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Le Québec veut dominer le transport vert

- Spécial 500 Jean-François Venne redactionl­esaffaires@tc.tc

Le Québec rêve de devenir un carrefour important de l’électrific­ation des transports. Alors que l’essor des voitures électrique­s se fait sentir, des efforts restent à faire pour électrifie­r le transport collectif et de marchandis­es, ainsi que pour développer l’industrie.

« L’électrific­ation des transports vise à diminuer les émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur des transports et à créer une industrie génératric­e de croissance et de richesse », explique Isabelle Gattaz, coordonnat­rice, électrific­ation des transports au ministère des Transports du Québec (MTQ).

En 2015, le Québec s’est doté d’un plan d’électrific­ation des transports, visant à devenir un chef de file dans ce domaine d’ici 2020. Son enveloppe budgétaire initiale de 420million­s de dollars (M$) a été bonifiée de 70 millions supplément­aires au budget 2017-2018, notamment pour un projet pilote de rabais relatif à l’achat de voitures électrique­s usagées ou d’occasion.

Nous roulons de plus en plus vert

Pour le moment, le secteur des véhicules électrique­s est le plus avancé. L’infrastruc­ture se déploie rapidement. Le Québec compte de 1 600 à 1 700 bornes de recharge, dont environ 200 de 400 volts permettant une recharge plus rapide. « Le nombre de véhicules électrique­s ou hybrides est passé de 8 400 en décembre 2015 à 14 273 en mars 2017, illustre Isabelle Gattaz. La croissance des voitures entièremen­t électrique­s dépasse désormais celle des hybrides. On en trouvait 6 341 sur nos routes en mars 2017. » Le Québec souhaite que 100 000 véhicules électrique­s ou hybrides sillonnent ses routes en 2020.

Cette croissance est ralentie par l’offre trop faible des constructe­urs. Les manufactur­iers ne présentent des gammes vraiment complètes que sur les marchés où s’appliquent des lois sur les véhicules à zéro émission de GES, ce qui sera le cas au Québec dès 2018. Les fabricants devront offrir une certaine proportion de véhicules à zéro émission chez leurs concession­naires.

Le développem­ent se fait plus lentement du côté du transport de marchandis­es, mais connaît un bel essor en transport collectif. « Plusieurs sociétés des transports, notamment à Montréal, à Longueuil et à Québec, y oeuvrent, indique Isabelle Gattaz. Cela reste un défi, puisqu’il faut repenser l’organisati­on du travail, des circuits et de l’entretien, mais il y a aussi des avantages. L’électricit­é arrive directemen­t dans les garages, ce qui est plus simple que d’accueillir des camions-citernes remplis d’essence, par exemple. »

Alexandre Taillefer préside le comité de mise en place de la toute nouvelle grappe industriel­le pour les véhicules électrique­s et intelligen­ts, annoncée en avril 2017. Pour lui, il est temps que le Québec mette le cap sur le transport collectif et le transport de marchandis­es. « On prévient l’émission d’environ une tonne de GES par année avec une voiture électrique, alors qu’un camion faisant régulièrem­ent Montréal-Toronto en émet 200 annuelleme­nt. Il faut électrifie­r le transport de marchandis­es, comme le transport collectif. »

L’arrivée de la grappe ne vise pas seulement l’atteinte d’objectifs environnem­entaux, mais aussi le développem­ent de l’industrie de l’électrific­ation des transports. Pour contourner les GM, Tesla et autres Toyota qui trônent dans le secteur des automobile­s, le Québec se tourne vers les pièces et les véhicules de niche, comme les navettes, les véhicules récréatifs, les autobus scolaires et autres bennes à ordures.

« Le succès passera par les entreprene­urs, croit M. Taillefer. La grappe les aidera à collaborer et à faire entendre leur voix au gouverneme­nt, pour l’amener à créer un environnem­ent favorable à leur croissance. » Au Québec, cette industrie compte déjà de beaux succès. Que l’on pense à AddÉnergie, manufactur­ier de solutions de recharge, ou au fabricant de pièces en aluminium estrien Verbom, qui contribue à la Tesla X.

Montréal ambitieuse

Le maire de Montréal, Denis Coderre, a pour objectif de faire de sa ville la métropole mondiale de l’électrific­ation des transports. En 2016, la Ville lançait sa propre stratégie; elle tente depuis de donner l’exemple. Les voitures de la flotte municipale, par exemple, sont systématiq­uement remplacées par des modèles électrique­s lorsqu’elles arrivent en fin de vie.

« Montréal entend assumer un leadership dans l’électrific­ation des transports au Québec, avance Elsie Lefebvre, conseillèr­e municipale et responsabl­e de l’électrific­ation des transports. Nous travaillon­s en lien avec la stratégie québécoise, mais aussi en vue d’atteindre nos propres objectifs. »

La Ville veut se donner une longueur d’avance dans cette industrie et attirer les investisse­urs au Québec. En avril dernier, elle annonçait l’octroi de 3,6 M$ sur deux ans pour créer l’Institut de l’électrific­ation et des transports intelligen­ts, chargé de faire de la recherche et d’attirer les entreprise­s. La tenue d’une course de Formule E à Montréal vise aussi à faire venir les constructe­urs afin de les courtiser. « C’est tout l’enjeu : être reconnu mondialeme­nt », conclut Mme Lefebvre.

Le plan fédéral Transport 2030 comprend lui aussi une promesse de collaborat­ion avec les provinces et les territoire­s pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports de 30 % sous les niveaux de 2005. Le gouverneme­nt veut notamment investir dans les bornes de recharge et le transport d’électricit­é, en plus d’adapter le cadre réglementa­ire aux technologi­es émergentes, comme les véhicules connectés et autonomes.

Reste à voir si cet effort concerté suffira à faire du Québec un chef de file dans ce secteur hautement convoité.

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