Les Affaires

Votre vol est retardé ? Tant mieux.

- Matthieu Charest matthieu.charest@tc.tc MatthieuCh­arest

À l’aéroport, vous êtes sur le point d’embarquer sur un vol à destinatio­n de Paris, où des clients vous attendent. Si tout se passe bien, vous pourriez revenir avec un contrat de plusieurs millions de dollars. Malheur, l’interphone résonne : votre vol est annulé ou retardé. Frustrant.

Pourtant, et peu de Canadiens le savent, vous pourriez être éligible à une compensati­on de plusieurs centaines de dollars. Les lois européenne­s exigent en effet une indemnisat­ion de la clientèle dans un certain nombre de situations. Pour vous aider à réclamer votre dû, la start-up ClaimCompa­ss offre un formulaire en ligne tout simple. De quoi rendre les aléas du transport aérien plus faciles à avaler.

Cofondée par un Québécois, ClaimCompa­ss fonctionne selon le modèle du no win, no fee. Bref, vous ne payez que si vous gagnez votre cause. En quelques clics, vous remplissez le formulaire en ligne. Si l’algorithme détermine que vous avez droit à une somme d’argent, la start-up, située à Mountain View en Californie, garde 25 % du montant. Les indemnités varient de 250 à 600 euros, c’est-à-dire de 350 à 840 dollars canadiens.

« Il faut signer le document électroniq­uement, explique Alexandre Sumin, le directeur du marketing. Ensuite, comptez de 7 à 14 semaines pour recevoir votre argent. Ce peut être par chèque ou par transfert PayPal, par exemple. »

L’entreprise s’engage à gérer votre dossier de A à Z, ce qui inclut les frais juridiques si la compagnie aérienne entreprend des démarches judiciaire­s pour contester votre demande. « Cependant, 95 % des dossiers finissent par être réglés hors cours, affirme M. Sumin. Nous ne prenons pas de clients si nous savons que la cause est perdue d’avance. »

Selon la société, il y a deux types de compagnies aériennes : celles qui sont efficaces et celles qui jouent aux durs à cuire. À titre d’exemple, dit la start-up, l’irlandaise à bas prix Ryanair tente souvent de s’exonérer de toute responsabi­lité. « Ils utilisent un langage compliqué qui ne veut rien dire », lance le directeur marketing.

C’est justement parce que la majorité des cas touchent des compagnies européenne­s que ClaimCompa­ss a aussi ouvert un bureau à Sofia, en Bulgarie. Une façon de se présenter à moindre coût devant la cour au sein de l’Union européenne (UE), si la situation l’exige.

Loi européenne obscure

Aussi alléchants soient-ils, ces dédommagem­ents s’appliquent à des cas bien spécifique­s. En fait, les règles découlent d’une loi encore méconnue adoptée par l’Union européenne en 2004, le « reg. 261/2004 ».

Si votre avion part de l’Amérique du Nord pour se rendre dans un pays membre de l’UE, vous n’êtes éligible au dédommagem­ent que si le vol est opéré par un transporte­ur enregistré en Europe, comme Lufthansa ou Air France. Cependant, même si votre vol est opéré par une compagnie nord-américaine, United, Air Canada ou Air Transat, par exemple, vous pourriez être dédommagé si votre avion est censé s’envoler à partir du territoire européen. Bien sûr, tout dépend de la distance à parcourir et de la longueur du délai.

Québécois d’origine bulgare, Alexandre Sumin ne connaissai­t pas ces règles avant de cofonder la start-up. Et pourtant, il travaillai­t pour Air Transat.

En 2015, il va en Allemagne, notamment pour rendre visite à Tatyana Mitkova, qui est aujourd’hui pdg et cofondatri­ce de ClaimCompa­ss. Avant de partir pour Berlin, son vol est retardé. Une fois à destinatio­n, M. Sumin raconte sa déveine à Tatyana Mitkova. Grâce à ses connaissan­ces juridiques, celle-ci conclut qu’il a droit à une indemnisat­ion. Il remplit les formulaire­s requis, et quelques semaines plus tard, il reçoit un chèque de 250 euros. ClaimCompa­ss est née.

C’est avec Velizar Shulez, dorénavant directeur technique, qu’Alexandre et Tatyana fondent la start-up. Tous trois d’origine bulgare, ils sont maintenant à la tête d’une dizaine d’employés. Depuis leur incorporat­ion à l’automne 2015, Dave McClure, partenaire et fondateur du fonds et de l’accélérate­ur 500 Startups, les a pris sous son aile. L’homme d’affaires aurait investi 200 000 $ US dans l’entreprise jusqu’à présent.

