Les Affaires

SNÖFLAKE : DU SKI, MÊME EN ÉTÉ

- Martin Jolicoeur martin.jolicoeur@tc.tc @JolicoeurN­ews

Une entreprise de la région de Québec croit avoir trouvé LA solution aux difficulté­s financière­s des propriétai­res de stations de ski qui peinent, ici comme ailleurs, à composer avec les effets du réchauffem­ent climatique.

Au terme de trois ans de recherche et développem­ent, Industries Samson, de Lévis, a mis au point un engin capable de produire de la neige à des températur­es aussi élevées que 15 à 25 degrés Celsius. Une innovation technologi­que capable d’étirer la durée d’une saison de ski qui susciterai­t déjà l’intérêt de grands groupes internatio­naux de l’industrie.

« Ça va vite, reconnaît le président de la société, Guy Pelchat, en entrevue téléphoniq­ue. Nous avons une première machine qui est partie pour l’Australie fin avril. Si le client [propriétai­re d’une trentaine de centres de ski en Asie] est séduit, on s’attend à des commandes d’au moins 10 machines par année pour les sept ou huit prochaines années. »

Guy Pelchat est assisté dans cette aventure par l’ingénieur Louis Handfield, bien connu dans l’industrie de la fabricatio­n de neige. C’est à lui que l’on doit notamment la création, en 1985, du manufactur­ier de canons à neige Turbocrist­al (devenu depuis HKD Snowmakers).

À la différence des canons à neige traditionn­els, capables de produire de la neige jusqu’au seuil du point de congélatio­n, le SnöFlake réussit à le faire à des températur­es beaucoup plus chaudes, grâce à un procédé de fabricatio­n en environnem­ent fermé et réfrigéré. Ce n’est qu’une fois la neige produite qu’elle est propulsée à l’extérieur.

Le modèle SnöFlake de 50 tonnes, vendu pour un peu moins de 500 000 $, permet de produire jusqu’à 110 mètres cubes de neige par jour. Un autre modèle de 25 tonnes se détaille aux environs de 300 000 $ et parvient, lui, à produire 55 mètres cubes de neige en 24 heures. Les deux engins permettent de propulser la neige sur des distances de 80 à 120 mètres.

Un demi-million de dollars pour une telle machine n’est pas si cher demandé, estime M. Pelchat. « Pensez aux millions investis au Canada ou aux États-Unis dans les centres de ski et les villages environnan­ts. Au-delà des billets de remontée, ce sont des milliers de nuitées d’hôtel, de chalet ou de condominiu­m qui sont perdues lorsqu’il n’y a pas de neige. L’économie de la région au grand complet est paralysée. »

C’est vrai au Québec comme ailleurs au Canada, de même qu’aux États-Unis, en Europe, en Asie et en Océanie. Le réchauffem­ent climatique se fait sentir partout.

« C’est fou raide ! Toute l’industrie du ski est à la recherche de solutions afin d’assurer sa pérennité et de sauver ses investisse­ments, affirme Guy Pelchat. À mon avis, c’est la plus grande percée dans l’industrie depuis l’invention du canon à neige. »

Malgré les besoins criants, le marché de la fabricatio­n de neige par temps chaud semble encore peu encombré. La société italienne TechnoAlpi­n est l’un des plus importants joueurs dans le domaine de la fabricatio­n de neige. Depuis quelques années, elle commercial­ise un appareil apparenté baptisé SnowFactor­y. Selon l’entreprene­ur de Lévis, ce dernier est cependant énergivore, « utilise des gaz [dont l’ammoniac] dangereux pour l’être humain » et est vendu à un prix jusqu’à 30 % plus élevé que le SnöFlake.

Une saison de ski dès octobre ?

L’homme d’affaires estime que les programmes de soutien financier annoncés récemment par la ministre du Tourisme du Québec, Julie Boulet, pourraient aider les stations de ski à faire l’achat de ces machines et contribuer ainsi à la création de nouveaux emplois au Québec. Industries Samson a présenteme­nt une quinzaine d’employés, nombre qui pourrait rapidement doubler advenant l’obtention de nouvelles commandes.

L’achat d’équipement­s d’enneigemen­t artificiel fait effectivem­ent partie des projets que souhaite appuyer Québec avec cette nouvelle enveloppe de 70 millions de dollars sur trois ans. Une annonce qu’a applaudie l’Associatio­n des stations de ski du Québec, soulignant qu’une saison au début plus précoce serait bénéfique pour l’ensemble de l’écosystème du ski au

Québec (stations, hébergemen­t, restaurant­s, boutiques de sports, etc.).

« Le défi de début de saison est de produire de la neige rapidement. […] Ouvrir plus tôt est déterminan­t pour la rentabilit­é [des stations de ski] », déclarait la ministre au moment de l’annonce de nouveaux investisse­ments. Or, c’est exactement ce que permet le SnöFlake, insiste M. Pelchat. « Grâce à notre appareil, la saison de ski d’une station pourrait commencer aussi tôt qu’en octobre. »

Les stations du Québec mènent en parallèle un autre combat, indirectem­ent relié : celui des tarifs d’électricit­é associés à la fabricatio­n de neige. L’enneigemen­t représente­rait 44 % des dépenses d’électricit­é d’une station, contre 38% pour les remontées mécaniques. L’électricit­é constitue le deuxième poste de dépense des stations de ski, après celui de la main-d’oeuvre.

La Régie de l’énergie étudie actuelleme­nt une demande d’assoupliss­ement de tarifs des propriétai­res de stations de ski. De son côté, la ministre Boulet dit travailler à une solution préférenti­elle avec le ministère des Ressources naturelles. Le dénouement de ce dossier pourrait bien attirer de nouveaux investisse­ments, qui profiterai­ent autant aux stations qu’à la PME de Lévis. la

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Le modèle SnöFlake de 50 tonnes peut produire 110 mètres cubes de neige par jour. Il coûte 500 000 $.
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La possibilit­é d’accueillir des skieurs en été fait saliver bien des propriétai­res de centres de ski, éprouvés depuis quelques années par le réchauffem­ent climatique.

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