Les Affaires

S’enraciner en Abitibi grâce à Ilec Industries

- Ruby Irene Pratka

Dossier

IRecruteme­nt

l y a deux ans, Hama Lankoandé ne pouvait pas situer l’Abitibi sur une carte. Aujourd’hui, le technicien en génie mécanique d’origine burkinabè est bien installé dans la région avec sa famille. Il exerce son métier à Ilec Industries, à Macamic.

En 2019, le technicien travaillai­t à Bobo-Dioulasso, deuxième ville en importance du Burkina Faso, en Afrique de l’Ouest. Certains de ses amis étaient déjà partis à l’étranger, mais à l’époque, il n’avait pas très envie de voyager et se méfiait des nombreuses escroqueri­es entourant les offres de travail à l’étranger dans sa région. Or, quand un ami l’a mis en contact avec l’Agence de placement et de développem­ent internatio­nale (APDI), dirigée par Marc Blais, il a décidé d’envoyer son CV.

Après deux ans de démarches — ralenties par la pandémie —, Hama Lankoandé est arrivé au Québec en mars 2021.

Puis, après deux semaines de quarantain­e dans un hôtel montréalai­s, troisième vague oblige, il a entrepris le long voyage jusqu’en Abitibi.

À Macamic, le recrutemen­t local était déjà au point mort depuis un bon moment. «On affichait des postes de soudeur, de machiniste et de technicien sans recevoir un seul CV, se souvient la coordonnat­rice aux ressources humaines à Ilec Industries, Marie-Pier Plante. Le seul moyen d’embaucher un machiniste local aurait été d’en voler un [d’une autre entreprise]. Mais si on l’avait fait, on nous aurait volé quelqu’un par la suite!»

Le PDG de l’entreprise, Ivan Lecours, connaissai­t Marc Blais. Il a donc décidé de faire appel à

APDI pour recruter trois soudeurs et un technicien en génie mécanique, faire le tri des CV et coordonner les processus d’entrevue, de vérificati­on et d’évaluation des compétence­s.

« Les démarches bureaucrat­iques sont complexes, et il y a toujours de nouveaux programmes gouverneme­ntaux qui sont mis sur pied ou d’autres qui ferment, observe Marie-Pier Plante. L’avantage de travailler avec une agence, c’est que les experts se chargent de la bureaucrat­ie.»

Le temps de prendre sa place

Une fois les travailleu­rs burkinabè arrivés, le Service des ressources humaines d’Ilec a collaboré avec le Carrefour jeunesse-emploi de la région afin de permettre aux quatre hommes de se familiaris­er avec la petite ville abitibienn­e et les services qui y étaient offerts.

Ivan Lecours a misé sur ces travailleu­rs parce qu’ils parlaient français et que beaucoup d’entre eux avaient déjà une certaine expérience dans la fabricatio­n d’équipement­s miniers. « Leurs employeurs précédents n’ont pas nécessaire­ment les mêmes équipement­s que nous, donc on doit les former, ce qui prend de quatre à six mois, précise le PDG. Mais après six mois, ils peuvent vraiment prendre leur place. C’est moins long que de former une personne qui sort de l’école.»

Dans l’entreprise, il a fallu procéder à une certaine adaptation, notamment expliquer aux travailleu­rs locaux la nécessité de recruter à l’étranger et apprendre à communique­r avec eux.

Il a décidé de jumeler les nouveaux arrivants aux travailleu­rs expériment­és, et l’intégratio­n sur le plancher du travail s’est bien passée. « Tout le monde aime partager ses connaissan­ces », souligne-t-il.

Hama Lankoandé, pour sa part, admet qu’il était «un peu sonné» à son arrivée en Abitibi, tant par la météo et la nourriture que par la solitude. Cependant, malgré les mesures sanitaires qui limitaient les occasions d’interactio­n sociale, il a pu compter sur le soutien de ses collègues et voisins. La propriétai­re de son premier appartemen­t l’a même invité en camping avec des amis. «J’ai vu que les gens étaient prêts à s’ouvrir à nous si on s’ouvrait à eux,se rappelle-t-il. Les Burkinabè et les Québécois ont ça en commun. »

Avec le soutien de son employeur, il a commencé ses démarches pour obtenir la résidence permanente pour lui-même et sa famille. Sa conjointe et leurs deux enfants sont venus le rejoindre en mars dernier. L’aîné va déjà à l’école, et la famille commence à s’enraciner. «L’essentiel, c’est d’être réunis; tout le reste est facultatif», sourit le père de famille.

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