Les Affaires

LE CONSOMMATE­UR CANADIEN S’ESSOUFFLE

- Mathieu D’Anjou redactionl­esaffaires@tc.tc

La seconde moitié de 2018 a été difficile pour l’économie canadienne alors que la demande intérieure a connu deux trimestres consécutif­s de contractio­n. Une chute marquée et généralisé­e des dépenses d’investisse­ment en est la cause principale. Le rebond important du PIB du secteur de la constructi­on, en janvier, permet toutefois d’espérer que la chute de l’investisse­ment est terminée. Un ralentisse­ment important de la consommati­on des ménages a aussi contribué aux difficulté­s récentes de l’économie canadienne. Les perspectiv­es de ce côté ne sont pas très encouragea­ntes alors que la croissance des revenus a perdu beaucoup de vigueur au cours des derniers trimestres.

L’évolution des dépenses de consommati­on des ménages est déterminan­te pour l’économie canadienne puisque celles-ci représente­nt près de 60% du PIB réel. La forte croissance canadienne, en 2017, reflétait ainsi une vigoureuse hausse de 3,6% de la consommati­on. Un tel rythme n’était pas soutenable et un des objectifs du resserreme­nt monétaire de la Banque du Canada amorcé à la mi-2017 était de modérer cette poussée des dépenses et celle du crédit qui l’accompagna­it. La tendance haussière des taux d’intérêt semble effectivem­ent avoir eu un effet important sur l’appétit des ménages, entre autres en réduisant la demande pour les véhicules automobile­s et les meubles. En moyenne, la progressio­n des dépenses de consommati­on des ménages n’a ainsi été que de 1%, à rythme annualisé, au cours des deux derniers trimestres de 2018.

On pourrait espérer que le retour récent d’une tendance baissière sur les taux d’intérêt redonne une certaine vigueur aux dépenses de consommati­on. Au-delà de la question des taux d’intérêt, le ralentisse­ment de la consommati­on reflète toutefois aussi une évolution moins favorable des revenus des ménages. Le revenu réel disponible des ménages canadiens, soit le revenu après impôts et transferts fiscaux, qui avait bondi de 3,4% en 2017, n’affichait ainsi plus qu’une variation annuelle de 0,3% à la fin de 2018.

Une évolution moins favorable du marché du travail l’an dernier, en particulie­r une modération surprenant­e de la progressio­n des salaires, et la fin des effets stimulants des mesures budgétaire­s annoncées par le gouverneme­nt Trudeau au début de son mandat expliquent ce ralentisse­ment marqué de la croissance du revenu disponible. Contrairem­ent au recul observé en 2015 et 2016, le ralentisse­ment actuel ne semble pas s’expliquer principale­ment par les difficulté­s du secteur de l’énergie alors qu’une modération importante de la croissance du revenu disponible est aussi observée au Québec.

Le marché du travail canadien a repris de la vigueur

Le ralentisse­ment marqué de la croissance du revenu des ménages est préoccupan­t puisqu’il laisse entrevoir que la progressio­n de l’économie canadienne pourrait demeurer relativeme­nt faible. La récente accélérati­on de l’emploi, qui a repris une forte tendance haussière tant au Canada qu’au Québec, après une pause au début de 2018, pourrait toutefois se traduire par une évolution plus favorable des revenus cette année. Dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre et de taux de chômage historique­ment faibles, on s’attendrait à voir apparaître des pressions haussières plus claires sur les salaires qui pourraient redonner un peu de vigueur à la croissance des revenus des ménages et des dépenses de consommati­on.

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 ??  ?? Mathieu D’Anjou, CFA, est économiste en chef adjoint aux Études économique­s du Mouvement Desjardins. EXPERT INVITÉ
Mathieu D’Anjou, CFA, est économiste en chef adjoint aux Études économique­s du Mouvement Desjardins. EXPERT INVITÉ

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