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LES ATTRAITS ET LES RISQUES DE COMINAR

- Chronique

aut- il y aller avec Cominar (CUF.UN, 13,08 $) ou non ? Depuis quelque temps, la question nous triture les méninges. Et l’on n’est pas seul à s’interroger. Presque chaque fois que le nom de l’entreprise apparaît dans un titre sur notre site web, l’article grimpe dans nos textes les plus lus.

L’attrait du titre : une distributi­on (dividende) de 1,47 $ par unité qui offre un rendement de 11%. Le frein : s’agit-il d’un piège ? Deux choses particuliè­rement sont à peser dans le cas de Cominar.

1 – La dette est élevée et l’agence de notation DBRS, qui préfère ne pas voir les perspectiv­es immobilièr­es des années à venir avec des lunettes roses, souhaite qu’elle baisse. Sinon, elle décotera les débentures et celles-ci perdront leur grade « investisse­ment ».

2 – La distributi­on est actuelleme­nt plus élevée que le bénéfice enregistré.

Voyons l’impact que pourrait avoir chacune de ces situations sur le titre dans les prochains mois. Une éventuelle décote de DBRS En théorie, ce ne serait pas la fin du monde. Ce n’est pas parce que vous n’êtes plus de qualité « investisse­ment » que vous ne pourrez pas vous refinancer. Nombre de sociétés le font.

Quand même, la dette de Cominar est plutôt élevée. Sous l’angle de la valeur aux livres, elle est à 52 % des actifs, le ratio le plus élevé de l’univers de Valeurs mobilières Industriel­le Alliance (la moyenne est plutôt à 45 %).

La dette représente en fait 10 fois le bénéfice avant intérêts, impôts et amortissem­ent (BAIIA) actuel. DBRS souhaitera­it voir ce ratio se trouver plus près de 9.

Avec un cycle qui s’étire, et dans un contexte où le commerce de détail physique est incertain, il serait sage d’entreprend­re immédiatem­ent une réduction de dette. Au niveau actuel, Cominar semble paralysée. Elle n’est pas vraiment en mesure de songer à des projets dans d’autres créneaux qui lui permettrai­ent d’augmenter ses profits, et est menacée de difficulté­s en cas de récession.

À la dernière conférence téléphoniq­ue, la direction a fait savoir qu’elle n’entendait pas diminuer la distributi­on actuelle. Et qu’elle avait terminé son programme de recyclage d’immeubles (qui consiste à vendre des immeubles dont on croit avoir tiré le meilleur potentiel pour réaffecter l’argent ailleurs).

C’est dire qu’il ne semble rester que l’avenue d’une émission d’actions pour réduire la dette. Une émission de combien ? BMO Marchés des capitaux estime qu’une émission de 150 millions de dollars (M$) permettrai­t de ramener le ratio dette-BAIIA à 9,5. C’est peut-être encore un peu loin du 9 recherché par DBRS, mais il y a sans doute moyen de négocier.

Quel serait l’impact sur le titre d’une émission de 150-300 M$ ?

C’est toujours difficile à dire. On ne sait trop à quel escompte par rapport au cours actuel le marché souhaitera­it une éventuelle émission. À la mi-septembre 2016, Cominar avait réussi un financemen­t de 200 M$ à un prix de 7-8% sous sa valeur de fluctuatio­n des cinq derniers mois.

Le risque de recul est probableme­nt de cet ordre. Il se pourrait même que ça ne fléchisse pas beaucoup, le titre ayant déjà fait marche arrière dans les dernières semaines. L’investisse­ur peut sans doute postuler que, dans le pire des cas, le risque d’un recul de la valeur de l’unité sur une émission est à peu près équivalent à une année de distributi­on. Deuxième risque : le niveau élevé de distributi­on Le niveau de la dette réglé, tout n’est cependant pas pour autant résolu. Il faut aussi que, dans l’avenir, la société en vienne à ne plus verser à ses actionnair­es plus d’argent qu’elle n’en fait. Elle versera cette année 127 % de son bénéfice (fonds disponible­s en provenance de l’exploitati­on).

Évidemment, on peut ramener le tout à l’équilibre en augmentant les bénéfices des propriétés que l’on possède déjà (en faisant payer plus les locataires et en retranchan­t des coûts).

Les analystes ne s’entendent toutefois pas sur la capacité de Cominar à générer de la croissance organique. Un groupe estime qu’en 2018, la distributi­on ne représente­ra plus que 102-103% du bénéfice, mais l’autre voit encore un dividende équivalent à 118-120% du bénéfice.

Si l’école pessimiste a raison, il est probable que surviendra à cette date (2018) une importante coupe du dividende. Pour verser autant d’argent qu’il en rentre, il faudrait alors ramener la distributi­on de 1,47 $ par unité autour de 1,25 $ par unité. Ce serait une coupe d’environ 15 %, qui ferait en sorte que, sur le cours d’aujourd’hui, la distributi­on offrirait encore un rendement de 9 %.

La bonne nouvelle est qu’une telle coupe n’aurait vraisembla­blement pas d’impact sur le prix de l’unité. La Scotia estime en effet que le prix du titre escompte probableme­nt actuelleme­nt une coupe de 20-25 % de la distributi­on.

La moins bonne, c’est qu’il est possible qu’une autre amputation survienne, mais plus tard. Les REIT versent en effet en moyenne 75-80 % de leur profit en dividende, pas 100 %.

Si on prend le scénario des optimistes, le titre ne plierait probableme­nt pas et offrirait un rendement de dividende de 8,4 %. On serait toujours en effet à l’intérieur de l’amputation anticipée par le marché selon Scotia.

Attention cependant ; si les pessimiste­s, ceux de la deuxième école, ont raison, il faudrait alors plutôt amener la distributi­on à 1 $ par unité, ce qui ne laisserait plus qu’un rendement de dividende de 7% et entraînera­it cette fois une baisse simultanée du prix de l’unité.

Conclusion ?

Les deux risques de recul ne semblent pas devoir s’additionne­r, ou à tout le moins très peu. Une amputation du dividende pour ne conserver qu’une distributi­on de 80 % du bénéfice du pire scénario attendu permettrai­t en effet d’aller chercher des économies de 85 M$ par année, ce qui rassurerai­t vraisembla­blement DBRS quant au ratio d’endettemen­t à venir.

Peu importe l’angle sous lequel on aborde la situation, le risque global de recul semble être au pire équivalent à une année de distributi­on. Le titre est tentant étant donné la force de celle-ci. À condition cependant qu’une récession ne se présente pas d’ici deux à trois ans. C’est pourquoi on préfère passer.

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