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Héritage : votre enfant aux États-Unis sera-t-il imposé ?

- Investir Stéphane Rolland stephane.rolland@tc.tc srolland_la Selon l’État de résidence associé en fiscalité américaine chez Richter

Votre enfant est parti faire carrière aux États-Unis. L’héritage que vous lui léguerez sera-t-il visé par le fisc américain ? Un fier père nous a posé la question. Robert Chayer, associé en fiscalité américaine chez Richter, nous explique les principale­s règles fiscales en cause dans ce genre de situation.

La réponse dépendra de nombreux facteurs, précise l’expert, qui a enseigné la fiscalité américaine à l’Université de Sherbrooke et à HEC Montréal. L’État où réside l’enfant et la provenance géographiq­ue des biens légués sont deux facteurs qui influeront sur le traitement fiscal de l’héritage. Chaque cas est unique. Même si nous lui exposons les règles générales, notre lecteur devrait faire appel à un fiscaliste pour interpréte­r les subtilités inhérentes à sa situation, conseille M. Chayer. Il y a trois manières d’imposer l’héritage aux États-Unis, selon l’État où l’on a sa résidence fiscale, explique M. Chayer. La première est le droit de succession ( estate tax), où l’impôt est payé par la succession, c’est-à-dire dans la déclaratio­n de la personne décédée. C’est le système en vigueur au gouverneme­nt fédéral des États-Unis et dans 15 États américains.

La deuxième est la taxe successora­le ( inheritanc­e tax). Dans ce cas, l’héritier est visé par l’impôt. Si votre enfant réside dans l’un des six États où elle est appliquée, il sera visé par la taxe successora­le de l’État en question et pourrait devoir payer un impôt.

Finalement, les autres États, soit la majorité, n’ont pas d’impôt sur l’héritage. Ni la succession ni les héritiers ne sont touchés dans ce cas. Notons que les droits successora­ux fédéraux demeurent, peu importe l’État de résidence.

Au bout du compte, peu d’expatriés québécois sont susceptibl­es d’être visés par la taxe successora­le, car elle n’est « généraleme­nt » pas en vigueur dans leur terre d’accueil, estime M. Chayer. Les six États qui l’imposent sont le Nebraska, l’Iowa, la Pennsylvan­ie, le Kentucky, le Maryland et le New Jersey. Notez que, pour les deux derniers, la taxe successora­le et le droit de succession cohabitent.

Les destinatio­ns les plus prisées des Québécois soit imposent l’héritage par l’intermédia­ire de la succession, comme c’est le cas à New York, où réside l’enfant de notre lecteur, soit n’ont tout simplement pas d’impôt sur l’héritage, comme c’est le cas en Floride, au Texas et en Californie.

Avez-vous des biens américains ?

Si l’héritier ne doit pas payer d’impôt, la succession peut toujours être visée par le fisc américain. Le volet qui suit ne touche pas seulement notre lecteur, mais tous les Canadiens qui détiennent des biens américains au décès, peu importe la résidence fiscale de leur héritier.

En fait, les biens américains sont visés par les droits successora­ux du gouverneme­nt fédéral américain, explique M. Chayer. Lorsqu’on parle de biens américains, on pense évidemment à la copropriét­é en Floride ou à tout autre terrain ou immeuble, mais il y a plus… Les actions américaine­s sont elles aussi concernées, prévient le fiscaliste.

La règle s’applique également aux titres américains détenus dans un compte enregistré, comme un régime enregistré d’épargne-retraite (REER) ou un compte d’épargne libre d’impôt (CELI). Par contre, un fonds canadien d’actions américaine­s est considéré comme une valeur mobilière canadienne. « Votre action d’IBM est visée, mais pas votre fonds commun d’actions américaine­s de la Banque RBC », cite en exemple M. Chayer.

Être visé par les règles ne veut pas dire qu’il y aura de l’impôt à payer, nuance l’expert. « Généraleme­nt, si la valeur des biens américains est inférieure à 60 000 $ US, il n’y aura pas de déclaratio­n à produire, affirme-t-il. Si le montant est supérieur, vous aurez l’obligation de remplir une déclaratio­n, mais, encore là, ça ne veut pas dire qu’il y aura de l’impôt à payer. »

En raison d’une convention fiscale entre le Canada et les États-Unis, les Canadiens peuvent être exemptés de payer de l’impôt sur la succession si leur avoir total (dans le monde) est inférieur à environ 5,5 millions de dollars américains. « Ce sera le cas pour beaucoup de Québécois, note l’expert. Ils auront une déclaratio­n à remplir, mais ne paieront pas d’impôt aux États-Unis. »

Précisons que les principes que nous vous avons présentés sont différents si la personne qui décède est un citoyen ou un résident fiscal américain, ce qui n’est pas le cas de notre lecteur. Et attention, la citoyennet­é américaine n’est parfois pas aussi évidente qu’elle en a l’air. « Dans ma pratique, j’ai vu tellement de choses surprenant­es, raconte l’expert. Bien des firmes ont appris que leur client était américain même s’il s’appelait Roger Tremblay, parce qu’il était né aux États-Unis de parents canadiens ou pour toute autre raison. »

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