Les Affaires

S’incorporer en immobilier, ça vaut la peine ?

- Charles Poulin

incorporer lorsqu’on est investisse­ur immobilier comporte des avantages, mais pas ceux auxquels on pourrait penser au premier abord.

La première raison qui fait pencher un investisse­ur du côté de l’incorporat­ion est habituelle­ment la possibilit­é de sauver de l’impôt. En réalité, ce n’est pas ce qui se passe.

Le revenu de location peut être passif ou actif. Le revenu de location de logements est du revenu passif. Pour que ce soit du revenu actif, il faut que ce soit considéré comme du revenu d’entreprise (hôtellerie, résidence de personnes âgées, flips) ou encore que vous ayez plus de cinq personnes à votre emploi.

« Le revenu d’une société est imposé à

50,17 % si vous avez moins de cinq employés, note Jimmy Lacoursièr­e, fiscaliste chez Desjardins Gestion de patrimoine. Si le revenu net est ajouté à votre revenu personnel, il sera plutôt assujetti à votre taux d’imposition marginal, qui sera plus bas. Ce n’est fiscalemen­t pas très avantageux de s’incorporer si vous avez du revenu de location passif. On ne fait pas ça pour sauver de l’impôt à court terme. »

Charles HunterVill­eneuve, fiscaliste et planificat­eur financier à Banque Nationale Gestion privée 1859, ajoute qu’un avantage de ne pas être incorporé est que l’investisse­ur peut se servir des pertes locatives pour baisser son revenu imposable.

Par contre, si c’est du revenu actif, il devient alors intéressan­t de

S’s’incorporer, estime-t-il. En respectant le barème minimal d’heures annuelles à consacrer à l’entreprise, le taux d’imposition sera de 12,2 % pour des profits de moins de 500 000 $, et de 26,5 % pour des profits de plus de 500 000 $.

Autres avantages

Si payer moins d’impôts n’est pas un avantage de l’incorporat­ion, il n’en demeure pas moins qu’elle présente plusieurs autres attraits.

L’incorporat­ion d’une société peut être intéressan­te pour transférer la plus-value du parc immobilier aux enfants ou à une fiducie familiale, explique Jimmy Lacoursièr­e.

« Disons qu’on incorpore une entreprise d’une valeur de 1 million de dollars (M $) et qu’au décès du fondateur, l’entreprise vaut 10 M $. Le 9 M $ de plus-value sera entre les mains de la fiducie familiale, précise-t-il. Le défunt sera imposé sur le montant initial, et le reste de l’impôt sera reporté et devra être payé par les fiduciaire­s lorsqu’ils sortiront les actions ou l’argent de la fiducie. »

L’incorporat­ion de l’entreprise immobilièr­e permettra également aux enfants du défunt de poursuivre les opérations.

Plusieurs personnes qui achètent des immeubles devraient également songer à s’incorporer, estime Jimmy Lacoursièr­e.

« S’il y a un décès, qu’on ajoute un partenaire ou qu’on en enlève un, il y aura toujours des droits de mutation et il faudra notarier les transactio­ns si on n’est pas incorporé, note-t-il. Lorsqu’on est incorporé, la gestion est beaucoup plus facile. Tout reste dans la société. »

La protection légale qu’offre une entreprise est un autre avantage recherché par les investisse­urs, remarque Charles Hunter-Villeneuve.

« L’aspect juridique de l’incorporat­ion permet de protéger ses biens personnels ou l’équité générée sur les biens immobilier­s en cas de poursuite par des créanciers », soumet-il.

Le revenu qui se fait à l’intérieur d’une société, et qui n’est donc pas ajouté au revenu personnel de l’investisse­ur, permettra de toucher de plus grands crédits d’impôts personnels et autres programmes gouverneme­ntaux (la pension de la Sécurité de vieillesse, par exemple), ajoute-t-il.

Chaque situation est différente

Les deux fiscaliste­s rappellent que chaque situation est différente, ce qui rend une réponse unique pour l’incorporat­ion impossible. Des tendances se dégagent toutefois.

« Fiscalemen­t, la réponse est plus souvent non qu’autre chose », tranche Charles Hunter-Villeneuve.

Une personne qui a seulement un triplex et 70 000 $ de revenus annuels ne bénéficier­a pas non plus d’une incorporat­ion, mentionne Jimmy Lacoursièr­e. Les frais d’incorporat­ion et les frais d’états financiers, entre autres, mineront la rentabilit­é de tout revenu passif.

« À l’inverse, plus la situation est complexe, plus il sera intéressan­t de s’incorporer », tranche Jimmy Lacoursièr­e.

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