Le capital de risque au Québec : l’essor des fonds ultra-spécialisés
Le principal défi des entreprises est la pénurie de main-d’oeuvre et le plan du Parti libéral du Québec (PLQ) est le seul qui permettra d’aider les employeurs à affronter le manque de travailleurs, plaide son chef Philippe Couillard. Réduire le nombre d’immigrants ne ferait qu’aggraver les choses, prévient-il.
« Est-ce qu’il est logique de proposer de réduire le nombre de travailleurs qui viennent d’ailleurs ? C’est non seulement absurde, c’est antiéconomique. C’est une des pires mesures économiques qui ait été présentée récemment », fait-il valoir en entrevue.
Près de 110000 postes sont restés vacants au Québec au deuxième trimestre de l’année 2018, selon des données de la Fédération canadienne des entreprises indépendantes (FCEI). Sur le terrain, M. Couillard dit voir les effets concrets de cette statistique. « On est rendu à un point si critique, que la pénurie touche les travailleurs spécialisés et non spécialisés. Les manoeuvres d’usines sont en demande partout. Vous avez de petits commerces de détail qui ne sont pas capables de commencer leur journée [car il n’y a pas d’employés]. De voir un parti politique qui ne juge pas cette question essentielle, moi, je ne comprends pas », dit-il sans nommer directement ses opposants.
M. Couillard se défend d’avoir négligé l’intégration des immigrants, comme le lui reprochent la CAQ et le PQ. Il souligne les mesures que prévoit son programme. Le parti veut déployer près de 135 millions de dollars sur cinq ans pour soutenir l’intégration, notamment en encourageant la francisation en entreprise et en aidant les municipalités à mieux planifier l’immigration économique.
Finances publiques : pas d’autres choix possibles à l’époque
En entrevue, M. Couillard se targue d’avoir rétabli la santé des finances publiques, ce qui a contribué à augmenter la confiance des entreprises, selon lui. Il rejette les critiques de ses trois principaux adversaires, qui jugent que l’atteinte de l’équilibre s’est fait au détriment des services à la population en santé et en éducation. « On n’a pas coupé, on a ralenti la croissance des dépenses budgétaires. On n’a jamais diminué le poids des dépenses publiques par rapport au PIB en bas de sa moyenne historique. La soi-disant austérité, elle n’a jamais existé au Québec. »
Certains soutiennent que le gouvernement a été trop agressif dans sa quête de l’équilibre budgétaire pour ensuite redistribuer des « cadeaux » sous forme de baisses d’impôts et de promesses de nouvelles dépenses électorales.
Philippe Couillard se défend d’avoir agi stratégiquement sur le plan politique.
« Écoutez, on était dans le trou de 7 milliards de dollars [au moment de prendre le pouvoir]; les gens oublient vite, insiste-t-il. C’est majeur comme impasse budgétaire. On était à la veille d’être décoté. Une des premières choses que j’ai dû faire est de téléphoner aux dirigeants des agences de crédit pour leur demander de nous faire confiance, qu’on rétablirait l’équilibre budgétaire. Si on avait été décoté, ça aurait été catastrophique pour les finances publiques du Québec. Ce sont des centaines de millions de plus en paiement d’intérêt. »
D’autres baisses d’impôt?
S’il obtient un deuxième mandat, M. Couillard priorisera les investissements publics avant d’annoncer de nouvelles baisses d’impôt. Elles seraient accordées « seulement » s’il reste une marge de manoeuvre supplémentaire après l’adoption des promesses faites en campagne, que son parti chiffre à 2,4 G$. Il existe quelques mesures ciblées comme la promesse d’accorder un montant de 150$ à 300$ par enfant pour chaque famille.
