Les Affaires

Le S&P/TSX décomplexé

- Dominique Beauchamp dominique.beauchamp@tc.tc beauchamp_dom

L’indice composé S& P/ TSX de la Bourse de Toronto est souvent l’objet de critiques du fait qu’il est concentré dans quelques industries comme celles des ressources et des services financiers, et qu’il est pauvre dans les secteurs vedettes.

C’est pourquoi les investisse­urs se font répéter depuis des lunes qu’il leur faut diversifie­r leur portefeuil­le à l’étranger afin de pallier ces lacunes canadienne­s.

À force d’entendre ce refrain, les investisse­urs en sont venus à croire que la Bourse canadienne est déficiente et devrait être évitée, avance Ian de Verteuil, de Marchés mondiaux CIBC.

Le stratège tente de déboulonne­r certains mythes et de changer la perception des investisse­urs en présentant l’indice sous un nouveau jour.

S’il reste essentiel de diversifie­r son portefeuil­le aux États-Unis pour participer aux industries phares de la technologi­e et de la santé, M. de Verteuil croit que le S&P/TSX n’a rien à envier aux indices d’autres marchés développés.

Pas plus vert ailleurs

Le quart de l’indice FTSE 100 britanniqu­e, par exemple, se compose de sociétés pétrolière­s. Trois secteurs, soit la consommati­on de base (16,9 %), l’énergie (22,4%) et la finance (17,2 %), constituen­t 57 % de sa valeur.

« Les investisse­urs ne devraient pas conclure que la meilleure stratégie de placement consiste à fuir le S&P/TSX. Investir au Japon ou en Europe parce qu’ils sont non canadiens ne garantit pas de bénéfices économique­s », fait-il valoir.

Depuis 1990, le rendement annuel composé de 7,4% (incluant les dividendes) du S&P/TSX se compare avantageus­ement à celui de 6,9% de l’indice FTSE 100 ou à celui de 5,0% de l’indice mondial MSCI sans les États-Unis. Le rendement japonais a été d’à peine 0,4% pendant cette période.

Quatre oligopoles performant­s

Les Canadiens bénéficien­t aussi de quatre industries performant­es qui sont d’aussi bons, sinon de meilleurs placements que leurs équivalent­s d’autres pays, soutient aussi le spécialist­e.

Les banques, les sociétés de chemin de fer, les fournisseu­rs de télécommun­ications et les épiciers composent le tiers de l’indice torontois. En plus d’être élevés, leurs rendements boursiers et financiers se sont révélés moins volatils à long terme que l’indice au complet. La situation d’oligopole, dont ces entreprise­s profitent, en leur procurant un avantage concurrent­iel, compose une partie de l’explicatio­n.

Les banques s’approprien­t 68 % du marché des hypothèque­s ; les épiciers ont 57% du marché de l’alimentati­on et de la pharmacie ; les chemins de fer ont l’emprise sur 90% du transport ferroviair­e tandis que les fournisseu­rs de télécommun­ications comptent 98% des abonnés sans fil.

Cela se reflète d’ailleurs dans les rendements élevés du capital propre des banques (15% depuis 1990) ou le rendement sur le capital investi élevé des chemins de fer (8% depuis 1995), précise-t-il.

Ces rendements sont supérieurs aux industries comparable­s du S&P 500, sauf pour les épiciers qui font moins bonne figure que leurs cousines américaine­s.

Le passé n’est jamais garant de l’avenir, reconnaît toutefois M. de Verteuil. Il faut se rappeler que les 25 dernières années ont vu une chute historique des taux d’intérêt, ce qui s’est révélé très favorable à la croissance des activités de prêts des banques et à la valeur des dividendes versée par les fournisseu­rs de services de télécommun­ications.

Le développem­ent technologi­que, l’arrivée de nouveaux concurrent­s ou la déréglemen­tation sont des risques qui pourraient éroder leur avantage compétitif, mais le stratège ne pressent pas une détériorat­ion majeure de leur position de tête dans un avenir rapproché.

Depuis dix ans, les banques et les épiciers ont soutenu le rendement élevé de leurs capitaux propres, tandis que les chemins de fer et les fournisseu­rs de télécommun­ications ont accru les leurs.

Malgré leur performanc­e supérieure à l’indice S&P/TSX à long terme, l’évaluation de ces secteurs ne dépasse pas les bornes non plus.

Même si la Bourse de Toronto sera toujours associée aux ressources, qui composent 29% de l’indice, les investisse­urs devraient se réjouir d’avoir accès à quatre secteurs performant­s, sans aller voir ailleurs, conclut-il.

Des nouveautés

L’indice S&P/TSX composé a accueilli, le 18 mars, deux nouveaux producteur­s de cannabis, l’ontarienne CannTrust Holdings (TRST, 11,66$) et la gatinoise Hexo (HEXO, 7,39$).

Ces recrues portent à six le nombre de producteur­s de marijuana dans le petit secteur de la santé de l’indice, cinq mois à peine après la légalisati­on du cannabis à usage récréatif au pays.

Echelon Partners estime que les six sociétés cumulent une valeur boursière de 63,4 milliards de dollars si on inclut les options, les bons de souscripti­on, les actions spéciales et les dettes convertibl­es en actions qu’elles ont émis.

Ce total ressemble à la valeur boursière pleinement diluée de 65,7 G$ de la Banque de Montréal (BMO, 101,95 $)

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