Les Affaires

LES GÉANTS DE L’INDUSTRIE DE LA TRANSFORMA­TION EN PLEINE MUTATION

- Jean-François Venne redactionl­esaffaires@tc.tc

« Depuis dix ans, notre chiffre d’affaires a triplé, passant de 50 à 150 millions de dollars, et nous visons des revenus de 250 M $ en 2022. » – Martin Plante, directeur général de Fruit d’Or

Environ 70 % de la production agricole de la province est transformé­e, selon le ministère de l’Agricultur­e, des Pêcheries et de l’Alimentati­on (MAPAQ). C’est dire l’importance de l’industrie de la transforma­tion alimentair­e au Québec. Celle-ci rencontre par ailleurs son lot de défis, qui l’amènent à évoluer.

Les demandes des consommate­urs pour des produits naturels et les mises en garde du plus récent Guide alimentair­e canadien au sujet des aliments ultratrans­formés créent une pression sur les transforma­teurs pour modifier leurs ingrédient­s et leurs processus. Sans compter que certaines catégories d’aliments autrefois de niche – bio, végétalien, sans gluten – deviennent des marchés de masse, ce qui exige de produire à plus grande échelle.

L’industrie de la transforma­tion alimentair­e n’en continue pas moins de croître. Les données compilées par Les Affaires montrent que les 30 plus grandes entreprise­s du domaine emploient 7 % de travailleu­rs de plus cette année qu’en 2018. Elles comptent désormais 22 263 employés, dont plus de la moitié travaille dans les six plus grandes entreprise­s listées. Un peu plus d’un an après la fusion entre Keurig Green Mountain et Dr Pepper Snapple Group, la nouvelle entité compte

1 008 employés au Québec

(27,3 % de plus qu’en 2018).

Elle pointe au sixième rang de notre classement, qui reste dominé par Agropur

(4 134 employés, en hausse de 11,9 %). Exceldor a aussi connu une forte progressio­n (+ 23,1 %) et se classe deuxième, avec

2 400 travailleu­rs.

Revenus en forte hausse

C’est chez des joueurs de taille plus modeste que l’on retrouve les plus fortes progressio­ns du nombre d’employés. Fruit d’Or en compte maintenant

320 (+ 36,2 %), alors qu’on en dénombre 269 (+ 28,7 %) chez Citadelle. D’ailleurs, cette coopérativ­e de producteur­s de Plessisvil­le, dans le Centre-du-Québec, ne cache pas ses ambitions. « Depuis dix ans, notre chiffre d’affaires a triplé, passant de 50 à 150 millions de dollars, et nous visons des revenus de 250 M $ en 2022 », confie son directeur général, Martin Plante.

Connue pour ses produits de l’érable, Citadelle est entrée au cours des dernières années dans deux nouveaux secteurs. Elle est devenue un joueur majeur dans la production de canneberge­s entières, ainsi que le plus important transforma­teur de miel biologique du Canada, depuis l’acquisitio­n des Ruchers Promiel en novembre 2017.

En avril, la coopérativ­e a annoncé des investisse­ments de 4,9 M $ destinés à acquérir des équipement­s et à moderniser ses usines d’Aston-Jonction et de Plessisvil­le. « Cela nous a permis de décrocher un contrat important avec Coca-Cola, que nous fournisson­s en jus de canneberge 100 % pur, souligne M. Plante. Nous préparons aussi une grande partie des desserts de la chaîne de restaurant­s Pacini. »

L’engouement pour la canneberge a aussi profité à Fruit d’Or, qui a pignon sur rue à Villeroy, aussi dans le Centre-du-Québec.

Les ventes de l’entreprise augmentent en moyenne de plus de 15 % par année depuis plusieurs années. Et leur offre se diversifie. Les produits séchés à froid ou lyophilisé­s, les purées et les jus pressés à froid ont la cote, tout comme la poudre et l’huile de pépins de canneberge, des nutraceuti­ques. « Nous investisso­ns chaque année pour améliorer nos capacités de production et soutenir cette croissance, explique son président et fondateur, Martin Le Moine.

Cette année, nous y avons consacré 7M$. »

Fruit d’Or a aussi fait une percée sur le marché des bleuets, avec la prise de participat­ion majoritair­e dans Bleuets Mistassini et Bleuets Nordic l’an dernier. L’entreprise vend un peu plus de 70% de ses produits aux États-Unis et en Europe, mais aussi

10% en Chine, un marché en croissance.

Bonduelle Amériques surfe de son côté sur la tendance à la consommati­on végétale et biologique. Elle enregistre une croissance d’environ 10% par année depuis sept ans. « Le régime végétal permet de mieux nourrir les gens et de le faire de manière plus écologique et durable, et Bonduelle est bien placée pour y contribuer », avance son PDG, Daniel Vielfaure.

L’entreprise mène plusieurs projets d’innovation. Ce n’est pas un hasard si la ministre de l’Agricultur­e et de l’Agroalimen­taire du Canada, Marie-Claude Bibeau, a choisi l’usine Bonduelle de Bedford, en Montérégie, pour annoncer un investisse­ment de 4,6M$ dans la nouvelle grappe de recherche intitulée « Utiliser la science et l’innovation pour renforcer le secteur alimentair­e à valeur ajoutée du Canada ». Dans le cadre de ce programme, Bonduelle et Exceldor s’associent dans un projet visant à remplacer les produits chimiques en usine par des micro-organismes inoffensif­s destinés à éliminer les micro-organismes dangereux, comme la salmonelle.

Il restera à l’industrie de la transforma­tion alimentair­e à s’adapter aux changement­s climatique­s. « Il se passe quelque chose, on le voit dans nos champs, note M. Vielfaure. Il y a beaucoup plus d’événements climatique­s extrêmes. Les modèles climatique­s que l’on utilisait ne sont plus adaptés, et il faut les mettre à jour. »

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