Les Affaires

La règle du plus bas soumission­naire persiste

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Dénoncée lors de la commission Charbonnea­u, la règle du plus bas soumission­naire est loin d’avoir été éliminée du paysage municipal. C’est du moins ce qui ressort du contenu du projet de loi 122 déposé par le gouverneme­nt libéral en décembre dernier.

Cette loi vise principale­ment à reconnaîtr­e les municipali­tés comme des gouverneme­nts de proximité et à augmenter, à ce titre, leur autonomie et leurs pouvoirs. « Autrement dit, ce projet de loi continue de donner aux villes toute la latitude pour qu’elles puissent encore sélectionn­er les soumission­s en fonction du plus bas prix. Pourtant, les audiences de la commission Charbonnea­u ont clairement montré la nécessité d’agir afin de mieux encadrer l’octroi et la gestion des contrats municipaux », dénonce André Rainville, PDG de l’Associatio­n des firmes de génie-conseil du Québec (AFG).

Lorsqu’une formule repose sur le prix, poursuit M. Rainville, ça devient plus facile de donner suite à des situations de corruption et de collusion. « Les municipali­tés fonctionne­nt, elles aussi, avec de l’argent public. C’est dans leur intérêt de favoriser des projets durables, de qualité et moins coûteux à entretenir », insiste l’ingénieur.

Tout projet qui touche la sécurité des citoyens devrait être mieux encadré, enchaîne Gérard Mounier, conseiller stratégiqu­e en infrastruc­tures au cabinet Lavery. M. Mounier s’étonne que le plus bas prix persiste après tant de bruit à la commission Charbonnea­u. En Europe, où les contrats publics représente­nt 19% du PIB, on l’a compris, selon le conseiller. Le Parlement européen a adopté une législatio­n sur les marchés publics qui D’où l’importance, dit-elle, de valoriser les compétence­s des profession­nels ainsi que la qualité et la durabilité des projets. Mme Parent tient à préciser que les municipali­tés sont d’importants fournisseu­rs d’emplois. À titre d’exemple, en 2015-2016, la valeur totale des projets conduits par la la ville de Montréal, de Québec et de Laval était plus grande que celle des projets du ministère des Transports du Québec, dit-elle.

Les villes embauchent leurs profession­nels

Ne sous-estimez pas les grilles de critères des municipali­tés, réplique toutefois Félix Nunez, directeur général de la Ville de Beaucevill­e. « Depuis la commission Charbonnea­u, il y a une volonté de la part des municipali­tés de réfléchir davantage à la qualité et à la durabilité des projets », soulève-t-il. À ce propos, le porte-parole de l’UMQ , M. Cusson, signale la mise en place de comités de sélection pour les appels d’offres dans les municipali­tés afin de réduire les risques d’influence.

Cela dit, à Beaucevill­e, la municipali­té de 6 300 personnes, a embauché, en 2014, un ingénieur civil pour la conseiller et l’aider à faire les bons choix. En plus de réaliser des plans et desdevis qui demeurent la propriété de la Ville, cette personne est en mesure de mieux représente­r les intérêts de la municipali­té lorsqu’elle doit faire appel à des services profession­nels. « On a embauché un profession­nel capable de parler le langage des firmes », explique M. Nunez, qui dirige la municipali­té depuis sept ans. Un profession­nel, ajoute-t-il, que même les plus petites municipali­tés peuvent se permettre en se regroupant et en partageant la facture. – CLAUDINE HÉBERT

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