Collection
L’artiste Dil Hildebrand
Diana Hamm nous parle de Dil Hildebrand, un peintre
montréalais à surveiller.
L’ARTISTE : Dil Hildebrand crée des oeuvres audacieuses, lumineuses et dynamiques, qui marient plusieurs techniques. Originaire de Winnipeg et installé à Montréal, Dil a une maîtrise en beaux-arts de l’Université Concordia. S’inspirant autant d’Henri Matisse que d’architecture, il invite les spectateurs dans son univers grâce à ses travaux en 3D.
SON TRAVAIL : En 2006, Dil a remporté le Concours de peinture canadienne de RBC, qui constitue le point culminant d’une carrière pour beaucoup d’artistes, ainsi propulsés sur le devant de la scène artistique canadienne. Enchanté de cette distinction, Dil a pourtant choisi ce moment précis pour prendre un nouveau virage : il avait envie de nouveauté, loin des traditionnelles peintures à l’huile de paysages. Son style actuel, caractérisé par la couleur et l’espace, va bien au-delà des possibilités offertes par l’huile comme unique technique.
Ce qui m’a attiré dans son travail, ce sont les superpositions. Ainsi, dans The Wolf howleth (2017), il est parti d’un panneau acrylique (semblable à une grande
feuille de verre) qu’il a recouvert de grands coups de peinture acrylique bleu vif. L’utilisation d’une peinture à base d’eau permet d’obtenir des traits ayant des consistances différentes, chaque nouveau coup de pinceau modifiant la saturation du bleu. Il a ensuite ajouté un autre panneau acrylique, sur lequel il a peint une bordure blanche, et dont il a recouvert la surface de fibre en nylon (matériau souvent utilisé dans le papier peint), de sable et de nouvelles couches de peinture. Cette superposition de panneaux est essentielle, car elle crée un effet de profondeur pour ceux qui regardent le tableau. La tridimensionnalité est tangible, l’art se faisant à la fois image et objet.
L’importance de l’architecture dans le travail de Dil transparaît dans sa façon de traiter l’espace et la perspective, et de créer un lien physique entre le tableau et le spectateur. « Pour moi, un tableau accroché à un mur est un élément architectural en soi, dit-il. J’ajoute toujours de la profondeur dans mon travail, afin d’inviter les spectateurs à s’immiscer à l’intérieur. » Le spectateur interagit physiquement avec les tableaux perçus comme des fenêtres ou des portes, au lieu de rester un observateur passif. Dans Modus (2019), l’une de ses plus récentes oeuvres, Dil a renoué avec l’art figuratif. Il a utilisé une photo comme base et l’a recouverte d’une couche de peinture verte, qui opère comme une barrière à traverser : nous sommes invités à nous faufiler pour atteindre les arbres dissimulés en dessous.
La technique de Dil est spectaculaire. « La peinture est une sorte de théâtre : le cadre est la scène et ce qui est à l’intérieur constitue le spectacle. » Cette idée me séduit d’autant plus qu’il a passé beaucoup de temps à concevoir des décors pendant ses études. Cette époque a été très formatrice : les peintures servant de toiles de fond sur un plateau jouent le même rôle que les sous-couches de ses tableaux. Le contraste entre l’arrière-plan et l’avant-plan souligne la fonction de son oeuvre architecturale qui prend possession de l’espace.
Ce qui rend ses oeuvres si attrayantes, ce sont les formes et les couleurs qu’il utilise. Les formes traduisent l’influence d’artistes tels que Matisse, Sigmar Polke et Richard Diebenkorn. Dans le tableau The Frog croaketh (2017), tous les éléments ajoutés sur le panneau supérieur ont été découpés et peints à la main. Les imperfections des lignes droites et les marques de crayon ajoutent du caractère aux formes tandis que l’orange vif, le jaune et le vert attirent le regard. Son travail est joyeux tout en étant réfléchi, équilibre subtil difficile à atteindre.
COLLECTIONS : Dil a exposé dans le monde entier — Pékin, Cologne, Londres, New York et Auckland — et bien sûr au Canada. Ce lauréat de prix et de bourses prestigieux a des oeuvres exposées dans de grandes institutions publiques, comme le Musée des beaux-arts de Montréal, le Musée d’art contemporain de Montréal, le Musée des beaux-arts du Canada et la Banque d’art du Conseil des arts du Canada, et dans des collections privées (RBC, TD, BMO et Osler, Hoskin & Harcourt). Le premier prix pour une petite toile est de 3000 $.