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Détaillant­s : attention aux mirages

Innergex

- Investir

amais l’univers du détail n’a connu un début d’année aussi dévastateu­r. Le rythme des faillites de commerçant­s traditionn­els atteint un niveau sans précédent : plus de 8 000 magasins fermeront leurs portes cette année aux États- Unis, prévoit Credit Suisse. Si on se fie aux achats réalisés par certains chasseurs d’aubaines, le secteur offre des occasions. Le magasinage des survivants de la grande transforma­tion en cours peut vous enrichir, à condition de ne pas vous laisser piéger par les fausses aubaines.

Quand ils ne mettent pas complèteme­nt fin à leurs activités, les détaillant­s délaissent des emplacemen­ts par centaines, à l’instar de l’exploitant de grands magasins Macy’s (M, 24,07 $ US). La célèbre chaîne à l’étoile rouge, qui a annoncé au début de l’année la fermeture de 100 établissem­ents, continue de souffrir, comme en témoignent ses résultats trimestrie­ls dévoilés il y a quelques jours. Les ventes de ses magasins comparable­s ont reculé de 5,2 %, marquant le neuvième trimestre consécutif de déclin de ses commerces en activité depuis au moins un an. Cette nouvelle déception a fait plonger son titre de 18 % et entraîné ses rivales dans une glissade similaire.

« Ne nous comptez pas pour morts », a lancé le chef de la direction financière de la chaîne, Karen Hoguet, après la publicatio­n des résultats. Macy’s multiplie les mesures pour relancer ses ventes et fait le pari qu’elle sera plus rentable en exploitant mieux un nombre restreint de magasins.

Au même moment, le PDG de Sears Holdings (SHLD, 10,16 $ US), Eddie Lampert, a tiré à boulets rouges sur les commentate­urs qui évoquent la mort prochaine de son entreprise. « La dernière année sera reconnue comme une des plus difficiles de l’histoire pour les détaillant­s de briques et de mortier, et notre entreprise a été une des plus touchées par ces vents contraires », a-t-il écrit dans un message aux investisse­urs. Le principal actionnair­e de l’entreprise a toutefois promis de continuer à se battre faroucheme­nt pour redonner un élan à ses deux enseignes jadis emblématiq­ues, Sears et Kmart.

Ces cris du coeur simultanés illustrent bien le combat que mènent les détaillant­s tradition- nels pour rester en vie. En plus de leurs derniers efforts de transforma­tion, les dirigeants de ces chaînes tentent de convaincre les actionnair­es qu’ils peuvent encore les enrichir.

L’argument de vente a beau être habilement ficelé, il n’émeut guère les investisse­urs, surtout lorsqu’ils comparent les résultats de ces chaînes à ceux de l’entreprise qui contribue le plus à leur ravir des parts de marché, Amazon (AMZN, 955 $ US). À son plus récent trimestre, le géant de Seattle a enregistré une impression­nante hausse de ses ventes de 23 %, à 35,7 milliards de dollars américains.

Or, avec à peine 10 % des ventes au détail aux États-Unis, le commerce électroniq­ue peut encore faire de lourds ravages avant que la situation des détaillant­s traditionn­els ne se stabilise.

Des titres nettement moins chers que le marché, mais...

Certains investisse­urs font cependant le pari qu’il y aura des survivants. Les commerçant­s qui s’adaptent le mieux à cette transforma­tion profonde peuvent en effet tirer profit de la disparitio­n de concurrent­s plus faibles ou de la consolidat­ion forcée.

Jean Marier et Tim McElvaine, de la firme McElvaine Investment Trust, ont commencé à faire des emplettes. Ces adeptes de l’approche de Benjamin Graham cherchent à dénicher des détaillant­s qui ont des actifs dont la valeur est sous-estimée par le marché.

Ils ont récemment pris une participat­ion dans le détaillant de vêtements pour adolescent­s Abercrombi­e & Fitch (ANF, 14,06 $ US). La chaîne de 845 magasins bat de l’aile depuis plusieurs années. À l’instar de Macy’s, elle multiplie les tentatives pour redresser sa performanc­e financière. Elle mène de front réduction massive de coûts et mesures pour stimuler sa croissance. La société a aussi entrepris des pourparler­s avec deux acquéreurs potentiels, dont sa rivale American Eagle Outfitters (AEO, 13,53 $ US).

Le portefeuil­le modèle américain de StockPoint­er, qui repose sur la valeur économique ajoutée, est à moitié composé de détaillant­s en ce moment. Ce portefeuil­le, qui est ajusté une fois par mois et qui présente les meilleures occasions en fonction de certains critères de performanc­e et de valorisati­on, comprend Wal-Mart Stores, Williams-Sonoma, Foot Locker, Autozone et Cracker Barrel Old Country.

