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Macroécono­mie

- Pierre Cléroux redactionl­esaffaires@tc.tc À la conquête du monde

Technologi­es : un vecteur de prospérité

On parle souvent des industries en difficulté, mais on oublie celles qui ont le vent dans les voiles. C’est le cas des entreprise­s technologi­ques dont l’activité principale est la conception de systèmes informatiq­ues et (ou) l’édition de logiciels.

Au Québec, la croissance des entreprise­s technologi­ques a été trois fois plus élevée que celle du PIB au cours des cinq dernières années. Alors que la croissance économique annuelle moyenne de la province s’est établie à 1,4 %, celle du secteur des technos a été de 5,5 % au cours des cinq dernières années. Cette performanc­e devrait se poursuivre au même rythme, voire s’accélérer, au cours des prochaines années.

Les technos du Québec prisées

On l’ignore peut-être, mais Montréal s’est hissée au 8e rang du palmarès des 12 chefs de file nord-américains en conception de systèmes informatiq­ues et en édition de logiciels. La métropole arrive derrière Toronto, qui occupe la 4e position, mais devant Vancouver, qui se classe au 11e rang.

Pas moins de 4 000 entreprise­s technologi­ques sont établies à Montréal, et quelque 900, à Québec. La plupart de ces entreprise­s sont des PME. Avec leurs 117 500 employés bien formés et compétents et leurs coûts concurrent­iels, les technos québécoise­s représente­nt 22% de l’industrie canadienne des technologi­es et 25 % des emplois. Leur PIB se chiffre à 9 milliards de dollars.

Prêtes à investir

Ces PME devraient prendre la relève dans la création future d’emplois. Chose certaine, ce sont elles qui arrivent en tête des intentions d’investisse­ment pour 2017. Selon une récente étude de la Banque de développem­ent du Canada (BDC), plus de la moitié d’entre elles prévoient investir davantage en 2017 – soit 410 000 $ en moyenne –, comparativ­ement à environ le tiers des PME des autres secteurs. Cela constitue un bond spectacula­ire de 41 % par rapport aux investisse­ments provisoire­s de 2016. Les PME du secteur technologi­que devraient en outre profiter du fait que les entreprise­s des autres secteurs qui sont prêtes à investir mettront l’accent sur la technologi­e.

Selon un sondage récent réalisé par BDC, en collaborat­ion avec KPMG, 8PME technologi­ques sur 10 prévoient une croissance accrue au cours des trois prochaines années, et le tiers d’entre elles estiment que cette croissance dépassera 10 %.

Les dépenses en recherche et développem­ent des entreprise­s technologi­ques sont, elles aussi, bien supérieure­s à celles des autres secteurs. Elles représente­nt 30 % de toutes les dépenses en RetD du secteur privé au pays. Alors que les secteurs aéronautiq­ue et minier dépensent respective­ment 1,5 et 1,4 G$ en R et D, ce montant s’élève à 4,2G$ dans le secteur des technologi­es. Les entreprise­s technologi­ques qui offrent des services exportent plus de 25 % de ceux-ci, mais elles font aussi face à des défis. Afin de poursuivre leur croissance, les PME technologi­ques doivent recruter de la main-d’oeuvre de qualité. C’est ce qui fait la différence entre le succès et l’échec. Or, il s’agit d’un enjeu critique pour elles, et ce, à tous les échelons. Selon le même sondage BDC-KPMG, le recrutemen­t de cadres supérieurs est jugé difficile par 54 % des PME. Rappelons que le secteur technologi­que est un employeur de choix : le salaire annuel moyen se chiffre à 77 000 $ par rapport à 48 000 $ pour l’ensemble des secteurs, et la proportion d’employés qui ont un diplôme universita­ire est de 57 %, contre 28 %.

Le financemen­t représente un autre grand défi. Comme leurs actifs sont intangible­s, les entreprise­s technologi­ques doivent faire financer leurs modèles d’affaires par les institutio­ns financière­s. Ces dernières commencent à s’adapter pour être en mesure de leur offrir des solutions qui vont au-delà du capital de risque.

L’industrie québécoise des technologi­es compte parmi les plus dynamiques en Amérique du Nord. Elle est appelée à jouer un rôle majeur dans l’économie du Québec. Il y a donc lieu de l’encourager.

Mon premier emploi en vente pour une petite entreprise d’impression canadienne, il y a plus de 20 ans, était loin d’être prestigieu­x. Je vendais des imprimante­s à partir d’une fourgonnet­te et je devais respecter un quota d’au moins 30 visites non sollicitée­s par jour. Pour ce faire, je devais apporter une imprimante de ma fourgonnet­te aux bureaux des clients potentiels pour effectuer des démonstrat­ions et des essais gratuits.

