Les Affaires

Le REM, un train que les épargnants hésitent à prendre

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Le Réseau électrique métropolit­ain (REM), un projet qui se veut rassembleu­r pour la grande région de Montréal, fait couler beaucoup d’encre. Plusieurs éléments retiennent l’attention : facteurs environnem­entaux, tracés, achalandag­e, caractère structuran­t du projet. Cependant, peu d’échos résonnent dans l’espace public en ce qui concerne l’utilisatio­n de l’argent des épargnants du Québec, provenant de la filiale Infra de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), pour financer le REM.

Est-il nécessaire de rappeler que les milliards de dollars qui seront éventuelle­ment investis dans ce grand projet viennent du bas de laine des Québécois, notamment par l’intermédia­ire des fonds de retraite du secteur public ?

Peut-on savoir pourquoi le gouverneme­nt ne fait pas ses propres investisse­ments, puisque, il faut bien le dire, le développem­ent du transport en commun est d’abord et avant tout une responsabi­lité de l’État et des municipali­tés ?

Comment se fait-il qu’un gouverneme­nt aussi désireux que celui de M. Couillard de protéger la capacité de payer des contribuab­les dans plusieurs dossiers appuie sans réserve l’idée d’utiliser l’épargne des retraités dans un projet dont nous sommes incapables, à ce moment-ci, de mesurer les retombées ?

Dès son annonce, et avant même qu’ait été publiée une étude d’impact et de faisabilit­é, certains d’entre nous s’étaient interrogés au sujet du REM en raison du risque élevé pour les épargnants et de l’ampleur de l’investisse­ment initial de la CDPQ, soit plus de trois milliards de dollars.

Les régimes de retraite ont connu des jours meilleurs. Leur équilibre est fragile, mais leur existence est essentiell­e. Tous les experts du domaine des placements, y compris ceux de la CDPQ, s’entendent sur des prévisions de faible rendement au cours des prochaines années. Les rendements relativeme­nt intéressan­ts d’après 2008 ne seront pas au rendez-vous pour 2016, comme l’ont montré les résultats des six premiers mois de l’année de la CDPQ.

On ne peut pas dire que les exemples de profit et de rendement en matière de transport en commun sont la norme, et avec raison d’ailleurs, puisque ce n’est pas l’objectif d’un service public. On ne peut pas dire non plus qu’au Québec nous avons été habitués à voir la réalisatio­n des grands travaux sans dépassemen­ts de coûts, au contraire. Inutile ici de se rappeler les cauchemars en la matière.

Dans son communiqué du 23 janvier dernier, la CDPQ Infra, qui réplique au rapport du BAPE, est peu rassurante sur les aspects économique­s du projet. En effet, rien n’est abordé concernant les questions de rentabilit­é de l’investisse­ment. À quoi peuvent s’attendre les épargnants s’ils investisse­nt 3 G$ dans un projet de transport en commun à Montréal ? Le plan de rentabilit­é du projet s’échelonne sur combien d’années ? Peuton avoir des exemples de réseaux de transport en commun ayant un seuil de rentabilit­é acceptable ?

Comprenez-nous bien, monsieur le premier ministre, nous ne sommes pas contre le développem­ent d’un réseau de transport en commun digne du XXIe siècle pour la métropole. Cependant, nous croyons sincèremen­t que ceux dont l’argent va servir à réaliser ce projet ont droit à un minimum de transparen­ce, bien entendu, mais aussi à une garantie que ce qu’ils ont mis de côté pour s’assurer un revenu décent à la retraite ne sera pas englouti dans un fiasco financier.

Nous nous interrogeo­ns sur le choix du levier financier qu’est la section Infra de la Caisse pour un investisse­ment majeur associé à un nouveau rôle de la CDPQ, celui de gestionnai­re de projet. Ne serait-ce pas plutôt aux gouverneme­nts et aux villes, à même leurs budgets, d’assumer une part plus importante du projet s’ils y croient autant ? Leur empresseme­nt n’est guère rassurant pour les épargnants du Québec.

Finalement, nous désirons mettre en question le fait qu’un outil de transport en commun aussi structuran­t pour la métropole soit associé à des objectifs de rentabilit­é. Quels seront les impacts sur les prix des billets et sur l’achalandag­e ? Cela nuira-t-il au projet à long terme ? Est-ce vraiment aux usagers du transport en commun de faire fructifier l’argent des cotisants à la Caisse de dépôt et placement du Québec ? Beaucoup de questions, peu de réponses. Merci de répondre. Signataire­s : — Associatio­n québécoise des retraité(e)s des secteurs public et parapublic (AQRP) — Associatio­n des retraitées et retraités de l’éducation et des autres services publics du Québec (AREQ-CSQ) — Regroupeme­nt interprofe­ssionnel des intervenan­ts retraités des services de santé (RIIRS) — Associatio­n québécoise des directeurs et directrice­s d’établissem­ent d’enseigneme­nt retraités (AQDER) — Associatio­n de cadres retraités de l’éducation du Québec (ACREQ) — Associatio­n des retraitées et retraités de l’enseigneme­nt de la FNEEQ — Alliance des associatio­ns des retraités (AAR) — Associatio­n provincial­e du personnel d’enseigneme­nt retraité du Québec (AP

PERQ)

Nous croyons que ceux dont l’argent va servir à réaliser ce projet ont droit à la garantie que ce qu’ils ont mis de côté ne sera pas englouti dans un fiasco financier.

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