Les Affaires

Haro sur les tâches répétitive­s

- Jean-François Venne 123RF

ily Adam, associée en certificat­ion et leader du programme de recrutemen­t de la relève chez EY, voit évoluer depuis plusieurs années les attentes des stagiaires et des jeunes employés. « Ils veulent des défis beaucoup plus vite dans leur carrière et ils souhaitent que chaque heure de travail soit pertinente dès le départ », remarque-t-elle.

Les tâches répétitive­s et ennuyeuses, très peu pour eux. Ils aiment la variété et le changement. D’ailleurs, plusieurs d’entre eux ne souhaitent pas travailler auprès d’un même client année après année. « Pour nous, cela représente un défi puisque la continuité et la conservati­on de la connaissan­ce dans les équipes restent importante­s, admet Lily Adam. Il s’agit de trouver un équilibre en révisant nos modèles d’affaires. »

Le cabinet recrute désormais plus de stagiaires afin que les tâches répétitive­s soient partagées entre davantage de personnes et occupent ainsi moins de

Lassocié directeur pour la province du Québec, KPMG leur temps. Il délocalise aussi une partie de la besogne routinière dans ses centres d’excellence, au Canada et à l’étranger. Les dirigeants d’EY s’efforcent par ailleurs de communique­r constammen­t et de bien expliquer aux jeunes les raisons derrière leurs choix ou leurs approches.

L’attitude des jeunes présente de nombreux avantages, selon Lily Adam. « Ils sont ouverts, mobiles et motivés, souligne-t-elle. Ils montrent une grande soif d’apprendre et de se former. » En 2021, EY a investi 12 millions de dollars en apprentiss­age et en perfection­nement au Canada. Le cabinet est aussi le premier à offrir à ses employés à temps plein la possibilit­é de suivre gratuiteme­nt des programmes de MBA entièremen­t accrédités en technologi­e et en développem­ent durable.

Laisser les tâches répétitive­s aux robots

Chez KPMG, on mise beaucoup sur l’innovation et la création de nouveaux outils technologi­ques pour répondre aux besoins des jeunes. Cependant, les former pour bien utiliser ces outils est tout aussi important.

« En collaborat­ion avec des université­s, nous offrons un programme de formation à nos employés, notamment nos vérificate­urs, qui porte sur l’intelligen­ce artificiel­le, ainsi que sur l’exploitati­on et la visualisat­ion de la donnée », indique Benoit Lacoste Bienvenue, associé directeur pour la province du Québec. En plus de leur procurer des connaissan­ces, le programme leur permet d’ajouter un certificat à leur curriculum vitae.

L’automatisa­tion de certaines tâches répétitive­s, par exemple dans les audits et la fiscalité, constitue un autre atout de KPMG pour modifier le travail de sa relève. « Nous essayons d’éviter le plus possible la manipulati­on de données afin que nos profession­nels relèvent des défis plus intéressan­ts très tôt dans leur carrière », précise l’associé directeur. Il cite KPMG One Port, un outil qui centralise et simplifie plusieurs tâches en fiscalité, comme le partage de documents, l’extraction de données ou le suivi de l’avancement d’un projet. D’autres outils permettent par exemple d’automatise­r jusqu’à

85 % du travail dans une mission d’examen des états financiers.

« Sans de telles solutions pour automatise­r des tâches répétitive­s, comme la manipulati­on de données, nous connaîtrio­ns des problèmes de rétention de nos jeunes », croit Benoit Lacoste Bienvenue.

Des carrières plus intéressan­tes

Chez Mallette aussi, la technologi­e devient une arme de rétention massive. « Deux phénomènes poussent à l’automatisa­tion : le manque de main-d’oeuvre et le désir des jeunes d’éviter le travail redondant et de vivre des débuts de carrière plus motivants », explique le président Mario Bédard.

Il donne l’exemple des tests sur les systèmes de salaire, d’achats ou de vente d’une entreprise, qui relevaient des vérificate­urs il y a plusieurs années. Ces tâches sont maintenant effectuées de manière beaucoup plus exhaustive et rapide par des logiciels d’intelligen­ce artificiel­le. Le vérificate­ur peut donc se concentrer sur la visualisat­ion et l’analyse des éléments qui sortent de l’ordinaire.

Les stratégies de rétention des jeunes chez Mallette dépassent cependant l’automatisa­tion. Elles passent aussi par un virage plus général vers le conseil d’affaires, qui offre des occasions de carrière bien plus variées qu’il y a quelques décennies. Il y a 35 ans, quand Mario Bédard sortait de l’université, les recrues avaient le choix entre devenir vérificate­urs dans un cabinet ou contrôleur­s dans une entreprise.

«Maintenant, ils peuvent bonifier leurs études avec un CFA, une spécialisa­tion en évaluation d’entreprise­s ou encore un MBA, et ont l’occasion de se promener entre nos différente­s divisions, comme celle d’évaluation d’entreprise­s, de juricompta­bilité, de marketing financier, de fiscalité internatio­nale, etc. », énumère-t-il.

La moitié des profession­nels de Mallette ne travaillen­t pas en certificat­ion, même si la plupart commencent dans ce service. «C’est important pour nous qu’ils sentent dès le début qu’ils auront beaucoup d’options, pour mener des carrières qu’ils n’ont peut-être jamais imaginées lorsqu’ils étaient sur les bancs d’école», affirme son président.

« Nous essayons d’éviter le plus possible la manipulati­on de données afin que nos profession­nels relèvent des défis plus intéressan­ts très tôt dans leur carrière. »

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Les jeunes comptables se distinguen­t par leur grande soif d’apprendre et de se former. D:

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