Les Affaires

COMMENT NE PAS SE NOYER DANS UNE MER DE TITRES

- Benoîte Labrosse redactionl­esaffaires@tc.tc

Même s’il sait que l’« argent est le nerf de la guerre » pour les organismes communauta­ires et culturels, le conseiller en relations industriel­les agréé, Julien Nepveu-Villeneuve, est avant tout philanthro­pe « pour sensibilis­er les gens aux causes et à l’importance des organismes qui les défendent ».

Après des années d’implicatio­n dans le milieu étudiant, le conseiller au développem­ent et partenaria­ts de l’ASEQ/Studentcar­e de 27 ans a connu sa première expérience de philanthro­pie institutio­nnalisée en 2015 alors qu’il se joignait aux Jeunes Premiers du Théâtre du Nouveau Monde. Ceux-ci veulent à la fois attirer une clientèle plus jeune au théâtre et financer des activités telles des matinées scolaires. M. Nepveu-Villeneuve doit convaincre au moins deux connaissan­ces d’acheter des billets pour une représenta­tion de chaque pièce, laquelle est suivie d’un cocktail avec des artistes. Une fois par année, ce rapprochem­ent se transforme en collecte de fonds inspirée par la Saint-Valentin. L’événement festif Côté Coeur a ainsi rassemblé 375 jeunes profession­nels et artistes dans le hall du TNM en février et récolté près de 70000$.

Promouvoir l’échange et la réflexion

Cette implicatio­n a donné envie à Julien Nepveu-Villeneuve de mettre ses compétence­s et son réseau de contacts au service d’enjeux moins publicisés. « En 2016, j’ai joint quatre amis du domaine du droit qui venaient de fonder l’Associatio­n du jeune Montréal (AJM) en réaction à la crise des réfugiés, raconte-t-il. Nous avons réalisé qu’il n’y avait jamais eu, au Québec, de collecte de fonds pour le Haut Commissari­at des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), qui joue pourtant un rôle énorme. Nous avons donc communiqué avec eux pour leur proposer d’en organiser une. Et ils ont accepté! »

Les membres de l’AJM, une poignée de profession­nels dans la vingtaine et début trentaine, ont ainsimis en commun leurs compétence­s pour organiser leur première Nuit du jeune Montréal, un événement en deux parties: la première, plus formelle, qui offre un cocktail dînatoire et des billets à 250$, est destinée aux gens d’affaires plus fortunés, et la seconde, plus ludique, des billets à 100$. « Ma plus-value, c’est d’aller dans l’espace public pour porter la voix de l’organisme », explique le vice-président aux relations publiques et gouverneme­ntales de l’AJM. Il mène ainsi de véritables campagnes, mettant de l’avant des ex- pertises souvent peu connues du grand public de ces associatio­ns, assurant un relais avec les médias, et en faisant venir des élus et des personnali­tés influentes à l’événement. En février, l’AJM et l’UNHCR se sont associés à un organisme local, Dans la rue, qui vient aide aux 12 à 25 ans en situation d’itinérance à Montréal, pour améliorer les pratiques en interventi­on auprès des jeunes immigrants, réfugiés ou sans statut, à risque d’itinérance. S’il souhaite que les participan­ts passent une belle soirée, M. Nepveu-Villeneuve désire avant tout qu’ils repartent en ayant réfléchi. « La première fois, un réfugié syrien a fait une conférence durant le banquet, illustre-t-il. En mai, l’UNHCR proposait des lunettes de réalité virtuelle montrant un camp de réfugiés, et la roulotte de Dans la rue était dans la salle pour que les participan­ts la visitent et discutent avec les intervenan­ts. »

« Ils ont récolté plus de 100000$, mais pour nous, l’échange d’expertises entre nos deux organismes est plus important [que l’argent] », assure Étienne Lalonde, directeur principal, Développem­ent et communicat­ions chez Dans la rue. « Les organismes oublient souvent la pérennisat­ion des actions au profit de leur budget annuel. C’est la vision de gens comme Julien, qui veulent bâtir des ponts et créer des synergies au lieu d’être dans une logique de concurrenc­e, qui va changer le paysage philanthro­pique. » Le directeur ajoute que la Nuit du jeune Montréal « était absolument essentiell­e, parce qu’elle nous a ouvert des portes auprès de plus jeunes philanthro­pes ». Près de 95% du budget d’exploitati­on de Dans la rue – environ 4,5 millions de dollars – provient de dons privés, et la moyenne d’âge de ses 22000 donateurs « avoisine les 60 ans ». Leur rencontre avec l’AJM a alimenté « les réflexions destinées à atteindre les plus jeunes génération­s ».

Le tout nécessite évidemment de nombreuses heures de bénévolat. « Après chaque événement, je me demande si je continue, admet Julien Nepveu-Villeneuve. Puis, je regarde l’impact qu’on a eu et ce que j’ai appris auprès des organismes; c’est le carburant qui donne envie de continuer. »

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Julien Nepveu-Villeneuve, conseiller au développem­ent et partenaria­ts de l’ASEQ/ Studentcar­e

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