Les Affaires

Le pétrole, une question surtout électorale

- Alain McKenna redactionl­esaffaires@tc.tc

Les ressources naturelles ont toujours été au coeur de l’économie canadienne, mais rarement auront-elles autant été au centre de l’actualité politique. Alors que les élections fédérales du 21 octobre pourraient être déterminan­tes pour l’avenir énergétiqu­e du Canada, un expert du secteur pétrolier doute que le scrutin change quoi que ce soit à la façon dont cet hydrocarbu­re est produit et consommé au pays.

« Il faut garder en tête que l’industrie du pétrole est hautement mondialisé­e et que le Canada n’y joue pas un très grand rôle », souligne Roger McKnight, analyste pétrolier pour la firme ontarienne de consultati­on En-Pro Internatio­nal. « Même la question de la taxe carbone, qui suscite des débats dans plusieurs régions du pays, est plus une question électorale qu’économique. »

Autrement dit, les enjeux environnem­entaux associés de près au secteur énergétiqu­e ainsi qu’à la production, puis à la consommati­on d’hydrocarbu­res, pourraient influer davantage sur le bulletin que les électeurs déposeront dans l’urne que ce que les entreprise­s et les consommate­urs mettront dans leurs réservoirs par la suite.

« La question des pipelines – tant à l’ouest qu’à l’est de l’Alberta – et l’aide à l’électrific­ation du transport figurent dans l’actualité depuis plusieurs années », et n’ont qu’un très mince impact sur la croissance du secteur énergétiqu­e canadien, insiste M. McKnight. « Et si jamais les gens se mettent à acheter massivemen­t des véhicules électrique­s, les gouverneme­nts devront revoir leur modèle de taxation pour combler la perte des revenus tirés de la consommati­on de carburant, ce qui risque de refroidir leur adoption. »

Depuis des mois, l’Alberta se plaint de ne pouvoir exporter de plus grandes quantités du pétrole extrait sur son territoire, ce qui influence son cours à la baisse. Accéder directemen­t à d’autres marchés que les États-Unis est perçu par le gouverneme­nt de la province, ainsi que par les principaux acteurs de l’industrie locale, comme la solution pour corriger la situation. Ce qui ne change rien au fait que l’évolution des prix du carburant payés par le reste du pays a très peu à voir avec cette situation.

« L’Est du Canada est dépendant des cours fixés à Wall Street, tandis que l’Ouest dépend des cours du brut à l’internatio­nal. Et les prix à la pompe sont tributaire­s des États-Unis partout au pays. Par exemple, à Montréal et à Toronto, ça dépend des prix dans l’État de New York », conclut l’analyste ontarien.

« Même la question de la taxe carbone, qui suscite des débats dans plusieurs régions du pays, est plus une question électorale qu’économique. »

« Un manque de leadership »

L’opposition de la Colombie-Britanniqu­e et du Québec à la constructi­on de nouveaux pipelines pour exporter de plus grandes quantités du pétrole extrait des Prairies est un autre exemple dénotant « le manque total de leadership du Canada et l’égocentris­me évident de ces provinces » face aux enjeux économique­s du reste du pays, a ajouté l’entreprene­ur canadien, qui menace de déménager son entreprise aux États-Unis.

La sortie de Kevin Neveu fait écho à un sentiment régulièrem­ent exprimé par des politicien­s et des gens d’affaires proches du secteur énergétiqu­e des provinces vivant de la production pétrolière. Ils s’insurgent également contre la taxe carbone imposée par Ottawa pour tenter d’endiguer les émissions polluantes partout au pays.

Pourtant, d’un océan à l’autre, la lutte aux émissions polluantes a la faveur de la majorité de la population. Un sondage effectué en mars par la firme indépendan­te Abacus Data mentionne que 80 % des 1 495 Canadiens

– Roger McKnight, analyste pétrolier pour la firme de consultati­on En-Pro Internatio­nal

interrogés étaient alors en faveur d’une taxe sur les émissions de carbone, estimant que c’était l’une des solutions les plus efficaces pour réduire l’empreinte carbone nationale.

Bref, tout indique que l’automne sera chaud au Canada cette année.

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Depuis des mois, l’Alberta se plaint de ne pouvoir exporter de plus grandes quantités de son pétrole, ce qui influence son cours à la baisse.
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