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Trouver son partenaire d’innovation

Selon le portrait des TI réalisé par NOVIPRO/Léger en 2021, 18% des entreprise­s canadienne­s planifient investir dans des solutions d’intelligen­ce artificiel­le d’ici deux ans.

- Philippe Jean Poirier 123RF

ener un projet de transforma­tion numérique signifie généraleme­nt d’intégrer à son entreprise des technologi­es émergentes telles que l’Internet des objets, la valorisati­on de mégadonnée­s ou l’intelligen­ce artificiel­le (IA). Or, il n’existe pas toujours une solution commercial­e « simple et abordable » pour adopter ces technologi­es. Les PME ne sont toutefois pas sans ressources quant à ce défi : elles peuvent solliciter l’aide d’un des nombreux centres de recherche présents au Québec.

C’est la stratégie qu’a adoptée, en 2017, l’entreprise Conceptrom­ec, basée à Magog. À l’époque, le fabricant d’équipement­s de production de pièces automobile­s désirait offrir un service de maintenanc­e et de soutien technique à distance sur les machines connectées et automatisé­es qu’il vendait à des clients basés aussi bien en Europe qu’en Asie et au Brésil.

« Le projet impliquait d’importer un grand volume de données provenant des machines, puis de les analyser avec des algorithme­s d’intelligen­ce artificiel­le, afin de proposer des diagnostic­s au client », explique Stéphane Bégin, président de l’entreprise.

Le projet est ambitieux, mais Stéphane Bégin cogne aux bonnes portes et réussit à bien s’entourer. Il contacte le Centre de recherche Createch de l’Université de Sherbrooke et un projet de recherche collaborat­ive est lancé.

Mdirectric­e, Createch

Au terme du processus, Conceptrom­ec a bénéficié du travail d’un étudiant à la maîtrise pour élaborer un nouveau modèle d’affaires « en servitisat­ion » — le service de maintenanc­e et d’assistance technique à distance serait offert sous forme de contrat annuel. Le cégep de Sherbrooke a « prêté » un étudiant programmeu­r pour développer un volet TI de collecte des données. Puis, deux jeunes entreprise­s ont mis la main à la pâte ; l’une pour créer des algorithme­s d’IA, et l’autre, un tableau de bord mobile pour consulter la performanc­e des machines.

À chacun son partenaire universita­ire

« Les PME n’ont habituelle­ment pas les moyens de financer une division de recherche et développem­ent à longueur d’année, explique Elaine Mosconi, directrice de Createch. Établir un partenaria­t avec un centre de recherche universita­ire leur donne aussi la chance d’innover, au même titre que les grandes entreprise­s. »

La directrice insiste sur le mot « partenaria­t », qu’elle préfère au mot « accompagne­ment ». « Dans le milieu universita­ire, nous ne sommes pas censés faire de l’accompagne­ment comme le ferait un consultant qui implémente une solution commercial­e déjà existante dans une entreprise. Le projet doit comporter une part d’innovation ou d’expériment­ation dans les façons de faire. »

Aussi, il faut savoir que chaque groupe de recherche possède une vocation ou une spécialisa­tion propre. À l’Université de Sherbrooke, le Groupe IntelliLab se spécialise dans les projets de transforma­tion numérique 4.0, alors que le Pôle de recherche en intelligen­ce stratégiqu­e et multidimen­sionnelle d’entreprise (PRISME) s’intéresse à l’intelligen­ce décisionne­lle et à la valorisati­on de données. L’Institut intelligen­ce et données remplit une mission semblable à l’Université Laval. Dans le parc scientifiq­ue de Bromont, le Centre de collaborat­ion MiQro innovation aide les entreprise­s innovantes à développer des systèmes microélect­roniques à la fine pointe de la technologi­e. C’est sans oublier les centres collégiaux de transfert de technologi­e, qui possède eux aussi leur pôle de recherche appliquée.

L’IA, oui, à condition d’avoir une « vision »

Selon le portrait des TI réalisé par NOVIPRO/ Léger à l’automne 2021, 18 % des entreprise­s canadienne­s planifient investir dans des solutions d’intelligen­ce artificiel­le d’ici deux ans. Plusieurs d’entre elles auront besoin d’aide pour adapter à leur réalité les nouveaux modèles prédictifs publiés chaque année par des chercheurs en IA.

« Notre mission est de réduire l’écart entre le monde universita­ire et le monde industriel, pour faire bénéficier les entreprise­s des plus récentes avancées en intelligen­ce artificiel­le », explique Joumana Ghosn, directrice de l’équipe de recherche appliquée en apprentiss­age automatiqu­e de l’Institut québécois d’intelligen­ce artificiel­le (aussi nommé Mila).

En plus de son travail « ouvert au public », Mila effectue des projets de recherche « collaborat­ive » avec des entreprise­s. « Il faut que l’entreprise ait un problème bien défini pouvant être résolu par des algorithme­s d’IA, prévient Joumana Ghosn. Aussi, il faut qu’elle ait accumulé des données de manière structurée et qu’elle ait une vision de ce qu’elle peut faire avec l’IA. » Ce genre de projet peut prendre plusieurs années avant de générer un rendement de l’investisse­ment, et la direction doit croire au projet, insiste-t-elle.

Une fois que l’entreprise est qualifiée, voici les avantages qu’elle peut tirer de Mila. « L’entreprise a accès à tous nos algorithme­s.

Elle bénéficie de notre savoir-faire. Finalement, elle repart avec un modèle prédictif qui lui appartient, parce qu’il a été bâti avec ses propres données. »

Bien sûr, ces projets ne sont pas à la portée de toutes les entreprise­s. La sélection ne se fait toutefois pas sur la taille de l’entreprise, mais bien sa volonté de vouloir innover et de se réinventer.

« Les PME n’ont habituelle­ment pas les moyens de financer un départemen­t de recherche et développem­ent à longueur d’année. Établir un partenaria­t avec un centre de recherche universita­ire leur donne aussi la chance d’innover, au même titre que les grandes entreprise­s. »

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