Si aucune baisse d’impôt pour les entreprises n’a été communiquée en campagne, c’est que l’annonce a été faite juste avant cette dernière, nuance M. Couillard. Le gouvernement a annoncé un bouquet de mesures totalisant 863M$ sur cinq ans pour contrer la guerre tarifaire. Parmi ces mesures, on compte un devancement de la réduction de la cotisation au Fonds des services de santé sur la masse salariale (263 M$) ainsi qu’une bonification du crédit d’impôt à l’investissement (340 M$).
la Le Parti québécois (PQ) entend devenir le « gouvernement des PME » en réduisant leur fardeau administratif et en les aidant à exporter. S’il devient premier ministre, Jean-François Lisée s’attribuera la responsabilité des PME pour forcer l’administration publique à développer de meilleures relations avec les entrepreneurs, promet-il en entrevue avec Les Affaires.
« Il y a eu des progrès, mais il reste que le fardeau administratif représente 8 milliards de dollars de coûts pour l’ensemble des petites entreprises. Si on réduit ce fardeau du tiers ou de la moitié, on vient de réduire les coûts des entreprises sans avoir à alléger leur fardeau fiscal », affirme-t-il.
La culture au sein de l’administration publique doit changer en ce qui concerne les relations avec les PME. Plutôt que de chercher à pincer les entrepreneurs qui démarrent une entreprise, les organismes gouvernementaux devraient plutôt les aider à respecter les règles, qui peuvent être complexes pour quelqu’un qui se lance en affaires, juge celui qui était ministre des Relations internationales, de la Francophonie et du Commerce extérieur dans le gouvernement Marois. Il souhaite aussi que la délivrance de permis et de certificats se fasse plus rapidement, tout en s’assurant du respect des lois.
D’autres mesures s’adressent aux PME. Parmi elles, le PQ veut contraindre les grandes entreprises à payer leurs fournisseurs (souvent de plus petites entreprises) dans un délai de 30 jours. On veut aussi adopter un crédit d’impôt pour encourager les entreprises québécoises à augmenter leurs revenus à l’étranger.
Une Caisse de dépôt plus interventionniste
Parce qu’il estime que le gouvernement Couillard a fait montre d’une « absence de réflexe national », M. Lisée veut remettre le développement économique du Québec au sein de la mission de la Caisse de dépôt et placement du Québec, au côté de la création de rendement pour ses déposants. La loi qui régit la Caisse serait modifiée pour que le développement national, régional et sectoriel fasse partie de sa mission.
Une clause touchant la protection des sièges sociaux serait également ajoutée. Pour les investissements dans du matériel roulant, on imposera à la Caisse de s’assurer qu’il y a un minimum de 30% de contenu québécois dans le projet. M. Lisée déplore que ce n’ait pas été le cas pour le Réseau express métropolitain (REM). « Ça se fait partout ailleurs. Sur le contenu local, les libéraux sont les idiots de la classe, car tout le monde a compris. »
Malgré ces critères, la direction de la Caisse conservera son indépendance, assure M. Lisée. Elle pourra toujours décider en fonction des meilleurs investissements pour les déposants, mais elle devra tenir compte de sa nouvelle mission, précise le chef du PQ.
Le Fonds des générations serait aussi appelé à contribuer au développement économique du Québec. M. Lisée n’a pas l’intention de changer la raison d’être du Fonds, qui est de contribuer à la réduction de la dette du Québec. Ses actifs et les versements prévus seront maintenus. Par contre, 10% des nouveaux ver- sements devront être dirigés vers des projets « structurants » pour le Québec.
Salaire des PDG
Un gouvernement péquiste punirait les sociétés inscrites en Bourse qui verseraient une rémunération « déraisonnable » à leurs cinq dirigeants les mieux payés.
Une « taxe glouton » serait imposée à l’excédent des rémunérations qui dépassera le ratio de 30 fois le salaire médian. Les entreprises recevront un préavis de deux ans. À la troisième année, la taxe sera de 10% de l’excédent et grimpera à 25% à la quatrième année.
Le PQ sera-t-il capable d’imposer cette taxe aux entreprises à charte fédérale? Une hésitation est perceptible. Nicolas Marceau, l’exministre des Finances, qui participe à l’entrevue, dit que ce serait « un peu plus complexe », mais qu’il y a « certainement » des façons de le faire, en changeant la Loi de l’impôt sur le revenu, notamment. « Puis, dans un deuxième mandat, comme on sera indépendant, la question ne se posera plus », ajoute M. Lisée.
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