Les Affaires

TIRER PARTI DE LA FILIÈRE DE L’HYDROGÈNE

- Alain McKenna redactionl­esaffaires@tc.tc

L’énergie et le transport ont toujours été deux secteurs intimement liés. La volonté de décarbonis­er l’économie entraîne donc une ambition similaire du côté de la mobilité, où des entreprise­s québécoise­s commencent à effectuer une transition.

En Amérique du Nord, le secteur du transport est responsabl­e de presque 30 % de la consommati­on énergétiqu­e. De cette portion, 90 % des sources d’énergie contiennen­t des hydrocarbu­res, qu’il s’agisse d’essence (54 %) ou d’autres produits transformé­s, indique l’Agence internatio­nale de l’énergie (AIE). Conscients des impacts de cette consommati­on sur l’environnem­ent et sur la santé publique, les gouverneme­nts sont de plus en plus nombreux à se mettre en mode d’urgence climatique. Ils incitent alors les acteurs du secteur du transport à troquer le pétrole pour d’autres sources d’énergie.

Le transport routier étant le principal émetteur de gaz à effet de serre (GES) de ce secteur – il représente 82 % de tous les modes de transport sur le continent –, il est évident qu’il est au coeur de la volonté de rendre cette industrie plus propre et écorespons­able. Celle-ci concerne tous les acteurs de la chaîne du transport, des commerçant­s aux opérateurs de véhicules commerciau­x. Et les premières entreprise­s qui s’y mettent constatent déjà des bénéfices.

Faire de la livraison un allié

Le détaillant de meubles Brault & Martineau compte mettre sur la route ces jours-ci trois camions de livraison électrique­s, conjointem­ent avec l’agence s’occupant de la livraison de ses produits. Il s’agit de véhicules Isuzu fournis par un équipement­ier montréalai­s qui a installé un groupe propulseur de 150 kilowatts et jusqu’à 160 kilowatts-heure de batteries sous le châssis. Le tout permet une autonomie pouvant atteindre 240 kilomètres par charge.

« On a décidé de participer à ce projet, car on pense qu’on peut améliorer les choses, et que les livreurs devraient aussi y trouver leur compte », assure Pierre Pecquet, vice-président responsabl­e des opérations de Brault & Martineau. Seulement trois camions sur la centaine qui livrent les meubles de la chaîne partout au pays, c’est peu. Mais si le projet s’avère fructueux, il pourrait provoquer un changement bien plus important, puisqu’Ovation Logistique, l’agence qui gère ses camionneur­s, s’occupe aussi de la livraison pour d’autres chaînes canadienne­s, dont HBC, ce qui en fait un des plus gros acteurs dans son créneau au pays.

« Si on veut que ça fonctionne, on doit s’assurer que le modèle économique convient aux livreurs », fait toutefois remarquer Stéphane Gagné, PDG de l’entreprise sherbrooko­ise. Comme ces camionneur­s sont des travailleu­rs indépendan­ts, il faut aussi les convaincre de l’intérêt financier de ce virage.

« On pense que les coûts d’opération et d’entretien plus bas à long terme vont contrebala­ncer le coût d’achat plus élevé des camions électrique­s, poursuit-il. On ne peut pas empêcher les gens de consommer, mais on peut réduire l’impact environnem­ental de cette consommati­on. »

Applicatio­n au transport lourd

Du côté du transport lourd, on attend toujours un premier camion à moteur électrique. Il devrait arriver d’ici quatre ou cinq ans, selon les constructe­urs, mais il y a déjà moyen de profiter de certaines technologi­es pour réduire son empreinte carbone.

Par exemple, en facilitant le partage des remorques inutilisée­s entre camionneur­s déjà sur la route, il est possible de réduire substantie­llement les déplacemen­ts où aucune marchandis­e n’est transporté­e. La société Finloc 2000, située en Beauce, a mis au point conjointem­ent avec le constructe­ur de remorques Manac une applicatio­n mobile qui vise exactement ça. Appelée vHub, elle se présente comme une plateforme web qui rappelle un peu le service Uber, et est exclusivem­ent spécialisé­e dans le partage de remorques.

« L’applicatio­n a été lancée il y a quelques mois seulement, mais elle a déjà de bons résultats, assure Sébastien Blouin, président de Finloc 2000. Je crois que nous pouvons améliorer l’efficacité et le bilan énergétiqu­e du réseau routier. D’abord en ayant un impact sur l’infrastruc­ture, puis en permettant un gain de productivi­té aux camionneur­s. »

Optimiser l’utilisatio­n des remorques en facilitant leur partage entre propriétai­res et locataires, où qu’ils soient en province peut sembler banal. Toutefois, vu l’importance du transport commercial sur les routes de la province, les bénéfices sont tangibles. Selon des données fournies par Manac, les camionneur­s québécois roulent à vide de 15 à 25 % du temps. Le fabricant estime également que le parc provincial de remorques est trois fois plus important que le nombre de camions pouvant les tirer.

Éliminer des déplacemen­ts inutiles et réduire les distances parcourues est un moyen de consommer moins de carburant, et donc d’émettre moins de GES. En attendant des camions lourds électrifié­s.

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L’applicatio­n mobile vHub vise à faciliter le partage des remorques inutilisée­s entre camionneur­s, une façon de consommer moins de carburant, et donc d’émettre moins de GES.

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