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Tim Regan, gestionnai­re de portefeuil­le chez Kingwest & Company

- Dominique Beauchamp dominique.beauchamp@tc.tc beauchamp_dom

« Nous aimons lorsque les titres tombent sans raison ou lorsque les investisse­urs se méprennent sur la stratégie d’une entreprise. »

DOMINIQUE BEAUCHAMP – La Bourse et le marché obligatair­e déroutent bien des investisse­urs ces jours-ci. Comment comptez-vous en tirer parti?

TIM REGAN – Ce genre de dislocatio­n sied bien à notre démarche, qui consiste à acheter des sociétés bien gérées que le marché évalue mal, dans un horizon de trois à cinq ans. Les investisse­urs se déplacent en troupeau, ce qui nous fournira des occasions de déployer notre encaisse de 10% pour acheter des entreprise­s sous-évaluées. Nos décisions reposent entièremen­t sur l’écart que nous percevons entre le cours et la valeur juste que notre modèle attribue aux entreprise­s elles-mêmes. Il arrive parfois qu’on achète trop tôt, mais se fixer un objectif est mieux qu’essayer de prévoir la Bourse.

D.B. – Votre encaisse est tout de même plus élevée qu’à la normale. Est-ce parce que les aubaines sont rares?

T.R. – En fait, derrière les entreprise­s chouchous qui mènent la charge en Bourse, il y a encore beaucoup de sociétés bon marché. Nous avons plus de liquidités parce que nous avons réalisé des gains sur des titres qui ont grimpé rapidement comme Rogers Communicat­ions (RCI.B, 65,65 $), Thomson Reuters (TRI, 91,11 $) et Badger Daylightin­g (BAD, 42,42$). Si nous avons vendu Rogers, nous continuons de détenir Telus (T, 48,06$) et Québecor (QBR. B, 30,21$). Nous avons aussi réduit notre placement dans Air Canada (AC, 43,55$). Par contre, nous conservons des actions de celui qui deviendra bientôt le seul acteur encore en Bourse de cette industrie concentrée.

D.B. – Pouvez-vous illustrer votre démarche à l’aide d’exemples?

T.R. – Les bas taux actuels créent toutes sortes de distorsion­s. Les banques canadienne­s, par exemple, sont peu chères parce qu’on craint que les marges d’intérêts comprimées affaibliss­ent leur croissance. Ces institutio­ns financière­s s’échangent donc à un bas multiple même si elles dégagent des rendements financiers élevés et qu’elles distribuen­t la moitié de leurs bénéfices croissants en dividendes année après année. J’aime nettement mieux le rendement de 4% de leur dividende que celui de 2,5% de leurs obligation­s. S’il y a une correction ou une récession, nous ajouterion­s à nos positions dans les institutio­ns financière­s, dont la Banque TD (TD, 171,87$) et la Banque Scotia (BNS, 70,47$).

D.B – De quelle autre façon trouvez-vous vos aubaines?

T.R. – Nous aimons lorsque les titres tombent sans raison ou lorsque les investisse­urs se méprennent sur la stratégie d’une entreprise. C’est le cas du fonds immobilier à capital fermé Northwest Healthcare Properties Real Estate Investment Trust (NWH.UN, 11,68$). Nous avons acheté le plus important propriétai­re d’immeubles à vocation médicale à la fin de 2015, lorsque le fonds s’est uni à une société soeur dans un échange d’actions pour stimuler sa croissance et diversifie­r son portefeuil­le à l’étranger. Les investisse­urs n’y voyaient que du risque pour un aussi petit fonds immobilier. Aujourd’hui, le fonds de 1,5 milliard possède des immeubles à vocation médicale et des hôpitaux en Allemagne, au Brésil et en Australie. Le titre a gagné 45% depuis l’achat.

D.B. – D’où vient votre penchant pour l’immobilier?

T.R. – On y trouve des occasions parce que les titres ne reflètent pas toujours bien la valeur des actifs. Nous avons acheté des actions du propriétai­re mondial immobilier Brookfield Properties Partners (BYP.UN, 25,22$) en janvier, cinq mois après l’acquisitio­n de GGP, société américaine qui détient 125 centres commerciau­x, que nous connaissio­ns déjà. L’impopulari­té des centres d’achat auprès des investisse­urs pèse sur le titre. Brookfield nous apparaît sous-évalué de 40% par rapport à la valeur de ses actifs. En plus, Brookfield possède aussi des immeubles de bureaux prestigieu­x à Toronto, New York et Londres, entre autres. La société développe aussi des complexes résidentie­ls. Enfin, nous récoltons un rendement de la distributi­on de 6,5% en attendant que sa valeur émerge.

D.B. – Vous affectionn­ez aussi les grands fonds privés tels que Blackstone. Qu’est-ce qui vous attire?

T.R. – Ce genre de placement nous donne accès au savoir-faire de financiers chevronnés, à leurs énormes capitaux et aux occasions d’affaires auxquelles ils ont accès. De plus, ces fonds offrent aussi différente­s sources de revenus, dont les honoraires. Nous détenons Blackstone Group (BX, 49,53$ US) depuis six ans et son titre a joué au yoyo depuis son achat aux environs de 20$ US. Maintenant que le fonds s’est converti de société en commandite en société par actions (le 1er juillet), il devrait attirer de nouveaux investisse­urs qui ne pouvaient pas le considérer avant. Le titre a aussi fait son entrée dans les indices boursiers. Son actif de 545 G$ US est colossal. À 4%, le rendement de sa distributi­on est respectabl­e.

Rectificat­if du Marché en action du 24 août: Nous y écrivions que Fonds Québec Eterna sous-pondérait sa position dans Quincaille­rie Richelieu, Intertape Polymer et Plastiques IPL. Au contraire, le fonds surpondère ces titres. Nos excuses.

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 ??  ?? Tim Regan a cofondé, en 1997, les Fonds Northwest, où il a été vice-président et chef des investisse­ments. En 2003, il a joint Kingwest, où il veille à la stratégie en revenu fixe et à la gestion du risque. Il y préside aussi le comité de gestion de portefeuil­le.
Tim Regan a cofondé, en 1997, les Fonds Northwest, où il a été vice-président et chef des investisse­ments. En 2003, il a joint Kingwest, où il veille à la stratégie en revenu fixe et à la gestion du risque. Il y préside aussi le comité de gestion de portefeuil­le.

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