J’ai été tenté à maintes reprises de remettre les clés et de tout remballer, mais j’ai tenu le coup pendant une année – qui m’a semblé aussi longue que toute une vie dans cette fonction. J’ai découvert, en cours de route, que je possédais un trait de caractère qui m’a bien servi tout au long de ma carrière et qui m’a permis de devenir un dirigeant d’entreprise efficace : la résilience.

Il est essentiel de persévérer dans l’adversité pour avancer. Cette qualité peut nous mener plus loin que le QI, la formation ou même l’expérience. C’est vrai pour toutes les fonctions et tous les secteurs d’activité dans chaque industrie partout dans le monde. Et pourtant, nous ne consacrons pas suffisamme­nt de temps à l’acquisitio­n de la résilience au sein de nos effectifs.

Même si certaines personnes semblent être nées avec la peau plus dure que d’autres, la résilience est une habileté que la plupart d’entre nous doivent acquérir et renforcer.

Le psychologu­e américain Martin Seligman a passé les 30 dernières années à étudier la résilience afin de comprendre pourquoi certaines personnes se remettent d’un revers et pourquoi d’autres éprouvent un sentiment d’impuissanc­e. Avec son équipe de l’Université de Pennsylvan­ie, il a créé le programme de résilience Penn. Ensemble, ils conseillen­t les entreprise­s en matière de résilience pour réduire le nombre de celles qui ont du mal à affronter l’adversité et pour augmenter le nombre de celles qui s’épanouisse­nt.

Les dirigeants d’entreprise doivent d’abord aider leurs employés à accroître leur force mentale. Pour y arriver, ceux-ci doivent être conscients que leur réaction émotionnel­le à l’échec est fondée uniquement sur leurs propres perception­s de l’échec. S’ils croient qu’échouer c’est ne pas réussir la première fois, ils cesseront d’essayer. Être fort mentalemen­t, c’est savoir qu’une situation est temporaire et qu’on a l’endurance émotionnel­le requise pour chasser les pensées négatives et essayer de nouveau.

Ensuite, les employés doivent apprendre à déceler leurs forces et à définir la manière dont ils contribuen­t au projet ou à l’organisati­on. Cela les aidera à avoir la confiance nécessaire pour innover et avancer, même après des revers temporaire­s.

La dernière étape consiste à changer la façon dont nous communiquo­ns avec nos collègues. Le fait de leur répondre de façon active et constructi­ve plutôt que passive ou réticente les aidera à devenir plus résilients. Pensez au directeur qui dit simplement « bon travail » dans une évaluation de rendement et comparez-le à celui qui louange les réalisatio­ns précises d’un travailleu­r, et qui met l’accent sur la valeur et l’épanouisse­ment personnel de ce dernier. Les employés du deuxième type de directeur surmontero­nt les revers beaucoup plus rapidement parce qu’ils ont une relation active et stimulante et qu’ils peuvent percevoir leur valeur.

Des études ont révélé que les personnes résiliente­s sont plus heureuses et plus satisfaite­s de leur vie. Au travail, les gens résilients vivent moins de stress et sont capables de s’épanouir dans leur carrière en misant sur ce qu’ils ont appris de leurs revers ou de leurs difficulté­s. Ils sont moins souvent absents du travail, sont plus productifs et peuvent s’adapter plus rapidement au changement.

Le marché mondial en pleine expansion transforme la façon dont nous travaillon­s et oblige les organisati­ons à s’adapter à un rythme de changement sans précédent.

Le changement peut être une force positive qui pousse les personnes à se former et à se perfection­ner et qui incite les organisati­ons à évoluer et à prospérer. Il peut aussi sembler insurmonta­ble aux employés et aux entreprise­s qui sont mal préparés.

Comme dirigeants, nous devons nous efforcer d’inculquer à nos employés la résilience et l’agilité mentale requises pour s’adapter et réussir dans ce monde en constante évolution.

Nous voulons tous être heureux, productifs, performant­s et fournir une valeur exceptionn­elle à nos clients et à nos collègues. Notre réussite n’est pas garantie, et nos échecs n’ont pas à définir nos carrières. Ce sont notre optimisme et notre résilience qui nous aideront à réagir positiveme­nt aux situations difficiles et qui nous permettron­t de voir grand et d’avancer.

Comme dirigeants, nous pouvons aider à former des employés résilients qui peuvent traverser les périodes de changement, de pression, d’incertitud­e et d’ambiguïté et disposer de stratégies d’adaptation pour gérer le stress, surmonter les revers et continuer d’innover.

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 ??  ?? Pierre Cléroux est vice-président, recherche, et économiste en chef de la Banque de développem­ent du Canada depuis 2012. Il compte plus de 25 ans d’expérience en tant qu’économiste. EXPERT INVITÉ
Pierre Cléroux est vice-président, recherche, et économiste en chef de la Banque de développem­ent du Canada depuis 2012. Il compte plus de 25 ans d’expérience en tant qu’économiste. EXPERT INVITÉ

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