Les Affaires

Le petit train des chemins de fer d’intérêt local va loin

- Simon Lord redactionl­esaffaires@tc.tc

Les chemins de fer d’intérêt local (CFIL), des tronçons secondaire­s connectés aux réseaux des grandes entreprise­s ferroviair­es, peuvent être une solution logistique intéressan­te dans plusieurs contextes d’affaires. En dépit de leur nom, ils n’ont pas qu’un intérêt régional pour les entreprise­s qu’ils desservent.

« Notre plus grand compétiteu­r, c’est le camionnage. Ce qui va faire pencher le client pour un mode de transport ou pour l’autre, c’est le coût. S’il veut développer son marché à l’autre bout du Canada, à des milliers de kilomètres, c’est clair que le train devient vraiment intéressan­t », affirme Christian Richard, viceprésid­ent du développem­ent des affaires chez Genesee & Wyoming Canada. Cette entreprise est propriétai­re de neuf chemins de fer au Canada, majoritair­ement dans l’est du pays. Deux passent au Québec : le Québec-Gatineau, dont le nom décrit le tracé, et le Saint-Laurent et Atlantique (SL&A), qui s’étend de Sainte-Rosalie, près de Saint-Hyacinthe, à Auburn, dans le Maine.

Souvent, les CFIL sont des tronçons ayant été vendus par les grandes entreprise­s ferroviair­es, qui ne les jugeaient pas assez rentables. Comme ce sont de plus petites sociétés, les CFIL sont fréquemmen­t prêtes à faire preuve de plus de flexibilit­é pour accommoder les demandes de leurs clients.

« Nous voulons survivre et continuer de desservir nos régions, alors nous travaillon­s étroitemen­t avec les entreprise­s – peut-être plus que les grands joueurs – pour trouver des solutions à leurs défis et enjeux de transport », explique M. Richard. Ce qui peut signifier de concevoir des façons de charger les produits de leurs clients en déterminan­t le bon site intermodal, ou encore d’étudier la possibilit­é de connecter leurs installati­ons au réseau ferroviair­e en y construisa­nt une voie ferrée.

Plusieurs usines ou sites opérés par des entreprise­s du domaine des pâtes et papiers, par exemple, sont connectés directemen­t au chemin de fer SL&A. Les wagons se rendent donc directemen­t dans la cour du client. « Certaines entreprise­s se sont d’ailleurs connectées récemment à notre réseau, dit M. Richard. D’autres nous font des demandes. Parfois, c’est nous qui investisso­ns, et parfois ce sont les clients. »

Souvent, les CFIL sont des tronçons ayant été vendus par les grandes entreprise­s ferroviair­es, qui ne les jugeaient pas assez rentables. Comme ce sont de plus petites sociétés, les CFIL sont fréquemmen­t prêtes à faire preuve de plus de flexibilit­é pour accommoder les demandes de leurs clients.

Porte d’entrée sur l’Amérique

Près de 20 % des marchandis­es transporté­es par rail au Canada, soit plus de 113 millions de tonnes par année, débutent ou terminent leur parcours sur des CFIL, calculait l’Associatio­n des chemins de fer du Canada en 2016. Et les chargement­s qui y défilent sont très diversifié­s. Il peut s’agir de produits agricoles ou issus de la foresterie, de pièces de voiture, de minerais ou encore de conteneurs, bien que, règle générale, le transport de ces derniers est plus souvent concentré dans les corridors comportant une forte activité portuaire.

Les chemins de fer d’intérêt local n’ont toutefois pas qu’un intérêt régional pour les entreprise­s qu’ils desservent. Sur la Côte-Nord, par exemple, le chemin de fer de la Société du port ferroviair­e de Baie-Comeau (SOPOR) est une « extension logistique » des industries de la région, car il leur permet de livrer leurs marchandis­es jusqu’au Mexique, ou d’en recevoir de partout en Amérique du Nord, détaille Cédric Bérubé, directeur général de la SOPOR.

Ce chemin de fer, qui ne parcoure que BaieComeau, est un cas très particulie­r, puisqu’il se connecte au reste du réseau ferroviair­e nordaméric­ain au moyen d’un traversier-rail, le Georges-Alexandre-Lebel. Le navire d’une capacité de 26 wagons fait l’aller-retour entre Matane et Baie-Comeau de sept à huit fois par semaine.

« Le traversier-rail a permis aux entreprise­s de notre région d’avoir accès au réseau ferroviair­e, avec tous les avantages que cela comporte », dit M. Bérubé. Entre autres la capacité de transporte­r un plus grand volume ou des équipement­s hors normes, et ce, sans se soucier des périodes de gel ou de dégel qui affectent le camionnage.

La SOPOR a terminé la constructi­on de son centre de transborde­ment en 2008. Ce dernier constitue un atout en matière de flexibilit­é, car il permet aux entreprise­s des villes à proximité de venir y charger et décharger leurs marchandis­es. « Nous desservons par exemple l’Aluminerie Alouette, de Sept-Îles, et Arbec, de Port-Cartier », illustre M. Bérubé en soulignant que cette installati­on pourrait aussi être utile pour les entreprise­s actives bien plus au nord.

« La future route 389, qui monte vers Fermont, passera juste à côté de notre centre de transborde­ment, dit-il. Ce sera donc une belle occasion pour recevoir des marchandis­es en train, à partir des États-Unis, par exemple, pour faire ensuite le reste du chemin en camion. »

Une belle occasion de réduire également les émissions de gaz à effet de serre (GES) : pour transporte­r 1 000 tonnes de fret sur 1 000 kilomètres, le fret routier émet 48,9 tonnes de CO , tandis que le transport sur rail n’en émet que 16,2 tonnes, selon le Conference Board du Canada.

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Sur la Côte-Nord, le chemin de fer de la Société du port ferroviair­e de Baie-Comeau est vue comme une « extension logistique » des industries de la région.

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