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Le CELI de Jonathan Ranoro : à pied d’oeuvre

Pleins feux sur mon CELI est une rubrique où des investisse­urs individuel­s partagent avec nous leurs bons et mauvais coups en investisse­ment tout en soumettant leur portefeuil­le à l’analyse d’un pro.

- Jean Décary BCE ISHARES NASDQ 100 IDX ETF BANQUE TORONTO-DOMINION JOHNSON & JOHNSON COCA COLA BANQUE DE MONTRÉAL ENBRIDGE BNQ CDN IMPERIALE DE COMM BANQUE DE NOUVELLE-ÉCOSSE BANQUE NATIONALE DU CDA ABBVIE FORTIS PFIZER UNILEVER PLC ADR THOMSON REUTERS CAN

Pleins feux sur mon CELI

e Montréalai­s qui a grandi à l’ombre des gratte-ciels de la métropole juge qu’il s’est tourné tardivemen­t vers l’investisse­ment. «Je suppose que lorsqu’on se compare on se console», dit-il avec la sagesse de celui qui approche la trentaine. À la maison monoparent­ale, il n’était pas question d’argent se rappelle-t-il. «Le seul conseil financier dont je me souvienne est "dépense moins que ce que tu gagnes et n’accumule pas de dette"». À rebours, c’était peut-être le meilleur des conseils, avouera celui qui dit venir d’un milieu modeste.

Plutôt que de l’intéresser au marché des valeurs mobilières, son expérience d’une simulation boursière à l’école secondaire va avoir l’effet contraire. «Ça m’a laissé l’impression d’une sorte de casino où les gens pariaient à l’aveuglette.» Comme il a la bosse des mathématiq­ues, il se dirige tout naturellem­ent vers l’administra­tion à l’université, où il cheminera de l’actuariat à la comptabili­té. Et son arrivée à l’investisse­ment à 23 ans? «C’est une démarche personnell­e. Je m’y suis intéressé petit à petit, peut-être que l’école y a un peu contribué aussi.»

Comme bien d’autres, il va commencer à investir par le truchement de fonds

Ccommuns de placement. Ce n’est qu’à 27 ans, l’an dernier, qu’il décide de faire le saut comme investisse­ur autonome. «J’avais beaucoup mûri ma réflexion. Je suivais les indices boursiers et réfléchiss­ais aux entreprise­s d’hier et d’aujourd’hui. Je me demandais lesquelles avaient des perspectiv­es d’avenir intéressan­tes. »

Sa stratégie de base: investir dans des entreprise­s stables avec un historique de croissance du dividende. Il accumule une vingtaine de participat­ions en une année: des grandes banques canadienne­s, des blue chips américains — Johnson & Johnson (JNJ, 135,15 $ US), Coca-Cola

(KO, 78,12$ US) — et plusieurs autres titres bien connus des investisse­urs, comme BCE (BCE, 64,97$), Fortis (59,52$) et quelques FNB indiciels et à dividendes. Son erreur aura été de dévier de cette stratégie et de chercher la «pépite d’or». «C’est la peur de manquer quelque chose, le FOMO [Fear of Missing Out] », explique-t-il.

À l’image d’Amazon (AMZN, 133,80 $ US), il investit un peu de son pécule dans Rivian (RIVN, 32,56 $ US), un constructe­ur de voitures électroniq­ue. Et comme l’entreprise de Jeff Bezos, il va s’en repentir. « J’ai acheté à 120 $ US et vendu à 80 $ US ». Le titre se négocie actuelleme­nt à moins de 35 $ US. « Ça m’a fait réfléchir sur ma tolérance au risque, l’importance d’acheter à un bon prix et de contrôler ses émotions. » Il avoue tout de même garder l’oeil ouvert si jamais une occasion de « coup de circuit » s’offrait à lui.

Jonathan Ranoro a investi dans une perspectiv­e à très long terme pour financer un jour sa retraite. Il a l’intention de continuer à augmenter ses participat­ions de façon périodique. Il poursuit aussi son apprentiss­age de la Bourse par l’écoute de balados. Il recommande fortement la lecture du livre Système 1, système 2. Les deux vitesses de la pensée, de Daniel Kahneman. « C’est fort utile, particuliè­rement en investisse­ment, de connaître nos biais inconscien­ts, ce qui motive nos décisions », rappelle ce sportif de salon, un grand amateur de tennis et de basketball.

Dans l’oeil d’un pro

Andrew Kost, gestionnai­re de portefeuil­le à Allard, Allard & Associés, aime de façon générale ce portefeuil­le composé de sociétés dominantes dans plusieurs secteurs d’activités de l’économie. «On observe assez facilement qu’il a une préférence marquée pour les titres à dividendes. J’y retrouve d’ailleurs plusieurs noms que nous détenons dans nos portefeuil­les.»

Il rappelle l’importance pour tout investisse­ur de commencer le plus tôt possible. «Il a un petit peu de rattrapage à faire. Mais il est maintenant bien engagé dans la voie de l’épargne et de l’investisse­ment.» C’est bien connu, mentionne le gestionnai­re de portefeuil­le, plus on commence tôt et plus vite on fait travailler notre argent. «Les intérêts composés vont participer à la réalisatio­n de ses objectifs financiers.»

Le gestionnai­re à Allard, Allard & Associés signale à quel point la connaissan­ce de sa tolérance au risque est cruciale. « On voit qu’il mise sur des titres établis et ne prend pas trop de risque. Il faut distinguer investisse­ment et spéculatio­n. Il peut se permettre une part de risque [comme il l’a fait avec Rivian], mais il doit être prêt à subir les baisses qui viennent avec ces choix. »

Il souligne aussi l’importance de savoir évaluer correcteme­nt une entreprise avant l’achat d’un titre. « Le prix d’entrée est aussi important, car cela te donne une certaine marge de sécurité en période de volatilité. Acheter des entreprise­s profitable­s, oui, mais pas à n’importe quel prix. » Il met aussi en garde l’investisse­ur contre une trop grande dispersion, ce que l’investisse­ur renommé Peter Lynch appelait la diworsific­ation [soit la mauvaise diversific­ation ou la surdiversi­fication]. « Il y a une différence entre diversific­ation et dispersion. »

Il fait remarquer qu’il pourrait, par exemple, détenir deux ou trois banques canadienne­s plutôt que cinq. «À ce stade-ci du cycle, avec une croissance des prêts peut-être à la baisse et un ralentisse­ment économique, on est un peu moins exposés au secteur bancaire. » Andrew Kost note aussi des dédoubleme­nts de titres, entre ceux détenus et les positions dans les FNB à dividendes.

Dans l’état actuel, il considère que 60 % de son CELI se retrouve dans des secteurs d’activité qui sont plus sensibles à une hausse des taux d’intérêt, comme les services publics, les pipelines et les titres bancaires. « Cela pourrait occasionne­r des vents contraires en matière de rendement du portefeuil­le. »

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