DOLLARAMA : UN PRIX IMBATTABLE, MAIS UN MULTIPLE COÛTEUX
L’année 2017 aura été celle de l’«effet Amazon». À lui seul, le géant du commerce électronique accapare entre 40% et 50% de la croissance des ventes au détail aux États-Unis, selon une estimation de Morgan Stanley. Qui pourra résister à l’attaque? Nous év
Vous souhaitez concurrencer Dollarama sur le Web? Bonne chance! Les prix de ses items vendus entre 1$ et 4$ sont tellement bas qu’il est difficile d’imaginer un détaillant en ligne jouer dans les talles de l’entreprise montréalaise, selon les experts que nous avons consultés.
Le modèle d’affaires de Dollarama semble inattaquable pour Amazon, croit Pierre-Olivier Langevin. Le gestionnaire de portefeuille de Medici, à Saint-Bruno, fait un calcul approximatif pour illustrer son propos. Pour un panier de 15$, Dollarama générerait un bénéfice d’un peu moins de 6$ (étant donné qu’elle a affiché une marge brute de 39,6% au deuxième trimestre). «Les frais de livraison vont gruger les profits que voudrait faire Amazon, explique-t-il. Cela ne correspond pas à sa stratégie d’encourager les commandes d’une plus grande valeur pour rentabiliser les frais de livraison.»
On ne magasine pas chez Dollarama ou Amazon pour les mêmes raisons, poursuit Philippe Pratte, président de Pratte Gestion de portefeuilles, à Gatineau. «Ils ne visent pas le même segment de marché, précise le gestionnaire de portefeuille. Les acheteurs de Dollarama sont des chasseurs d’aubaines, qui ne voudront pas payer pour les frais de livraison. La grande motivation d’aller sur Amazon n’est pas le prix, mais la facilité d’utilisation.»
Toujours attrayants?
Le hic, c’est que l’attrait du modèle d’affaires n’est pas passé inaperçu. Le titre a gagné 53% depuis le début de l’année et 368% depuis cinq ans. L’action s’échange à 30 fois les prévisions de bénéfice de l’an prochain. Reste-t-il encore de l’espace pour la croissance?
Irene Nattel, de RBC Marchés des capitaux, pense que oui. La progression des ventes comparables, une donnée clé pour mesurer la croissance interne d’un détaillant, devrait maintenir le rythme annuel d’au moins 4% au cours des cinq prochaines années, croit-elle. En continuant d’agrandir son offre d’items à prix plus élevés, il est «réaliste» de croire que le prix du panier moyen pourrait passer de 10$ à 12$ d’ici cinq ans, estime-t-elle. Mme Nattel a une recommandation «surperformance» et une cible de 143$ sur le titre.
Son opinion rejoint celle de la majorité de ses collègues. Sur 17 analystes, 12 suggèrent d’acheter l’action et cinq conseillent plutôt de la conserver. Leur cours cible moyen est de 146,93$. M. Pratte pense, lui aussi, qu’il reste des avenues de croissance. Il souligne que Dollarama continue d’ouvrir de nouveaux magasins. Leur nombre, qui était de 1 125 au 30 juillet, pourrait s’établir à 1 700 d’ici huit à dix ans, selon les objectifs de la direction. «Sur un repli, je serais très à l’aise à d’acheter, mais, pour l’instant, le titre semble bien évalué », affirme-t-il.
Brian Morrison, de Valeurs mobilières TD, invite également à la prudence. Il aime le modèle d’affaires. Il croit même que les résultats de Dollarama atteindront ses prévisions les plus optimistes d’ici l’exercice 2020. Cependant, il faudrait que le détaillant dépasse considérablement ses attentes pour que le titre continue sur sa lancée. Il attend donc une correction avant de bonifier sa recommandation «conserver». Sa cible est à 150$.
Dans le passé, la prudence était le mauvais pari à faire sur Dollarma, concède Keith Howlett, de Desjardins Marché des capitaux, qui s’est rallié au consensus en septembre. L’analyste anticipait une croissance du bénéfice par action de l’ordre de 15% à 20%, ce qui était «une erreur systématique dans nos prévisions», reconnaît-il. La progression a plutôt été de 25% au cours des cinq dernières années. Il a fait passer sa recommandation de «conserver» à «achat». Sa cible est à 154$.