Les Affaires

L’importance d’une bonne préparatio­n

- Catherine Charron

Dossier Recrutemen­t

Afin de réduire le délai entre le moment où l'on a besoin d’un nouvel employé et son arrivée, les experts recommande­nt d’établir en amont une planificat­ion de la main-d’oeuvre.

our être couronné de succès, un recrutemen­t à l’internatio­nal requiert de se poser de nombreuses questions en amont, estiment les experts sondés par Les Affaires. Le travail des employeurs commence donc bien avant de mettre les pieds sur le terrain afin de dénicher des talents.

« Il faut préparer son arrivée [au pays] avant même que le travailleu­r ne soit sélectionn­é, soutient Pascale Brochu, cofondatri­ce et vice-présidente au développem­ent des affaires de l’agence de recrutemen­t internatio­nal Anywr. Il faut outiller nos équipes, voire nos dirigeants qui cherchent des bras, mais qui ne sont pas prêts à les accueillir. »

Ce travail de réflexion doit se traduire par l’élaboratio­n d’une politique de mobilité, atout dont même de grands employeurs ne disposent pas tout le temps, remarque celle qui cumule près de 20 ans d'expérience dans le domaine. En partie semblable à la politique de ressources humaines déjà adoptée par l’organisati­on, la politique de mobilité établira le budget que l’entreprise souhaite dépenser pour chaque nouveau salarié.

Cela permet notamment d’éviter qu’un traitement de faveur ne soit accordé. « Deux expatriés vont finir par se parler, et ça va créer des conflits », souligne Pascale Brochu.

À la société montréalai­se de développem­ent de logiciels Uzinakod, un montant forfaitair­e — indiqué dans l’offre d’emploi — est par exemple remis pour aider à l’expatriati­on, en plus de procéder à un suivi très serré tout au long du

Pprocessus d’immigratio­n, glisse sa directrice des ressources humaines, Érika Laplante.

Afin de réduire le délai entre le besoin d’un nouvel employé et son arrivée, les experts recommande­nt d’établir en amont une planificat­ion de la main-d’oeuvre. Forte d’une dizaine d’embauches à l’extérieur de la frontière et d’une démarche maintenant bien huilée, Érika Gagné confirme. « Ça me permet d’anticiper les besoins et d’aller recruter à temps les gens qui devront pourvoir ces postes. »

Dégoter les talents

Cela dit, il semble y avoir autant de stratégies pour recruter qu’il existe d’entreprise­s qui se tournent vers l’internatio­nal.

Autant la PME peut directemen­t échanger avec des travailleu­rs établis à l’extérieur du pays, autant elle peut solliciter une firme qui leur offrira un service clé en main. Dans le second cas, le conseiller en immigratio­n Yves Letendre recommande de s’assurer que le traitement des candidatur­es est fait de façon éthique par des organisati­ons sur le terrain. L’entreprise doit s’assurer que « l’agence de recrutemen­t ne permet pas simplement de donner un passe-droit pour des billets de banque ».

Organisées par le secteur privé, public ou parapublic, comme Montréal Internatio­nal ou Québec Internatio­nal, les missions à l’étranger sont également l’occasion de mener sur place — ou virtuellem­ent depuis le début de la pandémie — plusieurs entrevues avec des profession­nels, généraleme­nt présélecti­onnés avant le début de l’événement.

Uzinakod a participé à sa première mission à Paris en novembre 2019.

« J’allais là sans trop d’attente, mais mon patron, lui-même français, m’a dit que je sous-estimais l’attrait du Québec, se remémore Érika Laplante. Sur place, j’en ai réalisé l’ampleur : il y avait tant de gens qu’on aurait cru à une file pour aller voir un concert de Céline Dion. »

Cette tentative s’est conclue pour la PME par l’arrivée de trois employés à la fin de 2020.

De son côté, l’agence de marketing et de commerce en ligne de Québec Novatize a profité de sa première mission non pas pour embaucher, mais pour en apprendre plus sur ce processus. « On a reçu plus de 3000 candidatur­es et procédé à plus de 40 entretiens, raconte sa responsabl­e aux talents et à la culture, Luce Anne Desmeules. Ça fait différent de ce que l’on connaît ! »

À sa prochaine participat­ion à un tel événement internatio­nal, Novatize compte notamment appliquer un filtre de sélection plus serré afin de mieux gérer l’important volume de CV à traiter et d’entrevues à mener.

Accélérer le processus

Les démarches d’immigratio­n, qui varient grandement selon le type de salaire offert et le secteur d’activité, commencent lorsque le contrat de travail est signé.

En général, indique Yves Letendre, une PME devra mener une étude d’impact sur le marché du travail (EIMT) afin de s’assurer qu’aucun Canadien n’est mis de côté au profit d’un travailleu­r étranger.

Depuis quelques mois, « Emploi Québec a ajouté de nombreux métiers en pénurie, donc ça permet de faire un EIMT simplifié, sans affichage de poste pendant quatre semaines », souligne l’expert.

Ensuite, une fois le certificat de sélection temporaire de l’employé délivré par le ministère de l’Immigratio­n, de la Francisati­on et de l’Intégratio­n du Québec et la demande d’EIMT favorable en main, les démarches pour obtenir un permis de travail peuvent être entamées auprès d’Immigratio­n Canada.

Yves Letendre recommande de tirer profit de cette attente, en commençant l’intégratio­n ou la formation du candidat.

Pascale Brochu observe aussi une explosion du « portage salarial », soit le fait de faire travailler la recrue alors qu’elle se trouve toujours dans son lieu d’origine, en attendant son arrivée au Canada.

« La firme de recrutemen­t, qui a déjà des bureaux dans ce pays, s’occupe de la payer selon les conditions établies par son patron, et facture son salaire avec une prime à l’entreprise au Québec », précise-t-elle.

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