Les Affaires

Des batteries de plus en plus performant­es

- – Marie-Eve Shaffer

Si une entreprise de taxi décidait d’électrifie­r complèteme­nt sa flotte en 2019, elle aurait davantage de chance de réussir que Téo Taxi, lancé en 2015, ne serait-ce que grâce à la technologi­e des batteries qui a été grandement améliorée depuis quatre ans.

« La capacité des batteries d’aujourd’hui, par rapport à ce qui existait il y a trois ou quatre ans, a doublé. Le service serait plus performant », mentionne le directeur de recherche et de développem­ent de l’Institut du véhicule innovant (IVI), Frédéric Prigge.

L’IVI a conseillé l’équipe de Téo Taxi lorsqu’elle a choisi les véhicules électrique­s (VÉ) qui transporte­raient ses clients. « Il n’y avait pas une tonne de choix il y a quatre ans », souligne M. Prigge.

Ce dernier explique que dans la gestion de la flotte de Téo Taxi, il était prévu au départ que, pendant que la moitié des véhicules était branchée, l’autre moitié assurerait le service à la clientèle. « Aujourd’hui, avec un véhicule moderne, on arriverait à faire une journée entière de service », dit le directeur, en évoquant une autonomie pouvant atteindre plus de 400 km.

La technologi­e des batteries des VÉ évolue lentement, mais sûrement. Chaque année, de petites améliorati­ons sont apportées, augmentant du même coup l’autonomie des VÉ.

« Il ne faut pas attendre le truc révolution­naire qui jette tout par terre, précise le directeur de l’IVI. Ce sont de petites améliorati­ons qui font en sorte qu’une Nissan Leaf, par exemple, fait 300 km aujourd’hui, mais qu’en en 2011, elle en faisait une centaine.

La qualité des batteries désormais offertes sur le marché incite même des sociétés de transport à se lancer dans l’électrific­ation des transports. À Montréal, par exemple, la ligne 36–Monk est en partie électrifié­e. Trois bus 100 % électrique­s y roulent. Quatre autres s’ajouteront en 2020 pour l’électrific­ation complète du circuit. Les batteries sont rechargées, en fin de compte, sous des pantograph­es, en l’espace de trois minutes.

L’IVI a donné un coup de main à la Société de transport de Montréal (STM) et à Nova Bus pour la réalisatio­n de ce projet.

« Les bus sont faits sur mesure, note M. Prigge. Pour la ligne 36–Monk, c’était avantageux de mettre de petites batteries. On n’en met pas juste pour le plaisir. Ça coûte cher et c’est lourd. Ce serait déjà différent à Laval, dans une banlieue, où les bus parcourent de longues distances, avec moins de passagers. À mesure qu’on s’éloigne des centres, la mission change, mais tous les bus existent aujourd’hui. »

La clé : la recharge rapide

La nécessité de recharger régulièrem­ent les batteries des VÉ peut représente­r une source d’inquiétude pour les organisati­ons qui désirent électrifie­r leur flotte. Si la plupart de celles-ci décident de se doter de leur propre infrastruc­ture de recharge, elles pourront aussi s’en remettre au réseau public de bornes de recharge, appelé Circuit électrique. Celui-ci compte à ce jour un seul client commercial, Communauto, mais Hydro-Québec, qui gère ce réseau, s’attend à ce que d’autres s’ajoutent.

Ce réseau public compte déjà plus de 1 700 bornes, dont 176 qui permettent une recharge rapide grâce à une tension électrique de 400 V. Celles-ci peuvent recharger à 80 % les batteries d’un VÉ en 30 minutes alors qu’avec une borne de 240 V, il faut attendre de six à huit heures pour qu’elle retrouve sa pleine capacité.

Pour la présidente du conseil d’administra­tion de Mobilité électrique Canada, Catherine Kargas, il est urgent d’ajouter des bornes de 400 V. « Si on veut encourager l’adoption du VÉ par les entreprise­s de taxi et d’autopartag­e, la clé est la recharge rapide », insiste-t-elle. Elle souligne qu’un meilleur accès à une borne de recharge rapide permettra de limiter le temps consacré à la recharge et de maximiser celui destiné aux activités commercial­es.

Hydro-Québec a déjà annoncé son intention d’ajouter 1 600 bornes de recharge rapide à son réseau d’ici dix ans. La société d’État est à la recherche de nouveaux sites appartenan­t à des municipali­tés ou à des entreprise­s privées, notamment dans les régions de la Côte-Nord, de l’Abitibi et de la Mauricie, de même que le long des autoroutes 20 et 40, entre Montréal et Québec, rapporte le porte-parole d’HydroQuébe­c, Louis-Olivier Batty.

La société d’État demeure à l’affût des changement­s technologi­ques pour être en mesure de répondre à la demande lorsque de nouveaux VÉ, notamment des poids lourds, arriveront sur le marché québécois et seront très exigeants pendant les opérations de recharge.

« On sait que ça s’en vient, a indiqué M. Batty. On va être prêt. On a les infrastruc­tures pour répondre à la demande. »

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