Les Affaires

Entre quatre murs

- Marine Thomas Rédactrice en chef, Les Affaires res marine.thomas@tc.tc C @marinethom­as

Fini les chantiers uniques. Flairant une envie d’écosystème­s autosuffis­ants, les promoteurs multiplien­t les projets immobilier­s mixtes. Ces minivilles, où on peut aussi bien se loger que travailler et consommer, vendent l’idée du bien-vivre ensemble et d’une cohabitati­on harmonieus­e.

Pendant que l’industrie immobilièr­e tente de répondre à cet idéal, le monde de l’entreprise, lui, continue à bâtir des cloisons. Car ne nous y trompons pas, il y a des murs invisibles dans les espaces ouverts. On peut réaménager autant qu’on veut les espaces de travail, supprimer les bureaux fermés, abolir les places fixes, ajouter des zones de collaborat­ion, rien n’y fait, des sous-groupes se forment toujours, en fonction de leurs propres affinités. Les organigram­mes enfoncent le clou. Chacun appartient à une équipe, avec ses propres codes, ses rituels et ses façons de faire. Le sentiment d’appartenan­ce est fort. Entre nous, on se comprend, on est du même clan.

C’est pourquoi il est si difficile de briser les silos. Malgré les aberration­s que crée le manque de communicat­ion entre les services, ainsi que les incompréhe­nsions et les frustratio­ns qu’elles génèrent, il n’y a pas de réelle envie de se mélanger. Envers les autres, on ressent au mieux un sentiment d’indifféren­ce, au pire, un sentiment de rivalité. Après tout, on se bat régulièrem­ent pour des projets, des budgets ou de la reconnaiss­ance. Ce ressenti est parfois exacerbé, consciemme­nt ou non, par la direction elle-même.

Or, cette muraille invisible a un impact sur l’entreprise. Comment avoir une vision globale lorsqu’on ne voit que sa partie? Comment ne pas dédoubler les efforts quand il n’y a aucun partage des ressources et des talents? L’innovation émerge de la confrontat­ion des différence­s, et la collaborat­ion se développe grâce à ce qui nous unit. Il ne sert à rien d’en faire des axes stratégiqu­es de nos organisati­ons si on ne favorise pas au préalable ces conditions.

Mettre en place une véritable synergie entre les divisions d’une entreprise n’est pas une utopie. Il suffit d’en faire une priorité. Cela commence par les gestionnai­res, qui doivent montrer l’exemple. À quand remonte votre dernier échange spontané avec un collègue d’une autre équipe, sans y avoir été contraint par le fait de vous retrouver malencontr­eusement au même moment, à la machine à café?

Si cette mentalité de clans existe dans votre entreprise, observez comment vous y contribuez, directemen­t ou indirectem­ent. Et je vous mets au défi, d’ici la réception de votre prochain journal, de faire un geste pour enlever une brique du mur qui vous sépare.

Oserez-vous être la personne qui ouvre la brèche?

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