Montréal. Ces tours du centre-ville, qui sont occupées entre autres par CGI, ont été mises en vente par son propriétai­re, la société allemande...

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