Les Affaires

La philanthro­pie et les communauté­s autochtone­s

- Simon Lord redactionl­esaffaires@tc.tc

Le secteur canadien de la philanthro­pie s’intéresse toujours peu aux Premières Nations. Les occasions sont pourtant bien présentes, en santé ou en éducation, par exemple. Comment changer la situation et faire d’une collaborat­ion un succès ?

Les données les plus récentes disponible­s indiquent qu’encore en 2013, les organismes de bienfaisan­ce axés sur les communauté­s autochtone­s représenta­ient environ 1 % du nombre total des « organismes de bienfaisan­ce » au Canada, selon le rapport «Measuring the Circle 2017» du Cercle sur la philanthro­pie et les peuples autochtone­s au Canada (CPPAC). D’autres données, celles-là de 2011, indiquent que 6 % seulement des fondations subvention­naires canadienne­s ont offert des dons à des organismes de bienfaisan­ce intervenan­t auprès de communauté­s autochtone­s. Les choses sont-elles bien différente­s aujourd’hui ? Sara Lyons, la présidente du conseil du CPPAC, estime que les fondations canadienne­s sont toujours peu impliquées auprès des organismes qui intervienn­ent dans les communauté­s autochtone­s. Les raisons sont multiples. « Il y a d’abord une question de proximité sociale, dit-elle. Souvent, les gens des fondations et des organismes ne fréquenten­t pas les mêmes cercles sociaux. »

Les organismes autochtone­s désirent aussi souvent jouir d’une grande autonomie dans la gestion des ressources qui leur sont attribuées, ce qui est parfois contraire au fonctionne­ment des fondations. Une démarche différente Quelle est la clé pour permettre à une fondation d’entreprend­re une bonne initiative philanthro­pique dans une communauté autochtone ?

D’abord, la démarche gagne à être adaptée aux façons de faire locales. La plupart des communauté­s autochtone­s ne cherchent pas à établir « une relation à sens unique ». Elles désirent plutôt prendre le temps de laisser les relations se développer, explique Mme Lyons, de sorte, entre autres, que les enjeux locaux sont mieux connus et compris.

Les questions de l’autonomie ainsi que du partage des pouvoirs et des ressources sont également importante­s, explique Juniper Glass, chercheure au Philab de l’UQAM. « Rappelons-nous que, dans le passé, les pensionnat­s autochtone­s étaient gérés par des organismes de bienfaisan­ce, dit-elle. Il existe donc des raisons historique­s pour les communauté­s autochtone­s de réfléchir au- jourd’hui attentivem­ent avant de s’associer avec de tels organismes. »

Travailler de concert

Depuis deux ans, l’Orchestre Symphoniqu­e de Longueuil (OSDL) s’implique auprès des Premières Nations de Kahnawake. Il y a mis sur pied un programme d’éveil musical, similaire à ceux qu’il organise depuis 25 ans dans différente­s villes et collectivi­tés de la Rive-Sud, visant à initier les jeunes à la musique classique et à mettre en valeur la richesse patrimonia­le, culturelle et artistique de cette communauté.

« La mission de l’orchestre est d’aller à la rencontre de toutes les communauté­s de notre région pour rendre la musique accessible à tous », dit Marc David, le chef attitré de l’OSDL. En 2017, 35 jeunes étaient donc présents sur scène avec l’orchestre. Ce nombre est passé à 50 en 2018. Le Choeur Mohawk s’est aussi joint à la représenta­tion.

Le projet a germé de façon informelle deux ans avant le premier concert. M. David assistait alors à une rencontre de Tourisme Montérégie, à laquelle participai­t également l’agente de développem­ent touristiqu­e de Tourisme Kahnawake, Kimberly Cross. Après discussion, les démarches se sont rapidement amorcées. Le projet implique aujourd’hui plusieurs membres de la communauté, du Kahnawake Education Centre (KEC) à la Mission Saint-François Xavier en passant par les dirigeants et parents des participan­ts. « Aujourd’hui, après avoir pris le temps de développer des relations avec la communauté et les différents intervenan­ts qui la composent, celle-ci aimerait que le projet se poursuive durant deux ans encore », raconte M. David.

Pour assurer le succès du projet, l’OSDL s’est assis dès le départ avec des membres de la communauté pour discuter de son organisati­on. « Ce qui était important pour nous, c’était de sentir leurs besoins, de déterminer ce qui les intéressai­ent, explique M. David. Nous ne sommes donc pas arrivés là avec un contrat de dix pages en proposant une entente pour un concert. Nous nous sommes mariés à leur mode de fonctionne­ment. »

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