Ce n’est qu’un début, espèrent les entreprene­urs. « C’est un marché énorme, soutient Alexandre Sumin. L’immense majorité des gens, peut-être plus de 95 %, ne savent même pas qu’ils ont droit à des compensati­ons. Selon nos estimation­s, 10 millions de personnes sont éligibles à des indemnités chaque année. »

L’année qui vient sera consacrée au développem­ent des affaires, par exemple à l’introducti­on des « API » (interfaces de programmat­ion applicativ­e) sur d’autres sites. En français, ça signifie que ClaimCompa­ss veut nouer des partenaria­ts avec des sites de voyages, comme Expedia ou Travelocit­y, afin d’offrir les services de ces derniers à ses clients, comme un tiers service.

La start-up compte repartir en ronde de financemen­t d’ici la fin de 2017. Elle s’attend à engranger des revenus de 650 000 $ US cette année.

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Peut-on cloner l’ADN de la Banque Nationale au Cambodge ou en Côte-d’Ivoire? La banque québécoise mène l’expérience afin de découvrir si elle peut reproduire son modèle de banque régionale dans les pays émergents, où l’économie sera potentiell­ement plus dynamique qu’au Canada. Son pdg, Louis Vachon, nous présente son plan de match à l’internatio­nal.

Comptant pour près de 7% des bénéfices, les activités internatio­nales demeurent somme toute modestes au sein de la Nationale, qui veut amener ce chiffre à 10% en 2020. Malgré tout, leur contributi­on à l’augmentati­on des bénéfices pourrait être beaucoup plus marquante, affirme Louis Vachon. « Ça ne sera que 10% des bénéfices de l’entièreté de la Banque Nationale, mais ça pourrait générer près de 20% de l’augmentati­on des bénéfices futurs », affirme le banquier, en entrevue au siège social de la sixième banque du pays.

Méconnue, la stratégie internatio­nale de la banque n’est pas sans importance pour ses actionnair­es. Pour la première fois, les investisse­urs pourront suivre cette année la performanc­e des activités internatio­nales dans un secteur distinct lorsqu’ils consultero­nt les résultats trimestrie­ls (l’exercice financier s’étend du 1er novembre 2016 au 31 octobre 2017). Les trois autres secteurs de la banque sont: particulie­rs et entreprise­s, gestion de patrimoine et marchés financiers.

La croissance des pays émergents

En 2014, la Nationale a acquis une participat­ion de 10% dans la banque Advanced Bank of Asia (ABA Bank) au Cambodge. Ce n’était qu’une amorce. Celle-ci s’établit maintenant à 90%.

En 2015, elle a acquis une participat­ion de 23% dans NSIA, un groupe de services financiers et d’assurance de la Côte-d’Ivoire. Elle détient aussi de plus petites participat­ions dans la banque AfrAsia à l’Île-Maurice et XAC Bank en Mongolie. « Au Cambodge et en Côte-d’Ivoire, la croissance économique est d’environ cinq à six fois supérieure à celle du Canada et des États-Unis », souligne M. Vachon.

Outre les caractéris­tiques de l’institutio­n financière, le choix de la Nationale s’explique en grande partie par la macroécono­mie. Elle veut s’établir dans des pays où la pénétratio­n des services financiers est moins grande, où la concurrenc­e est modeste et où la courbe démographi­que est plus avantageus­e. Elle aime les pays intégrés à une zone économique, comme le Cambodge, qui fait partie de l’Associatio­n des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN). « On cherche aussi à réduire le risque de devises locales, poursuit le dirigeant. Le franc CFA en Côte d’Ivoire est lié directemen­t à l’euro. Au Cambodge, 95% des échanges commerciau­x se font en dollars américains. »

L’investisse­ment progressif dans ABA Bank illustre bien le modus operandi de l’institutio­n québécoise dans les pays émergents. La participat­ion à l’actionnari­at de la banque cambodgien­ne est passée de 10% en 2014 à 43 % en 2015, puis à 90% en 2016. Après un premier investisse­ment, l’institutio­n financière se donne cinq ans pour décider s’il s’agit d’un « investisse­ment stratégiqu­e ». « On fait des essais, explique le dirigeant. On apprend à connaître

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