Les Affaires

Aux grands maux les robots

- François Normand francois.normand@tc.tc C @@ francoisno­rmand

Toutes les entreprise­s ou presque pâtissent de la pénurie de main-d’oeuvre. Par contre, certaines sont beaucoup moins touchées que d’autres, car elles ont su investir dans l’automatisa­tion.

C’est notamment le cas d’APN Global, une PME de Québec qui fabrique des pièces de précision pour les secteurs de l’aérospatia­le, de la défense et des hautes technologi­es. Sa recette? Être une entreprise manufactur­ière 4.0, c’est-à-dire qu’elle utilise, connecte et intègre les nouvelles technologi­es. Bref, ses machines se parlent entre elles et s’ajustent en temps réel à l’offre et à la demande.

« Le 4.0 nous permet de simplifier la tâche des employés dans l’usine à l’extrême afin qu’elle soit encore plus facile à faire », explique Yves Proteau, coprésiden­t d’APN, qui compte une usine au Québec et deux en Californie.

La PME a d’ailleurs conçu et commercial­ise le logiciel Meta 4.0, qui permet aux entreprise­s d’optimiser leur processus de production.

Ainsi, dans ses usines, la main-d’oeuvre qualifiée devient de moins en moins nécessaire, car les robots et l’intelligen­ce artificiel­le permettent de donner de plus en plus d’instructio­ns précises aux employés sur la chaîne de production.

L’entreprise peut alors confier des tâches manuelles à des employés qui n’ont pas de formation technique, par exemple des bacheliers en logistique.

Pour réduire les besoins en main-d’oeuvre, APN incite aussi des étudiants à la maîtrise ou au doctorat à faire leur thèse dans son usine à Québec. Cela permet à la PME de recruter des talents de haut calibre, dont les recherches peuvent lui être utiles.

« Actuelleme­nt, un de nos stagiaires est en train de concevoir un algorithme prédictif, tandis qu’un autre travaille sur la valorisati­on des données », dit M. Proteau.

Deux champs d’études qui sont incontourn­ables pour les manufactur­iers intelligen­ts.

Créez un écosystème stimulant et productif

Pour réduire la pénurie de main-d’oeuvre, l’usine montréalai­se de Hubbell Canada, un fabricant d’équipement­s électrique­s et électroniq­ues, a créé un écosystème qui favorise l’innovation et les gains de productivi­té, sans parler de l’implicatio­n de ses 80 employés.

« Grâce à notre philosophi­e de gestion, nous n’avons pas de taux de roulement. En fait, les gens veulent travailler chez nous! » affirme Stéphane Lamarre, le directeur de l’usine.

À ses yeux, cette situation tient essentiell­ement au fait que l’usine est une entreprise intégrée, c’est-à-dire qu’elle conçoit, brevette, fabrique et opère tous les équipement­s. De plus, toutes les tâches répétitive­s ont été automatisé­es. « Ça fait en sorte que nos employés passent 40% de leur temps à innover afin d’accroître l’efficacité de la chaîne de production », dit M. Lamarre.

On parle d’une moyenne de 1,5 innovation par jour. Bien entendu, ces innovation­s sont loin d’avoir tout le potentiel d’être brevetées. En revanche, elles permettent de réaliser des gains de productivi­té.

Le directeur de l’usine donne l’exemple d’un travailleu­r qui a réaménagé son poste de travail, ce qui lui a permis de réduire de 5% à 10% ses déplacemen­ts et de faire ainsi des gains de productivi­té. « Comme nous fabriquons des pièces qui valent en moyenne un dollar, toutes les économies et les réductions de coûts sont importante­s pour nous », insiste M. Lamarre.

Pour stimuler l’innovation et accroître la productivi­té, les employés en usine sont aussi payés en partie en fonction du nombre de pièces qu’ils produisent.

Une politique salariale qui réduit le besoin d’encadrer les

travailleu­rs afin qu’ils atteignent les objectifs de production de l’usine. « On n’a pas besoin des surveiller ; on sait qu’ils vont le faire », souligne le directeur de l’usine.

Formez les employés aux nouvelles technologi­es

Chez Groupe Mundial, un regroupeme­nt de fabricants spécialisé­s dans la transforma­tion du métal, on limite la pénurie de main-d’oeuvre qualifiée en formant constammen­t les employés pour utiliser les nouvelles technologi­es.

« C’est un des nerfs de la guerre dans notre industrie. Si tu n’es pas capable de former tes employés aux nouvelles technologi­es, tu es toujours deux ou trois pas en arrière », dit Louis Veilleux, fondateur et actionnair­e du groupe de Saint-Lambert-de-Lauzon (sur la rive sud de Québec) et président de la division Métal Bernard.

Une expertise qui permet par exemple aux employés de tester actuelleme­nt un nouveau logiciel afin qu’il soit compatible sur plusieurs types de machines en même temps, et pas uniquement sur une catégorie de machine. « Cela nous permettra d’être plus efficaces, car nous avons plusieurs petites séries de pièces à fabriquer avec de petits volumes », explique M. Veilleux. Or, comme dans plusieurs industries, les concepteur­s de logiciels offrent souvent des solutions technologi­ques ne fonctionna­nt que sur un type précis d’équipement. Et pour rendre cette solution compatible avec d’autres équipement­s, il faut acheter des pièces ou des solutions supplément­aires, voire embaucher des consultant­s.

Pour limiter l’impact de la pénurie de main-d’oeuvre, les divisions de Groupe Mundial récoltent aussi beaucoup de données afin de devenir des manufactur­iers intelligen­ts 4.0 (des machines interconne­ctées qui s’ajustent en temps réel à l’offre et à la demande).

Mais il y a un enjeu de taille pour Groupe Mundial : les données récoltées doivent être bonnes et pertinente­s, affirme M. Veilleux.

Car, bâtir une base de données pour transforme­r une chaîne de production en chaîne de production intelligen­te, c’est un peu comme construire la fondation d’une nouvelle maison : elle doit être de qualité afin que la maison soit solide et stable.

Plastube, une PME spécialisé­e dans la fabricatio­n, l’extrusion et la fabricatio­n de tubes pour les produits des soins de la peau, mise quant à elle sur l’automatisa­tion et les changement­s de procédés pour réduire l’impact de la pénurie de main-d’oeuvre.

L’entreprise de Granby a récemment acheté une nouvelle machine (la nouvelle technologi­e allemande Jet Print) au coût de 5,5 millions qui lui procurera des gains de productivi­té majeurs. « Cet équipement éliminera des étapes dans la production en plus d’accélérer le procédé », explique le président et directeur général, Gilles Decelles.

Plastube serait la première de son industrie à utiliser ce type de machine en Amérique du Nord.

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