Les Affaires

Les taux d’intérêt appelés à grimper

- Mathieu D’Anjou redactionl­esaffaires@tc.tc

Partout sur la planète, les consommate­urs, les entreprise­s et les gouverneme­nts se sont habitués depuis de nombreuses années à voir continuell­ement baisser les taux d’intérêt. Cela a permis de limiter les frais d’intérêt malgré une forte augmentati­on de l’endettemen­t du secteur privé et du secteur public. Toutefois, l’inflation s’est accrue près des niveaux ciblés par les banques centrales, et la Réserve fédérale (Fed) semble véritablem­ent décidée à resserrer sa politique monétaire, si bien que les agents économique­s doivent maintenant se préparer à composer avec une remontée graduelle des taux d’intérêt.

Après avoir attendu un an entre la première et la deuxième hausse de ses taux directeurs, la Réserve fédérale a augmenté la cadence en procédant à une deuxième hausse trimestrie­lle consécutiv­e, à la mi-mars. Beaucoup d’investisse­urs ont été rassurés par le fait que les dirigeants de la Fed n’aient pas signalé un resserreme­nt monétaire plus rapide au cours des prochains trimestres. À notre avis, deux hausses des taux directeurs en l’espace de trois mois représente­nt toutefois un signal clair que les hésitation­s de l’an dernier appartienn­ent au passé et que la Fed est maintenant véritablem­ent en mode de resserreme­nt. Après avoir augmenté leurs taux directeurs de seulement 0,25% en 2015 et en 2016, les autorités monétaires américaine­s semblent ainsi maintenant se diriger vers des hausses annuelles de 0,75% en 2017 et en 2018.

La Fed est la seule grande banque centrale à avoir amorcé un cycle de resserreme­nt monétaire, mais plusieurs autres, particuliè­rement en Europe, ont récemment adopté un discours plus positif. Cela reflète des signaux encouragea­nts pour les économies avancées et, surtout, le fait que la faiblesse persistant­e de l’inflation a fait place à une progressio­n des prix beaucoup plus près des niveaux ciblés par les banques centrales. Cette remontée de l’inflation provient surtout du rebond des prix de l’essence et non de véritables pressions inflationn­istes internes. Malgré cela, il était beaucoup plus facile pour les banques centrales de maintenir des politiques monétaires ultra-accommodan­tes lorsque l’inflation évoluait significat­ivement en dessous de leurs cibles. La nécessité de toujours stimuler davantage l’économie est beaucoup moins présente dans le contexte actuel.

Le Canada ne sera pas épargné

Au Canada aussi, les dernières statistiqu­es économique­s sont encouragea­ntes et le taux d’inflation est repassé légèrement au-dessus de 2%. Malgré cela, tout indique que la Banque du Canada sera très patiente avant d’imiter la Fed en augmentant à son tour ses taux directeurs. Nous ne prévoyons ainsi aucun changement à la politique monétaire canadienne avant la mi-2018, ce qui laisse entrevoir une stabilité des taux d’intérêt variables et de très court terme. Les taux canadiens de plus long terme sont toutefois influencés par d’autres facteurs et tendent à suivre de près l’évolution des taux américains. Le taux des obligation­s canadienne­s fédérales de cinq ans a ainsi plus que doublé par rapport au niveau très bas observé l’été dernier.

Alors que la remontée des taux d’intérêt internatio­naux devrait se poursuivre au cours des prochains trimestres, l’impact devrait commencer à se faire sentir davantage sur l’ensemble des taux d’intérêt canadiens de moyennes et de longues échéances. La bonne nouvelle est que tout indique que cette hausse des taux d’intérêt se fera de façon graduelle et assez limitée. Les emprunteur­s canadiens devraient tout de même réaliser dès aujourd’hui que le vent a tourné et prendre conscience que le poids de l’endettemen­t risque de devenir un peu plus lourd à porter au cours des prochaines années.

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Mathieu D’Anjou, CFA, est économiste principal aux Études économique­s du Mouvement Desjardins.

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