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Macroécono­mie

- Laura O’Laughlin redactionl­esaffaires@tc.tc

Les participan­ts à l’économie circulaire sont plus riches qu’ils ne le croient

L’un des concepts les plus durables de l’économie moderne est peut-être celui du PIB – où la richesse des pays (et de leurs provinces) est mesurée par ce qui y est produit. Le PIB n’est pas sans erreur de calcul. Son inventeur, Kuznets, connaissai­t bien ses limites, notant que cette mesure ne tenait aucunement compte du bien-être. Les coûts de destructio­n de l’environnem­ent sont également exclus de ce calcul ; la production qui pollue et celle qui ne pollue pas sont traitées de la même manière.

Le modèle linéaire de création de valeur commence par l’extraction et aboutit aux poubelles, maximisant ainsi la contributi­on du producteur au PIB. Les entreprise­s qui s’attendent à ce que leurs clients abandonnen­t constammen­t des biens et en achètent de nouveaux ignorent toutefois un changement radical dans l’attitude des consommate­urs, et ce, à leurs risques et périls. Compte tenu des gains potentiels en matière de richesse et de bien-être que procure une économie circulaire, les consommate­urs ont commencé à privilégie­r des méthodes d’acquisitio­n moins linéaires. Des ouvrages récents, tels que En as-tu vraiment besoin? et La Magie du rangement ainsi que la sensibilis­ation accrue à l’environnem­ent n’ont pas seulement incité les consommate­urs à reconsidér­er leurs besoins, ils ont également changé la façon dont ceux-ci considèren­t leurs options: où et quand acheter, et même décider s’ils achètent ou non.

Plutôt que d’acheter du neuf, environ 80% des consommate­urs québécois participen­t à l’économie de seconde main. Cette économie secondaire ou circulaire comprend toutes transactio­ns d’articles d’occasion, qu’ils soient achetés, vendus, loués, échangés ou donnés. Bien que certains acteurs du marché donnent simplement ce qu’ils ont à leurs magasins d’épargne locaux, d’autres passent plutôt par des plateforme­s web telles que Kijiji et Facebook Marketplac­e, qui facilitent les transactio­ns entre homologues. Les sites de commerce électroniq­ue tels que ThredUp (basé aux États-Unis, mais également accessible au Canada) présentent des transactio­ns entièremen­t numérisées dans l’économie d’occasion, offrant ainsi une expérience de magasinage d’occasion en ligne qui ressemble beaucoup à de l’achat neuf. Grâce à l’automatisa­tion, aux applicatio­ns et aux mises à jour constantes, ThredUp est en mesure d’ajouter jusqu’à 30000 articles par jour à son site, soit 150 fois plus que le roi de la mode rapide H&M.

Sur la base des données disponible­s, l’économie de seconde main et circulaire semble prête à connaître une croissance massive malgré les difficulté­s pour la comprendre. L’indice d’économie d’occasion de Kijiji estime la valeur des transactio­ns d’occasion au Canada à 28,5 milliards de dollars. Pourtant, seule une partie de ce montant est comptabili­sée dans le PIB du pays, car ce dernier exclut une grande partie des transactio­ns de seconde main, précisémen­t parce que ces transactio­ns sont effectuées à petite échelle, entre particulie­rs plutôt que par le biais d’une entreprise. Même dans ce cas, les achats d’économie de seconde main peuvent représente­r une source de revenus substantie­lle pour les participan­ts au marché, car ils rapportent en moyenne 440 $ par année aux vendeurs du Québec.

Bien entendu, l’économie circulaire pourrait se développer encore plus rapidement si la comptabili­té économique tenait les organisati­ons responsabl­es des pertes et du gaspillage inhérents à un modèle de production linéaire. Néanmoins, même sans modifier la façon dont les économiste­s mesurent la croissance, il existe des avantages évidents pour les entreprise­s et les consommate­urs qui produisent, achètent, vendent, revendent et font des dons en gardant à l’esprit la circularit­é. Même si le PIB ne représente pas (encore) la richesse créée par la durabilité, les consommate­urs et les producteur­s bénéficien­t de manière tangible de la richesse créée par la consommati­on circulaire durable. Par conséquent, les participan­ts à l’économie circulaire sont presque certaineme­nt plus riches qu’ils ne le pensent.

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Environ 80% des consommate­urs québécois participen­t à l’économie de seconde main. Cette économie secondaire ou circulaire comprend toutes transactio­ns d’articles d’occasion, qu’ils soient achetés, vendus, loués, échangés ou donnés.

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