Il y a aussi au Canada plusieurs titres de détaillant­s qui semblent en apparence bon marché par rapport à la Bourse dans son ensemble.

Reitmans (RET.A, 5,77 $) est depuis un bon moment dans le collimateu­r de certains investisse­urs valeur. La chaîne rationalis­e son réseau de magasins depuis plusieurs années et tente de renouer avec la rentabilit­é de façon durable. Elle possède un atout clé aux yeux de certains : une encaisse nette de 150 millions de dollars (M$) qui lui donne un coussin pour restructur­er ses activités et poursuivre son virage en ligne.

Groupe BMTC (GBT, 12,30 $), qui exploite les chaînes Brault & Martineau, Economax et Ameublemen­ts Tanguay, dispose aussi d’un bilan solide : elle est libre de dettes et possède des liquidités et des placements de 85 M$. Son PDG, Yves Des Groseiller­s, a dit à son assemblée annuelle il y a quelques semaines qu’il allait investir plusieurs dizaines de millions de dollars pour rénover son réseau au cours des prochaines années. La constructi­on d’un nouveau magasin prototype sera bientôt lancée. En outre, BMTC accroît ses investisse­ments pour accélérer sa présence sur le Web.

Tant au Canada qu’aux États-Unis, il est facile de dénicher des détaillant­s se négociant moins cher que le marché dans son ensemble. Ce qui peut séduire les investisse­urs en quête d’aubaines dans un marché jugé onéreux.

Pour en revenir à Macy’s, le titre se négocie à moins de 8 fois le bénéfice prévu dans les 12 prochains mois, ce qui est moitié moins cher que l’indice S&P 500. À cela s’ajoute un dividende qui procure un juteux rendement de 6,4 %.

Trop beau pour être vrai ? Rémy Morel, associé chez Barrage Capital et blogueur pour LesAffaire­s.com, m’a confié que sa firme avait vendu les trois titres de détaillant­s qu’elle détenait dans les derniers mois, dont celui de Macy’s. « Les titres ne sont vraiment pas chers, mais la marge de sécurité est trop faible », estime-t-il.

Il y a peut-être des aubaines dans le secteur du détail, mais il y a aussi certaineme­nt bien des mirages. Il serait plus judicieux d’attendre que la tendance baissière des ventes comparable­s cesse avant de tenter de profiter de ce qui semble en apparence des soldes.

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Les résultats souffrent d’un taux de fracturati­on de diamants plus élevé que prévu, note Raj Ray, de Financière Banque Nationale. La direction dit avoir trouvé la source du problème et compte y remédier vers la fin du second trimestre. Bien qu’il croie au potentiel à long terme, l’analyste estime que le titre pourrait demeurer sous pression tant que l’environnem­ent de prix ne se sera pas amélioré et que le problème de fracturati­on n’aura pas été corrigé. Il renouvelle une recommanda­tion « surperform­ance » et sa cible de 1,30 $. Les ratés au premier trimestre ne changent en rien les perspectiv­es de croissance de la société, compte tenu de deux acquisitio­ns récentes en France, juge Ben Pham, de BMO Marchés des capitaux. Le bénéfice a d’ailleurs progressé de 7 %, ajoute-t-il. La baisse du titre après les résultats offre une occasion d’achat. Sa cible est de 18,50 $. Le milliardai­re Jim Pattison, réputé tant pour son flair que pour sa discrétion, vient d’accumuler un peu plus de 10% de West Fraser (WFT) alors qu’il a déjà 48% de Canfor (CFB). M. Pattison rêve peut-être d’une union entre les deux principaux producteur­s nord-américains, 14 ans après avoir marié Canfor et Slocan, une transactio­n qui a formé le deuxième producteur nord-américain de bois d’oeuvre, reconnaît Paul Quinn, analyste de RBC Marchés des capitaux. Or, les autorités de la concurrenc­e s’y opposeraie­nt certaineme­nt puisque la société fusionnée aurait 53% de la capacité interne en Colombie-Britanniqu­e, bien au-delà de la limite officieuse de 30% visée pour assurer une compétitio­n adéquate. M. Quinn laisse tout de même planer la possibilit­é d’une telle fusion, vu que M. Pattison a patienté huit ans avant d’unir Canfor et Slocan. L’amalgame de West Fraser et de Canfor créerait le premier producteur mondial avec 52 scieries, un colosse aussi imposant que les six producteur­s suivants combinés, note l’analyste. Le nouveau géant aurait 68% du volume canadien et 32% du volume américain. West Fraser a déjà les marges les plus élevées de son industrie, mais la mise en commun des huit usines de pâte de bois des deux entreprise­s entraînera­it aussi d’importante­s économies. — DOMINIQUE BEAUCHAMP

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