Les Affaires

François Pouliot

Des prix plus élevés ont grandement contribué à transporte­r la rentabilit­é de Dollarama. Il y a ici un potentiel important et une recette déjà éprouvée.

- François Pouliot françois.pouliot@tc.tc Chroniqueu­r | f_pouliot

Dollarama, Dollar General ou Dollar Tree ?

Qui peut résister à Amazon? C’est la question que pose notre collègue Stéphane Rolland dans le dossier de cette semaine. Au premier chef, vient un nom: Dollarama. Amazon pourra difficilem­ent pénétrer le marché des items à petits prix, croient la plupart des analystes. Pour quelques raisons, mais une en particulie­r.

Le créneau en est un où la facture moyenne du client est peu élevée. Une fois les frais postaux payés, il ne resterait pas suffisamme­nt d’argent pour Amazon.

Le titre de Dollarama doit-il pour autant être intégré au portefeuil­le?

L’idée nous est venue d’y jeter un coup d’oeil, tout en intégrant dans la réflexion ceux de Dollar General et de Dollar Tree.

Dollarama (DOL, 153,95$): le soleil brille-til trop fort?

S’attarder à l’histoire de Dollarama, c’est étudier un parcours presque parfait. Dans les huit dernières années, la valeur de la société a été multipliée par 16, le titre passant de 9,70$ à plus de 158$. Comment y est-on parvenu? Essentiell­ement, en ouvrant de nouveaux magasins, en contrôlant les dépenses, et en introduisa­nt de nouveaux produits qui affichent des prix au-delà du 1$ (jusqu’à 3,50$ - 4$ actuelleme­nt).

La stratégie de prix semble avoir été particuliè­rement lucrative en ce qu’elle a permis d’augmenter la valeur des achats par client, les marges, et de mieux gérer les fluctuatio­ns du dollar canadien (plus de 50% des achats de Dollarama viennent de Chine et s’effectuent en dollars américain).

Sur le plan fondamenta­l, les perspectiv­es continuent d’être bonnes.

Un récent coup de sonde de BMO Marchés des capitaux conclut que le client moyen du Dollarama ne sera vraisembla­blement pas tenté de chercher meilleur prix pour un item chez Wal-Mart ou Canadian Tire avant que celui-ci n’atteigne 6$.Et, encore là, la tentation sera apparemmen­t assez faible.

Après avoir affirmé qu’elle voyait un potentiel de 1 400 établissem­ents au Canada, la direction parle aussi maintenant d’une possibilit­é de 1700 sur un horizon de huit à dix ans. C’est dire que le nombre de magasins pourrait encore augmenter de plus de 50%.

Bonnes perspectiv­es, mais il y a un « mais » : la route semble trop ensoleillé­e. Il n’y a guère de place à l’erreur.

L’action se négocie à 30 fois le bénéfice anticipé en janvier 2019. Il est difficile de voir comment ce multiple peut encore prendre de l’expansion. Certains font valoir que le projet de ventes de gros en ligne générera plus de croissance, mais ça reste à voir. De plus, avec le salaire minimum qui augmente en Ontario (40% des magasins du réseau), il n’est pas impossible que les bénéfices ratent la cible à un moment ou à un autre.

Il n’y a aucun doute que, sur le terrain, Dollarama sera encore un grand succès dans les années à venir. En Bourse, il n’est cependant pas certain que le moment soit le mieux choisi pour acheter.

Dollar General (DG, 87,56$ US)

Plus rapidement ici. Non pas que le détaillant américain soit sans intérêt, m ais comparer le Général du Dollar à Dollarama n’est pas loin de comparer des pommes avec des oranges.

La Wells Fargo estime que près du trois quarts des ventes de la bannière proviennen­t de la nourriture et de consommabl­es. En d’autres mots, on parle davantage ici d’une petite épicerie qui vise une clientèle peu en moyen. Rappelons que Dollarama vise cette clientèle, mais aussi celle beaucoup plus large des chasseurs de trésor.

Les grands escompteur­s que sont Wal-Mart et Target bataillent férocement en épicerie. Ce sont des adversaire­s de taille sur le terrain.

La direction croit pouvoir faire croître le bénéfice de 10% par année et vient de faire passer la cadence de ses ouvertures de magasins de 600-700par année à 1000. Le scénario est possible, mais on a de la difficulté à y croire.

Le titre est à 17 fois le bénéfice anticipé dans les prochains 12 mois. C’est raisonnabl­e si la croissance espérée est atteinte. La maxime dit toutefois: dans le doute, abstiens-toi.

Dollar Tree (DLTR, 102,04$ US)

L’action la plus intéressan­te des trois, à nos yeux. Pour quelques motifs.

Le potentiel d’ajout de nouveaux établissem­ents est à première vue limité. La cible de la direction était pour un réseau de 8000 magasins dans les prochaines années, alors qu’il y en a déjà 6 360.

On dit « était », car, depuis l’acquisitio­n de Family Dollar, l’an dernier, elle parle plutôt d’un potentiel d’entités combiné de 26000 établissem­ents (alors qu’il est actuelleme­nt de 14600).

Cette acquisitio­n connaît actuelleme­nt des problèmes d’intégratio­n. Les ventes comparable­s des établissem­ents Family Dollar vont en dents de scie, et présentent des marches arrière et des marches avant, dépendamme­nt du trimestre.

C’est en soi une intéressan­te occasion de redresseme­nt.

D’autant que les flux de trésorerie sont importants. La dette, qui était à 5,2 fois le BAIIA à la fin de 2015, devrait être ramenée à 3,5 fois au début de 2018. Il est probable que la société récupère à ce moment sa cote de crédit « investisse­ment ». Qui réduit sa dette, transfère généraleme­nt une bonne partie de cette valeur à l’actionnair­e.

Le grand motif pour aimer Dollar Tree est cependant ceci : les produits vendus dans ses magasins (excluant Family Dollar) ne sont toujours qu’à 1 $ US. Histoire de bien marquer la différenci­ation avec les pharmacien­s et les supermarch­és.

On a vu plus haut que des prix plus élevés avaient grandement contribué à transporte­r la rentabilit­é de Dollarama. Il y a ici un potentiel important et une recette déjà éprouvée.

Le titre est à 18,5 fois le consensus des 12 prochains mois. C’est un peu élevé, mais le rapport risque/rendement sur cinq ans apparaît plus intéressan­t qu’ailleurs.

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